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  • CUB 16202

    "TRADUCTION"

    LITIGE: Conflit collectif - engagement de bonne foi - Article 31(1)/Loi et 49 Règlement

    APPELANT: Prestataire

    DÉCISION: Rejeté

    PRESTATAIRE: David B. MORRISON et al.

    DÉCISION

    F.C. MULDOON, JUGE-ARBITRE:

    Le prestataire, et ceux qui se joignent à lui pour interjeter appel, demandent l’annulation de la décision unanime du conseil arbitral. Les prestataires étaient représentés par Erik Eriksson, premier vice-président de la section locale 1-363 du syndicat International Woodworkers of America (IWA). La Commission de l’emploi et de l’immigration du Canada (la Commission) était représentée par Christopher Sinclare, de Muir & Sinclare, avocats, de Courtenay.

    Les personnes qui se joignent au prestataire, M. Morrison, dans cette demande d'annulation de décisions de divers conseils arbitraux sont:

    Robert Davison Richard Butterworth

    James Gibson Eric Belin

    Donald Hughes Van Hoehn

    Ero Saarikko Douglas McLennan

    Ken Del Casino Lorne Smith

    Samuel Hoffheinz Alex Wasyliw

    Marc Maurice Gerald Thomas

    Stephen Pereszlenyi Blaine Redekopp

    Stephen Mork Mike Lazare

    Roy Beech Al Inglis

    Raymond Barriault Hans Baranyai

    Albert W. Stockand Mike Gajdzik

    Russell Erikson Kerry Schimunek

    Peter Pitz Ray Murray

    Doug Sinclair Lorne Whibley

    Bob Wright Larry R. Foggitt

    Fred Mastin Ron Payne

    Donald H. Howat Jim McElmon

    Lloyd Jenkins Ken E. Smith

    Benn Lindstrom Pat Jerome

    Ronald J. Halls Jim Kelly

    Chuck Fynney Ivor Robertson

    David J. Luoma Doug Spencer

    Robert D. Parker D. Blick

    Don Morrison D. Tipton

    Dale J. Niedermoser R. Bergeron

    Don E. Erikson C. Miller

    Scott Davidson G. Kelly

    Gerry Welch G.R. Martin

    W. Orrick A. Zaplotinsky

    Don Bryer Brian Haslett

    Frank W. Marsh A.R. Stockand

    Rick Dorman R.M. Weir

    Alvio Bortollotto Sauli V. Piikkila

    La pièce 1 au dossier du prestataire Morrison est typique de la décision de la Commission, exprimée par un agent d'assurance, dont il a été interjeté appel. On y lit ce qui suit:

    D'après les renseignements que vous avez fournis relativement à votre demande de prestations, vous n'êtes pas admissible au bénéfice des prestations en vertu du paragraphe 44(1) de la Loi sur l'assurance-chômage du 11 août 1986 à la fin de l'arrêt de travail, parce que vous avez perdu votre emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local où vous exerciez un emploi.

    Articles 44 de la Loi et 49 du Règlement.

    Les passages cités de la Loi sont les suivants:

    44. (1) Un prestataire qui a perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local où il exerçait un emploi n’est pas admissible au bénéfice des prestations tant que ne s'est pas réalisée l'une des éventualités suivantes, à savoir:

    a) la fin de l'arrêt du travail,

    b) son engagement de bonne foi à un emploi exercé ailleurs dans le cadre de l’occupation qui est habituellement la sienne,

    c) le fait qu'il s'est mis à exercer quelque autre occupation d'une façon régulière.

    (2) Le paragraphe (1) n'est pas applicable si le prestataire prouve

    a) qu’il ne participe pas au conflit collectif qui a causé l'arrêt du travail, qu'il ne le finance pas et qu'il n'y est pas directement intéressé; et

    b) qu’il n’appartient pas au groupe de travailleurs de même classe ou de même rang dont certains membres exerçaient, immédiatement avant le début de l’arrêt du travail, un emploi à l'endroit où s'est produit l'arrêt du travail et participent au conflit collectif, le financent ou y sont directement intéressés.

