• Accueil >
  • Bibliothèque de la jurisprudence
  • CUB 13171

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la Loi de 1971 sur l'assurance-chômage

    - et -

    d'une demande de prestations présentée par
    PETER MUECK

    -et-

    d'un appel interjeté devant un juge-arbitre par le prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Scarborough (Ontario) le 16 mai 1986.

    DÉCISION

    Le juge-arbitre ROULEAU

    En l'espèce, le prestataire interjette appel de la décision unanime du conseil arbitral confirmant la décision de l'agent de l'assurance-chômage selon laquelle le prestataire n'était pas admissible au bénéfice des prestations à compter du 2 février 1986 en raison du fait qu'il avait omis de prouver qu'il était disponible pour travailler.

    Le prestataire a présenté une demande de prestations le 14 février 1986, demande dans laquelle il a indiqué qu'il avait occupé un poste de manoeuvre général à temps plein du 31 octobre 1985 au 31 janvier 1986, date à laquelle il a été mis à pied en raison d'une pénurie de travail.

    Le 5 mars 1986, un agent de l'assurance-chômage a communiqué avec le prestataire, qui a déclaré qu'il fréquentait un établissement d'enseignement secondaire cinq jours par semaine, à raison de quatre heures par jour, dans le but de d'obtenir son diplôme de treizième année. Le 24 mars 1986, le prestataire a rempli un questionnaire touchant les cours de formation dans lequel il a indiqué que, bien qu'il n'avait aucun contrôle sur son horaire de cours et qu'il ne consentirait pas à abandonner ses études si un emploi s'offrait à lui, il demeurait disponible pour travailler de 15 h à 23 h tous les jours, y compris la fin de semaine.

    Le 9 avril 1986, le prestataire s'est présenté à une interview au bureau de la Commission. Sur la question de sa disponibilité, le prestataire a de nouveau affirmé qu'il consentait à travailler de 15 h à 23 h, et qu'il avait travaillé selon cet horaire pendant quatre ans, par intermittence, à titre de manoeuvre pour Valley Blades Ltd. Le prestataire a aussi affirmé qu'il avait postulé deux autres emplois dans des clubs de golf locaux, et qu'il était disposé à accepter un emploi dans les secteurs de Unionville/Markham.

    La Commission a obtenu des renseignements sur le marché du travail indiquant que généralement, les ouvriers d'usine doivent être disponibles pour travailler entre 7 h et 15 h, et que les ouvriers de terrains de golf doivent consentir à commencer à travailler tôt le matin. S'appuyant sur ces renseignements, la Commission a fait parvenir au prestataire un avis d'inadmissibilité daté du 25 avril 1986, dans lequel on pouvait lire ce qui suit :

    Après examen de votre demande de prestations, nous avons conclu que vous n'étiez pas admissible au bénéfice des prestations à compter du 2 février 1986 parce que vous n'avez pas prouvé que vous étiez disponible pour travailler. Vous avez restreint indûment les heures de travail que vous étiez disposé à accepter pour pouvoir participer à un programme d'enseignement. Le versement des prestations sera suspendu tant et aussi longtemps que persistera cette situation.

    [Traduction]

    Le prestataire a interjeté appel de cette décision devant un conseil arbitral, lequel a confirmé la décision de la Commission à l'unanimité. Le conseil soutenait que le Règlement sur l'assurance-chômage s'appliquait aux heures normales de travail, et que la non-disponibilité d'un prestataire au cours de cette période le rend inadmissible au bénéfice des prestations. Selon le conseil, il serait illogique de faire une exception dans un cas comme celui-ci, car cette exception ouvrirait la porte aux réclamations de tous les prestataires qui croiraient normales certaines heures particulières.

    La jurisprudence a établi qu'un prestataire peut poser des conditions particulières mais raisonnables quant aux heures de travail qu'il est disposé à accepter, mais seulement pour une période de temps raisonnable. Ce sont les faits propres à chaque cas qui sont les seuls facteurs permettant de déterminer ce qui est raisonnable. La disponibilité d'un prestataire peut être indûment restreinte si dernier n'est disposé à travailler qu'à certaines heures et pas à d'autres. Cependant, il peut en être autrement lorsqu'il existe des perspectives d'emploi aux heures voulues et lorsque le prestataire est en mesure d'établir qu'il a déjà travaillé à ces heures.

    En l'espèce, le conseil arbitral a donné une interprétation indûment restrictive de l'alinéa 25a) de la Loi sur l'assurance-chômage. À mon avis, il n'a pas pris en considération tous les éléments de preuve portés à sa connaissance et dont il fallait tenir compte pour bien interpréter cet alinéa. Ainsi, le conseil n'a tenu absolument aucun compte du fait que le prestataire avait déjà fait, par intermittence, le quart de soir (15 h à 23 h) à titre de manoeuvre dans une usine pendant environ quatre ans avant d'occuper son dernier emploi, soit un poste à temps plein, mais d'une durée de dix-neuf semaines seulement. À mon avis, la déclaration suivante du juge-arbitre qui a rendu la décision CUB 10436 est applicable en l'espèce :

    D'après sa décision, le conseil semble avoir rejeté l'appel uniquement parce que le prestataire (TRADUCTION) "imposait des restrictions à sa disponibilité pour occuper un emploi convenable (restrictions portant sur le type d'emploi choisi...)". Cela indiquerait que le conseil a été d'avis que toute restriction imposée par le prestataire sur le genre d'emploi qu'il accepterait était inacceptable. Il est clair qu'un tel point de vue n'est pas conforme à la jurisprudence, qui souligne le fait que pour que des restrictions imposées par le prestataire lui-même rendent ce dernier non disponible pour travailler, ces restrictions doivent être déraisonnables.

    (souligné par mes soins)

    Selon l'information dont le conseil disposait, il était clair que le prestataire était prêt à accepter un emploi de quelque nature que ce soit ou presque, dans une vaste région géographique et sans restrictions quant au salaire qu'il était disposé à accepter. Les restrictions quant aux heures de travail n'étaient pas déraisonnables considérant que le prestataire avait déjà travaillé selon un horaire similaire par le passé. On aurait dû accordé au prestataire un délai raisonnable pour trouver un emploi assorti d'un horaire de travail s'étalant de 15 h à 23 h, au lieu de le déclarer immédiatement inadmissible au bénéfice des prestations.

    Je suis d'avis que le conseil a omis de prendre en considération certains éléments de preuve portés à sa connaissance, éléments qui démontraient que le prestataire était « disponible pour travailler » au sens de la loi et au sens où cette expression est interprétée dans la jurisprudence.

    En conséquence, l'appel du prestataire est accueilli.

    "P. Rouleau"

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA
    Le 28 janvier 1987

    2011-01-16