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  • CUB 17934

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la Loi de 1971 sur l'assurance-chômage

    - et -

    d'une demande de prestations présentée par
    JULIE LANKOWSKI

    - et -

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Kitchener (Ontario) le 20 octobre 1988

    DÉCISION

    LE JUGE JEROME, JUGE EN CHEF ADJOINT

    Le présent appel a été instruit à Kitchener (Ontario) le 18 août 1989. La prestataire interjette appel de la décision rendue à l'unanimité par un conseil arbitral qui confirmait la conclusion de l'agent de l'assurance selon laquelle la prestataire n'était pas admissible au bénéfice des prestations à partir du 18 juillet 1988 parce qu'elle n'avait pas réussi à prouver qu'elle était disponible pour travailler alors qu'elle suivait un cours de formation à temps plein.

    La prestataire a présenté une demande de prestations qui a pris effet le 19 juin 1988. Elle a travaillé chez Stanley Park Pro Hardware du 17 mars au 14 juin 1988, date à laquelle elle a été mise à pied en raison de la fermeture du magasin. La prestataire a également fourni un relevé d'emploi de Kent Drugs, où elle a travaillé du 14 septembre au 13 novembre 1987.

    Le 16 juillet 1988, la prestataire a indiqué à la Commission qu'elle suivait un cours de traitement de texte et de secrétariat au Anderkoch Institute. Les cours avaient lieu du lundi au vendredi, de 9 h à 14 h 30. La prestataire a indiqué qu'elle cherchait un travail à temps partiel pendant qu'elle suivait ce cours, mais que l'horaire ne pouvait être modifié et qu'elle n'était pas prête à abandonner son cours. Lors d'une entrevue téléphonique avec la Commission, la prestataire a expliqué que même si elle avait travaillé de 9 h à 17 h 30 au Hardware Store, pendant ses études secondaires, elle travaillait à temps partiel. D'après les informations relatives au marché du travail fournies à la Commission, au cours des trois mois précédents, 15 postes de caissier ou de caissière à temps partiel étaient devenus vacants, la plupart en soirée ainsi que le samedi.

    La Commission a exclu la prestataire du bénéfice des prestations à partir du 18 juillet 1988 parce que cette dernière n'avait pas réussi à prouver sa disponibilité en raison du cours de formation à temps plein qu'elle suivait de sa propre initiative.

    La prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant un conseil arbitral au motif qu'elle avait déjà travaillé l'après-midi et le soir, que son cours lui permettait de continuer à travailler selon cet horaire et qu'elle avait déjà concilié travail et études. La Commission a clarifié ces déclarations, établissant que la prestataire avait travaillé selon un horaire différent du « 9 à 5 » en 1985 et en 1986, et qu'elle avait travaillé l'après-midi et le soir en 1987 chez Kent Drugs.

    Le conseil arbitral a jugé que la prestataire avait pris l'habitude de travailler à temps plein quand elle travaillait chez Stanley Park Pro Hardware et que cette période d'emploi faisait partie de sa période de référence. Par conséquent, le conseil a conclu que l'agent de l'assurance avait rendu une décision juste, et il a rejeté l'appel de la prestataire.

    La prestataire interjette maintenant appel de la décision rendue par le conseil arbitral en vertu des alinéas 95b) et c) de la Loi sur l'assurance-chômage. Elle présente une longue déclaration écrite établissant les points suivants :

    1. La prestataire a fourni des renseignements détaillés concernant ses antécédents en matière d'emploi, indiquant qu'elle a travaillé l'après-midi et le soir de 1983 à 1986 pendant ses études, et ce, dans le cadre de différents emplois.
    1. À partir de septembre 1987, la prestataire a travaillé de midi à 21 h ainsi que la fin de semaine chez Kent Drugs.
    1. Pendant les deux premières semaines et demie de son emploi chez Stanley Park Hardware, la prestataire a travaillé de 17 h 30 à 21 h. Donc, dit-elle, elle n'a pas travaillé à temps plein à partir de mars 1988, contrairement à ce que le conseil a conclu.
    1. L'emploi que la prestataire a occupé chez Kent Drugs, d'une durée similaire à celui qu'elle a occupé à la quincaillerie, faisait également partie de sa période de référence, et ne correspondait pas à un horaire de « 9 à 5 ».

    De plus, la prestataire déclare avoir fourni au conseil des renseignements concernant ses emplois antérieurs alors qu'elle était aux études et indique qu'il est établi dans la jurisprudence, notamment dans la décision CUB 13789, qu'une telle situation constitue une exception à la règle générale selon laquelle les étudiants ne sont pas disponibles pour travailler. Elle soutient que, selon la décision CUB 13171, le conseil doit tenir compte de tous les antécédents de travail d'un prestataire et non exclusivement de son dernier emploi. Enfin, en citant la décision CUB 14434, la prestataire affirme que le conseil arbitral a commis une erreur de droit en ne lui accordant pas une période raisonnable pour qu'elle puisse se trouver un emploi qui corresponde aux habitudes de travail qu'elle avait déjà établies.