    (3) Lorsque des branches d'activité distinctes qui sont ordinairement exercées en tant qu’entreprises distinctes dans des locaux distincts, sont exercées dans des services différents situés dans les mêmes locaux, chaque service est censé, aux fins du présent article, être une usine ou un atelier distinct.

    (4) Dans la présente loi, "conflit collectif" désigne tout conflit, entre employeurs et employés ou entre employés, qui se rattache à l’emploi ou aux modalités d'emploi de certaines personnes ou au fait qu'elles ne sont pas employées.

    L’article cité du Règlement s'énonce comme suit:

    49. Aux fins de l'alinéa 44(1)b de la Loi, "l’engagement de bonne foi" s'entend de l'exercice réel d'un emploi pendant au moins deux semaines.

    Même si les faits différaient quelque peu quant à la situation particulière de chaque prestataire, les conseils arbitraux ont eu à trancher la même question. Il est utile, à titre d'exemples, de citer les décisions de trois différents conseils. Dans l'affaire Morrison, la décision du conseil arbitral (pièce 76) se lit comme suit:

    POINT EN LITIGE: conflit collectif

    DISPOSITIONS LÉGALES: articles 44 de la Loi et 49 du Règlement

    INTRODUCTION:

    Au début de l’audience, le conseil a confirmé au prestataire que chaque membre avait lu l'exposé préparé par Emploi et Immigration Canada. Le prestataire a confirmé qu'il avait lu l’exposé et a reconnu:

    a) que la question soumise à l'examen du conseil était telle qu'elle était énoncée au paragraphe 5 de la pièce no 1 de l'exposé;

    b) que l'exposé était complet et se rapportait à la question dont était saisi le conseil.

    Comme autres remarques préliminaires, la composition du conseil a été expliquée au prestataire et il lui a été précisé que le conseil siégeait à titre d'entité indépendante et distincte de la Commission. Le conseil a signalé que les pièces no 34.1 à 34.6 et 74 présentaient la position de la Commission, qui était également partie à l'appel. Il a été expliqué que le conseil, après qu'il aurait entendu l'appel et que le prestataire aurait quitté la salle d'audience, devait, pour rendre sa décision, examiner les faits portés à sa connaissance et les arguments des parties et appliquer la Loi sur l'assurance-chômage.

    Le conseil a écouté attentivement les déclarations orales que lui a faites le prestataire. Le conseil a examiné soigneusement l'exposé écrit de la Commission et les déclarations que lui a faites la représentante de cette dernière. Le conseil a également lu la lettre de l’employeur en date du 19 février 1986 et les pièces jointes à cette dernière, qui confirment les points signalés dans l’exposé, par exemple, la pièce no 14.9.

    EXPOSÉ DES FAITS:

    Le prestataire a formulé une demande de prestations d’assurance-chômage le 28 juillet 1986. Il avait travaillé en dernier lieu comme abatteur pour MacMillan Bloedel Ltd. Il a cessé de travailler par suite de la fermeture régulière du chantier. Le relevé d'emploi délivré le 21 juillet 1986 confirmait le dernier emploi du prestataire et précisait qu’il avait cessé de travailler le 11 juillet 1986 en raison d'un manque de travail. Une date prévue de rappel n’était pas indiquée ni n'était-il signalé que cette date était "inconnue". Le prestataire mentionnait dans la pièce no 26.1 qu'il devait retourner au travail le 11 août 1986. Ayant auparavant été informé que son chantier n'était pas touché par le conflit collectif entre le IWA et la FIR et étant fâché de l’inadmissibilité prononcée le 14 octobre 1986, le prestataire a interjeté appel.

