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  • CUB 21694

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    - et -

    d'une demande de prestations présentée par
    Shirley JOHNSON

    - et -

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la Commission
    à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
    KAMLOOPS (Colombie-Britannique) le 11 avril 1991

    DÉCISION

    LA JUGE REED

    La Commission interjette appel d'une décision rendue par le conseil arbitral qui a conclu que la prestataire était justifiée de quitter son emploi chez Thrupp Manor Association.

    La décision du conseil arbitral est un peu confuse :

    [...]
    Le conseil a déterminé que la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Tanguay (A-1458-84), citée par la Commission à la pièce no 10-2, établissait les critères généraux de ce qui constitue un motif valable. On y lit notamment ceci « ... Il n'est justifié d'avoir agi ainsi que s'il existait, au moment où il a quitté, des circonstances qui l'excusent d'avoir ainsi pris le risque de faire supporter à d'autres le fardeau de son chômage. »
    Le conseil a déterminé, en l'espèce, qu'il existait effectivement de telles circonstances. La prestataire a quitté son emploi pour en occuper un autre dont les avantages étaient nettement meilleurs, et il est peu probable qu'elle représente un tel « fardeau ». Son ancien employeur a appuyé sa démarche en affirmant qu'elle était à l'avantage de la prestataire.
    L'appel est accueilli.

    L'explication que la prestataire m'a fournie de vive voix et qui, selon elle, est fidèle à ce qui a été dit devant le conseil arbitral replace cette décision dans son contexte. Elle a quitté l'emploi qu'elle occupait depuis huit ans et demi parce qu'on lui offrait un emploi à un taux de rémunération horaire nettement plus élevé (12,60 $ de l'heure au lieu des 7,52 $) assorti d'avantages auxquels elle n'avait pas droit auparavant, notamment les soins dentaires et les soins de santé. Le nouvel emploi qu'elle a accepté était un travail sur appel pour Overlander Extended Care. Au moment où elle se demandait si elle devait accepter l'emploi ou non, on lui a laissé entendre que le fait d'être « sur appel » n'aurait pas beaucoup d'incidence sur le nombre d'heures de travail, parce qu'elle serait appelée à travailler « plusieurs heures ». Cet emploi sur appel lui donnait également la possibilité d'accéder à un poste permanent chez Overlander lorsqu'il s'en présenterait.

    Peu après qu'elle ait accepté le nouvel emploi, le budget d'Overlander Extended Care a subi des coupures et son poste a été radicalement modifié. Elle n'a pas obtenu le nombre d'heures qu'on lui avait promis et ses possibilités d'occuper un poste permanent ont été réduites.

    La Commission allègue qu'il ne faut pas s'attendre à ce que l'assurance-chômage assume les frais du passage d'un emploi permanent à une situation précaire (sur appel) lorsque le but de la prestataire est de toucher un meilleur salaire à la longue. Autrement dit, la Commission prétend que, dans les circonstances, la prestataire n'était pas justifiée de prendre le risque d'imposer à d'autres le fardeau de son chômage.

    Comme l'a affirmé le conseil arbitral, les critères pour déterminer s'il y a justification sont énoncés dans l'arrêt Tanguay c. la Commission d'assurance-chômage (1985), (C.A.F.). Voici ce qu'on peut lire aussi dans cet arrêt :

    Parfois, l'employé aura pu légitimement croire, au moment où il quittait son emploi, qu'il ne serait pas en chômage : cela suffira à justifier sa conduite.

    (souligné par mes soins)

    Voir également les arrêts CUB 14702A - Stellings et CUB 18965 - Richardson.

    En l'espèce, la prestataire ne prévoyait pas qu'elle aurait à demander des prestations d'assurance-chômage lorsqu'elle a quitté son emploi. Elle a accepté un emploi occasionnel en s'attendant raisonnablement à travailler plusieurs heures par semaine et à pouvoir obtenir un poste permanent à brève échéance. Dans les circonstances, elle a prouvé qu'elle était justifiée de quitter son emploi chez Thrupp Manor Association.

    L'appel est donc rejeté.

    B. Reed

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA (Ontario)
    le 26 juin 1992.

    2011-01-16