    Les dispositions législatives pertinentes se rapportant à l'affaire qui nous intéresse figurent à l'alinéa 25a), à l'article 36 et au paragraphe 39(1) de la Loi de 1971 sur l'assurance-chômage :

    25 Un prestataire n'est admissible au service des prestations pour aucun jour ouvrable d'une période initiale de prestations pour lequel il ne peut prouver qu'il était

    a) soit capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d'obtenir un emploi convenable ce jour-là [...]

    30 Nonobstant l'alinéa 25b) et les articles 30, 32, 32.1 et 32.2, un prestataire n'est pas admissible au service des prestations complémentaires pour tout jour ouvrable pour lequel il ne prouve pas qu'il était capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d'obtenir un emploi convenable.

    39(1) Aux fins de la présente Partie, un prestataire est en chômage, capable de travailler et disponible à cette fin durant toute période où il suit des cours d'instruction ou de formation (ou tout autre cours visant à faciliter le retour sur le marché du travail du prestataire) sur les instances de l'autorité que peut désigner la Commission.

    Dans la jurisprudence, des juges-arbitres ont statué qu'il est possible, dans de rares cas, de réfuter la présomption de non-disponibilité en ce qui concerne un étudiant suivant un cours qui ne lui a pas été recommandé lorsqu'il peut démontrer qu'il a déjà travaillé en dehors de ses heures de cours. Dans la décision CUB 10435 (Raven), le juge Walsh énonce les conditions à respecter pour qu'un étudiant puisse démontrer sa disponibilité :

    « Il est vrai que de nombreux étudiants travaillent à temps partiel tout en suivant des cours afin de pouvoir payer leurs études. Toutefois, la jurisprudence sur ce point a permis d'établir clairement qu'un étudiant qui suit des cours à plein temps peut très rarement satisfaire à la condition de disponibilité pour le travail qui est stipulée dans la Loi sur l'assurance-chômage. Il est arrivé qu'un étudiant ait réussi, par exemple, à trouver un emploi régulier qui l'occupait en fin de journée, en soirée ou à tout autre moment qui ne coïncidait pas avec ses heures de cours et soit parvenu à trouver suffisamment de temps pour étudier et faire ses travaux scolaires. Toutefois, de tels cas sont très rares et il faut alors établir que l'étudiant avait pris antérieurement de tels arrangements de travail afin de pouvoir réfuter la présomption de non-disponibilité résultant de la fréquentation à plein temps d'un établissement d'enseignement. »

    Ces conditions sont reprises dans la décision CUB 14434 (Mackie), dans laquelle je m'exprimais ainsi :

    « Même si les circonstances permettant de réfuter cette présomption sont exceptionnelles, le conseil arbitral a l'obligation de déterminer si elles existent pour chacun des cas. » [Traduction]

    De plus, dans la décision CUB 13789 (Branton), j'écris ceci :

    « Les causes portant sur la disponibilité des étudiants pour travailler ne sont pas faciles à trancher. Le seul fait qu'un prestataire entreprenne des études ne le rend pas automatiquement non admissible à des prestations. Naturellement, on présume que les exigences des études à temps plein ne permettent pas à un étudiant d'occuper un emploi à temps plein. Par conséquent, le prestataire doit prouver de façon convaincante à la Commission et, par la suite, au conseil arbitral qu'il est encore disponible pour travailler. Au départ, le prestataire doit démontrer qu'il a l'habitude de travailler tout en étant aux études. Ensuite, pour faire droit à la requête, le conseil doit constater que le prestataire a effectivement concilié travail et études, et que son intention de continuer dans cette voie est réaliste compte tenu de son engagement à l'égard de ses études et de sa disponibilité pour un emploi convenable. Enfin, si ces conditions sont réunies, le conseil doit être convaincu que le prestataire n'a pas manqué aux autres exigences concernant la disponibilité, notamment la recherche d'emploi sérieuse. Si toutes ces questions sont tranchées en faveur du prestataire, le juge-arbitre devrait lui accorder un délai raisonnable pour qu'il puisse trouver un emploi tout en poursuivant ses études. » [Traduction]

    En l'espèce, je suis d'avis qu'il s'agit, dans la présente affaire, de l'un des rares cas où la prestataire est admissible au bénéfice des prestations pendant qu'elle suit un cours de formation. Elle a réfuté la présomption qu'elle n'était pas disponible pour travailler en démontrant clairement qu'elle avait déjà travaillé en dehors de ses heures de cours. Elle avait l'intention de continuer de travailler comme elle en avait l'habitude, tout en étant déterminée à suivre son cours, qui n'occupait son temps que jusqu'à 14 h 30 chaque jour, ce qui démontre sa disponibilité pour occuper un emploi convenable. Les informations de la Commission relativement au marché du travail indiquent qu'un nombre suffisant de postes de caissier ou de caissière à temps partiel étaient vacants, de sorte qu'il était raisonnable pour la prestataire de penser qu'elle puisse trouver un emploi de cette nature.

    Le conseil arbitral a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée selon laquelle la prestataire n'avait connu que le travail à temps plein. C'est pourquoi la décision qu'il a rendue n'était pas appropriée compte tenu des faits se rapportant à l'affaire qui nous intéresse. En conséquence, j'accueille l'appel.

    James A. Jerome

    JUGE-ARBITRE EN CHEF

    OTTAWA
    Le 3 avril 1990

    2011-01-16