    M. Eriksson a fourni des renseignements de base concernent le Division de bûcheronnage de Kelsey Bay de MacMillan Bloedel Ltd. Les appelants sont tous des bûcherons dont l'emploi est saisonnier, en ce qu'ils font l’objet de licenciements en fonction de la chaleur, de la neige et du vent. En outre, une surproduction peut donner lieu è un licenciement comme un contingentement de le production peut entraîner une fermeture, selon qu’en décide l'employeur. Lorsque la division de Kelsey Bay a prévu l'arrêt de production pour la période de quatre semaines du 14 juillet au 8 août 1986, l'employeur a fait savoir à ses employés que "les opérations régulières de production reprendront le lundi 11 août 1986". M. Eriksson a précisé qu'il s'agissait d'une date "possible" de rappel, de façon que les employés soient disponibles pour reprendre le travail selon un calendrier étalé, si le chantier rouvrait. Au sujet de la pièce no 14.9, M. Eriksson a dit que les renseignements qu’elle contenait n'étaient exacts qu'en principe, c'est-à-dire la date de retour au travail indiquée, la date réelle de rappel était fonction d'un certain nombre de facteurs, tels le temps, dans ce cas, le grand danger de feu de forêt et l'ancienneté. Certains membres de l’effectif de Kelsey Bay sont retournés au travail le 5 août 1986, après le congé de la Fête de la Colombie-Britannique. Les abatteurs et les classeurs ont travaillé le 5 août 1986, mais le 6 août 1986 ils n’ont travaillé qu’une partie de la journée et ont été "licenciés" (pièce n. 20.1) par l'employeur pour les raisons mentionnées dans la pièce no 20.1.

    Le IWA a établi un piquet de grève "sauvage" à 7 heures le 7 août 1986. L'affiche du piquet a été laissée suspendue à un arbre après cette date. Le représentant du prestataire a soutenu que l'employeur avait utilisé cet événement survenu au cours des négociations entre le IWA et la FIR pour modifier de "licenciés" à "touchés par un conflit collectif" le statut de ses employés de Kelsey Bay. Il a soutenu que les conditions météorologiques (indice élevé de danger de feu de forêt) étaient la vraie raison de ne pas avoir repris intégralement les opérations le 11 août 1986. Il n'acceptait pas le contenu de la pièce no 20.3 au regard de sa lettre du 18 novembre 1986 (pièce no 18.1), en ce que sa version de l'entretien téléphonique dont il y est question était exacte et la réponse équivoque.

    Il a résumé sa position relativement à l'appel comme suit:

    a) il n’y avait pas de conflit collectif;

    b) s'il n’y avait pas de conflit collectif, il n’y avait pas de travail pour l'appelant le 11 août 1986 en raison du grand danger de feu de forêt;

    c) s’il y avait un conflit collectif et s'il y avait du travail, le prestataire et tous les appelants n'ont perdu que leur droit de rappel au travail, non pas leur emploi.

    La représentante de la Commission a confirmé de vive voix la position de la Commission présentée dans les pièces no 34 et 74. Elle a soutenu que les éléments de preuve établissaient clairement l’existence d'un conflit collectif entre la FIR, qui représentait les employeurs forestiers, et le IWA, qui représentait les travailleurs du bois syndiqués. L'arrêt de travail du 7 août 1986 a été causé par le piquet de grève du syndicat. La perte d'emploi s'est produite le 11 août 1986, puisque les appelants seraient retournés au travail ce jour-là, mais ils n’avaient pas été rappelés en raison du conflit collectif entre la FIR et le IWA. Ils ont perdu non pas leur droit de rappel mais leur emploi, parce qu’ils auraient travaillé après la fermeture saisonnière, n'eut été le conflit collectif.

    Le prestataire a répliqué que travaillant depuis 10 ans pour la division de Kelsey Bay, il savait par expérience que la date de rappel n’était jamais définitive et que la reprise, lorsqu’elle survenait, se faisait graduellement. En outre, il ne pouvait aller en forêt parce que l'entreprise avait placé des rubans en travers des chemins de bûcheronnage, ce qui signifiait que l'accès était interdit en raison de l'indice élevé de danger de feu de forêt. Il ajoutait qu’il était de retour au travail et qu’en raison de changements apportés à la politique de production, l'employeur tentait de produire autant qu’auparavant avec moins d'employés et n’avait rappelé que seulement environ 75 % de l’effectif qu'avait le chantier avant sa fermeture le 11 juillet 1986 pour réduire la production.

    Le prestataire et sa représentante ont quitté la salle d'audience, après avoir reconnu qu’ils avaient eu toute possibilité de présenter l'affaire du prestataire au conseil.

    CONCLUSION:

    Le conseil reconnaît les points difficiles soulevés par la représentante du prestataire concernant la perte d'emploi par opposition à la perte du droit de rappel au travail. Le conseil estime que cet argument se rapporte à la relation entre employeur et employé. Selon les éléments de preuve, le prestataire aurait travaillé le 11 août 1986, n’eut été le conflit collectif entre la FIR et le IWA qui existait à la division de Kelsey Bay depuis le 7 août 1986. Le conseil note que si les relevés d'emploi contenus dans l'exposé n'indiquent pas de date prévue de rappel, la note de service inter-bureaux du 8 juillet 1986 à TOUS LES EMPLOYÉS précise que "les opérations régulières de production reprendront le lundi 11 août 1986". Le conseil note en outre que l'indice de danger de feu était de 4 le lundi 11 août 1986, ce qui signifie que le travail au chantier aurait été fait tôt en journée. L'indice de danger de feu n’a pas atteint 5 (ce qui signifie une fermeture complète de 4 jours) avant le 18 août 1986 (pièce no 20.7).

    D'après tous les faits portés à sa connaissance, le conseil conclut que le paragraphe 44(1) de la Loi sur l’assurance-chômage a été appliqué comme il fallait. Il n’y a aucun élément qui permette d'échapper à l'inadmissibilité en vertu des paragraphes 44(1) ou (2) avant le 11 décembre 1986 (pièce n. 33), date à laquelle l'arrêt de travail s'est terminé à Kelsey Bay.

    DÉCISION: L'appel du prestataire est rejeté.

    Dans l'affaire Gibson, la décision unanime rendue le 12 août 1987 (pièce n. 39) par le conseil, auquel siégeait une personne qui était membre de celui qui avait entendu l'affaire Morrison, s'énonce comme suit:

    POINT EN LITIGE: conflit collectif

    DISPOSITIONS LÉGALES: articles 44 de la Loi et 49 du Règlement

    INTRODUCTION:

    Le président a présenté les membres du conseil et insisté sur le fait qu'ils n’étaient pas des employés de la Commission. Il a décrit brièvement les fonctions du conseil et assuré à M. Pederson que chaque membre du conseil avait lu l’exposé préparé par Emploi et Immigration Canada.

    Le représentant du prestataire, M. Pederson, a confirmé qu'il avait lu l’exposé et a accordé que la question soumise à l'examen du conseil était telle qu'elle était énoncée au paragraphe 5 de la pièce no 1 de l’exposé.

    Le président a également assuré au représentant du prestataire que la décision du conseil, qui serait rendue à huis clos après l’audience, lui serait communiquée dans quelques jours.

    Le conseil a écouté attentivement les déclarations orales que lui a faites le représentant du prestataire. Le conseil a également examiné avec soin l'exposé écrit.

    EXPOSÉ DES FAITS:

    Le prestataire avait été informé qu’il n’était pas admissible au bénéfice des prestations du 11 août 1986 à la fin de l'arrêt de travail, parce qu'il avait perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif à l'endroit où il exerçait son emploi (pièce 33).

    Pièce 26

    Établit que le prestataire a formulé une demande initiale de prestations qui a pris effet le 18 août 1985 (et a expiré le 17 août 1986).

    Pièce 27

    Révèle que le prestataire a formulé subséquemment une demande renouvelée de prestations qui a pris effet le 13 juillet 1986.

    Pièce 29

    Confirme que le prestataire a formulé une nouvelle demande initiale de prestations qui a pris effet le 17 août 1986.

    Pièces 28.1 et 30

    Révèlent que le prestataire a travaillé comme élingueur pour la division de Kelsey Bay de MacMillan Bloedel Ltd. du 12 mai 1986 au 11 juillet 1986.

    Pièces 20.12 et 14

    Décrivent la nature de l’arrêt de travail comme une "grève/fermeture" qui a commencé à 7 heures le 7 août 1986.

    Pièce 15.9

    Indique que le prestataire figurait sur la liste des employés en date du 11 août 1986.

    Pièces 25.2 et 28.1-.2

    Révèlent que la reprise et le retour étaient prévus pour le 11 août 1986.

    Pièce 21

    Indique que le date réelle de la fin de l'arrêt de travail est le 9 décembre 1986.

    À l’audience, le représentant du syndicat, Sy Pederson, a soutenu que l’employeur, la division de Kelsey Bay de MacMillan Bloedel, n'était pas touché par le conflit collectif et a présenté le bulletin syndical no 4 (pièce 37) à l'appui de ses dires. Il a en outre insisté sur le fait que l'arrêt A-787-81 de la Cour fédérale appuyait de façon valable la position du prestataire. Il a également souligné que le formulaire d'établissement des faits (pièce 14.9(4)) aurait dû faire mention également de l’ "appel téléphonique" fait à l'employé et il a présenté la lettre de S. Katovic (pièce 38) pour corroborer ce point. M. Pederson a soutenu que l’employeur n’avait aucunement l’intention de rappeler les employés au travail le 11 août 1986.

    Le représentant de la Commission a affirmé qu’il ne pouvait être tenu compte que des faits et que, selon la jurisprudence, en raison de ses liens avec le syndicat qui la chapeaute, une section locale est comme ce dernier partie à un conflit collectif, soit, en l'espèce, celui opposant la FIR et le IWA.

    CONCLUSION:

    D'après les éléments de preuve portés à se connaissance, le conseil conclut:

    1) que le prestataire a perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif à l’endroit où il exerçait son emploi le 11 août 1986;

    2) qu’à titre de membre du syndicat qui était partie au conflit, le prestataire était visé au paragraphe 44(1) de la Loi sur l’assurance-chômage et en avait été informé comme il se devait;

    3) que le prestataire n'a pas prouvé qu'il échappait à l'inadmissibilité en vertu de l'alinéa 44(1)b) ou c) ou 44(2)a) et b) pendant la période du 11 août 1986 au 10 décembre 1986.

    DÉCISION:

    L'appel du prestataire est rejeté.

    Dans l'affaire Davison, la décision unanime rendue le 14 août 1987 (pièce 35) par le conseil arbitral, dont le président était le même qu'à l’audition de l'affaire Gibson, s'énonce comme suit:

    POINT EN LITIGE: conflit collectif

    DISPOSITIONS LÉGALES: articles 44 de la Loi et 49 du Règlement

    INTRODUCTION:

    Le prestataire, un membre du IWA, a comparu et a très bien exposé son cas.

    Le président a présenté les membres du conseil et a insisté sur le fait qu'ils n’étaient pas des employés de la Commission. Il a décrit brièvement la fonction du conseil et assuré au prestataire que chaque membre du conseil avait lu l'exposé préparé par Emploi et Immigration Canada.

    Le prestataire a confirmé qu'il avait lu l’exposé et a accordé que la question soumise à l'examen du conseil était telle qu'elle était énoncée au paragraphe 5 de la pièce no 1 de l’exposé.

    Le président a également assuré au prestataire que la décision du conseil, qui serait rendue à huis clos après l'audience, lui serait communiquée dans quelques jours.

    Le conseil a écouté attentivement les déclarations orales que lui a faites le prestataire. Le conseil a examiné avec soin l’exposé écrit.

    EXPOSÉ DES FAITS :

    Le prestataire a été informé qu’il n’était pas admissible au bénéfice des prestations du 11 août 1986 à la fin de l'arrêt de travail parce qu'il avait perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local où il exerçait son emploi (pièce 30).

    Pièce 26

    Établit que le prestataire a formulé une demande initiale de prestations qui a pris effet le 5 janvier 1986.

    Pièce 27

    Indique que le prestataire a formulé une demande renouvelée de prestations qui a pris effet le 3 août 1986.

    Pièce 28

    Révèle que le prestataire a travaillé comme bûcheron pour la division de Kelsey Bay de MacMillan Bloedel du 13 janvier 1986 au 11 juillet 1986, date de début de la fermeture saisonnière.

    Pièces 20.12 et 14

    Décrivent la nature de l'arrêt de travail comme une grève qui a commencé à 7 heures le 7 août 1986.

    Pièces 14.9 et 25.2

    Indiquent une reprise du travail de tous les employés le 11 août 1986.

    Pièce 15.9

    Révèle que le prestataire figurait sur la liste des employés en date du 11 août 1986.

    Pièce 20.1

    Précise que l'employeur avait tout à fait l’intention de reprendre intégralement les opérations le 11 août 1986.

    À l’audience, le prestataire a affirmé que le matin du 11 août 1986, il avait reçu un appel de MacMillan Bloedel, à Kelsey Bay, et qu'on lui avait demandé d'être disponible pour combattre les feux de forêt.

    L'après-midi du même jour, il a formulé une demande de prestations. En septembre, un emploi de conducteur de camion chez Evergreen Packing s’est offert, mais M. Tweedle du bureau de la Main-d'oeuvre de Courtenay n'a pas voulu lui permettre de le prendre parce qu’il croyait que le prestataire et les autres employés de MacMillan Bloedel retourneraient au travail dans quelques jours.

    Le représentant de la Commission a attiré l’attention sur la pièce 20 dans laquelle l’employeur affirme que l'intention était de reprendre toutes les opérations le 11 août 1986.

    Le prestataire a répondu en disant que les dates de rappel étaient toujours sujettes è changement et a donné des exemples récents.

    CONCLUSION :

    D’après les éléments de preuve portés à se connaissance, le conseil conclut :

    1) que le prestataire a perdu son emploi du fait d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif eu lieu où il exerçait son emploi;

    2) qu'à titre de membre du syndicat qui était partie eu conflit, le prestataire était visé au paragraphe 44(1) de la Loi sur l’assurance-chômage et en avait été informé;

    3) que le prestataire n’a pas prouvé qu’il échappait à l’inadmissibilité en vertu de l'alinéa 44(1)b) ou c) ou 44(2)e) et b) pendant le période allant du 11 août 1986 eu 10 décembre 1986.

    DÉCISION:

    L’appel du prestataire est rejeté.

    L’article 44 de la Loi, tel un passage obscur d'un poème ou d'un texte religieux, ne cesse de donner lieu è des interprétations qui n’étaient pas perçues à l'origine: on les retrouve dans les arrêts Abrahams c. Procureur général du Canada, [1983] 1 R.C.S. 2, Procureur général du Canada c. Hurren, (1986) 29 D.L.R. (4th) 252, 69 N.R. 117 (C.A.F.) et Hills c. Procureur général du Canada, [1988] 1 R.C.S. 513, entre autres. L'objet de l’article semble assez clair, même si son libellé a recelé certains mystères. Il a été adopté, évidemment, en vue de garantir que le gouvernement du Canada serait toujours neutre relativement aux conflits collectifs. En effet, le versement de prestations d'assurance-chômage aux employés qui ont recours à une grève contre leur employeur fausserait l'équilibre voulu des négociations collectives qui en sont à un point critique.

    L'arrêt Hills ne s’applique pas même si le représentant des prestataires affirme que l'acte de grève principal - l'établissement d'un piquet de grève le 7 août 1986 - était l'acte "sauvage" non autorisé de personnes inconnues et que, par conséquent, il n'y avait pas de conflit collectif à la division de Kelsey Bay le 11 août. Il affirme que les prestataires n'ont pas été rappelés en raison du danger de feu de forêt.

    Le principe tout à fait justifiable selon lequel les travailleurs ne doivent pas franchir un piquet de grève doit être interprété comme signifiant qu'ils ne doivent pas franchir un piquet légal. Le corollaire est que les travailleurs ne doivent pas se laisser tromper ou induire en erreur par des grévistes "sauvages", car, s’ils se laissaient induire en erreur par de tels grévistes "sauvage" et respectaient un faux piquet, leur employeur pourrait conclure, et il le ferait probablement, que ses opérations font en réalité l’objet d'une grève de ses employés. Tel semble être le cas en l'espèce. Les employés qui travaillaient pendant la période de licenciement général ont respecté le piquet établi par des irresponsables. L'établissement d'un piquet de grève et l’abstention des employés de travailler, comme un lock-out, sont, après tout, les éléments véritables d'un conflit collectif. Il y a lieu de noter les réponses 11, 19, 22 et 27, dans la pièce 20, fournies par le contremaître général de la division le 8 août 1986.

    Les prestataires étaient membres de la section locale 1-363 du IWA. La liste des entreprises représentées dans les négociations par la Forest Industrial Relations Limited - (par syndicat), qui constitue la pièce 4 dans le dossier Morrison, révèle que la division de Kelsey Bay de MacMillan Bloedel Limited était en négociation avec la section locale 1-363 du IWA. Cette relation s'est poursuivie pendant la grève ainsi qu'en témoigne (pièce 13 du dossier Morrison) une entente entre la FIR et les fiduciaires du régime d'assurance-maladie et d’aide sociale pour l'industrie forestière du IWA. Cette entente, qui est datée du 29 juillet 1986, autorise les "employeurs à recouvrer des employés à leur retour au travail après une grève ou un lock-out le montant des primes versées en leur nom".

    Une copie de l'avis adressé par l’employeur à tous les employés de la division de Kelsey Bay, en date du 8 juillet 1986, soit la pièce 25-2 des dossiers Gibson et Davison, par exemple, renferme ce qui suit:

    Ainsi qu’il a été annoncé, la division de Kelsey Bay réduira la production à partir du 14 juillet 1986. Les opérations régulières de production reprendront le lundi 11 août 1986.

    L'avis mentionne en outre que "il y aura des travaux limités à faire, dont ... la réfection du tablier de ponts", pour lesquels "trois personnes sont requises à partir du 28 juillet pendant une semaine et demie à deux semaines". La pièce 75-3 dans le dossier Morrison est une copie d'un tel avis. Selon un formulaire de demande de renseignements rempli par James Gibson ou en son nom (pièce 28 - les deux côtés), son retour au travail était prévu pour le 11 août 1986. Le même renseignement se trouve dans la pièce 26-1 du dossier Morrison.

    Il est manifeste que le prestataire et ses compagnons avaient bien un emploi à perdre le 11 juillet 1986 et cet emploi a été perdu ou ne s'est pas réalisé en raison d'une grève, même s'il s'agissait d'une grève prématurée, lorsqu'un piquet de grève non autorisé mais néanmoins réel a convaincu l'équipe d'entretien et les ouvriers de l'atelier de s'abstenir de travailler le 7 août 1986. La pièce 15 du dossier Morrison renferme une liste des employés qui ont travaillé entre le 11 juillet et le 7 août 1986. La pièce 41-9 est une liste de 22 employés qui ont travaillé les 4 et 5 août 1986 et qu’a fournie l'employeur.

    Le représentant des prestataires soutient (pièce 18 du dossier Morrison) que les employés de Kelsey Bay n'auraient pas pu travailler de toute façon le 11 août "en raison du grand danger de feu de forêt à ce moment-là". Selon les éléments de preuve, l'indice du danger de feu aurait exigé que le travail se fasse plus tôt le 11 août et non que le chantier ferme complètement. Quoi qu'il en soit, il semble s'agir là d'une conjecture. La grève est survenue. Si, per exemple, un contremaître irascible, sans aucune autorisation de la haute direction, avait lock-outé les employés un jour et avait laissé les avis de lock-out affichés le lendemain, les employés permettraient- ils à l’employeur de donner à entendre qu’il s'agissait là d'une grosse erreur et que toutes les personnes intéressées devraient ne pas en tenir compte? La grève "sauvage" a été tout à fait aussi efficace parce que le piquet de grève a été respecté comme l'aurait été un lock-out "sauvage", si la direction n'était pas intervenue rapidement et efficacement. Elle est survenue et l'arrêt de travail lui est imputable. Toute cause subséquente ou secondaire n’est malheureusement pas pertinente. Certes, n'eut été la grève "sauvage" du 7 août 1986, il est manifeste que c’était l'intention et le désir de l'employeur de reprendre intégralement les opérations de production le lundi 11 août 1986, ainsi qu'il est mentionné dans la pièce 20 du dossier Morrison.

    Les observations du syndicat au nom des prestataires et celles faites au nom de la Commission étaient bien articulées et ont été clairement présentées. Toutefois, le juge-arbitre soussigné se permet de faire un commentaire. Les observations et les déclarations orales du syndicat à l'audience seraient plus efficaces si son représentant donnait les références précises des documents sur lesquels il désire attirer l’attention du juge-arbitre et les citait. En l'espèce, il y avait une telle montagne de documents de toutes sortes, dont des coupures de journaux, de la correspondance, des comptes rendus d'entretiens téléphoniques et d'autres documents officiels de la Commission, qu'il fallait beaucoup de temps et d'attention pour trouver et essayer d'appuyer toute affirmation faite par écrit ou de vive voix par le représentant des prestataires. Chaque affirmation devrait être ainsi appuyée par le représentant. Ce facteur, il faut le préciser, n’a pas joué contre les prestataires parce qu'il est supposé que les défaillances de leur représentant n’étaient pas intentionnelles et, même si elles l’étaient (ce qui n'est pas supposé), cela ou tout autre élément non pertinent n'aurait pas été préjudiciable aux prestataires devant le soussigné ou tout autre juge-arbitre. Toutefois, ce commentaire ne concerne que l'efficacité du processus d’arbitrage seulement , non pas le fond.

    Il semble que les conseils arbitraux aient respecté toutes les exigences énoncées à l’article 95 de la Loi en formulant leurs décisions unanimes. Il a été porté à leur connaissance des éléments sur lesquels ils pouvaient raisonnablement fonder leurs décisions. La grève s’est généralisée et ces prestataires seraient directement touchés par les négociations dont dépendait l’issue du conflit collectif. Les conseils arbitraux ont jugé que par suite de l'effet de l’article 44 de la Loi dans les circonstances, aucun prestataire n’était admissible au bénéfice des prestations avant la fin de l'arrêt de travail. Les conseils arbitraux n'ont pas commis d'erreur de droit.

    En conséquence, l'appel du prestataire (ainsi que ceux de ses compagnons qui s'y sont joints) est rejeté et la décision du conseil arbitral est confirmée. Il s'ensuit que les décisions initiales de la Commission d’invoquer l’article 44 sont également confirmées.

    F. C. Muldoon

    Juge-arbitre

    Ottawa, Ontario

    le 7 février 1989

    2011-01-16