TRADUCTION
EN VERTU DE la Loi sur l'assurance-chômage
- et -
RELATIVEMENT À une demande de prestations par
Dale LINDMARK
- et -
RELATIVEMENT À un appel interjeté auprès d'un juge-arbitre par
le prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral
rendue à Jasper (Alberta), le 17 décembre 1992.
DÉCISION
WALSH, J.
Il est demandé au juge-arbitre de rendre une décision sur le dossier en l'espèce. La question à trancher est celle de savoir si l'appelant a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite, ce qui a donné lieu à son exclusion du bénéfice des prestations pour 12 semaines à partir du 9 août 1992 ainsi qu'à une réduction du taux de ses prestations. Selon la version de l'employeur, l'appelant a été renvoyé le 30 juin 1992 en raison d'actes criminels commis au travail, dont il n'avait pas encore été inculpé au moment de l'exclusion. La version de l'appelant était qu'on avait mis fin à son emploi parce que quelque chose n'allait pas par suite de la vérification effectuée par United Grain Growers, mais il n'était pas certain de la raison de son renvoi.
L'employeur avait aussi déposé une déclaration contre l'appelant en Alberta.
Dans la lettre de plainte qu'il a adressée à la Commission, l'appelant insiste principalement sur le retard de la délivrance de son relevé d'emploi par son employeur, la retenue de sa paye de vacances et la saisie de certains de ses comptes bancaires. Rien de tout cela n'a vraiment quelque chose à voir avec sa demande de prestations d'assurance-chômage. Il nie cependant être coupable d'un méfait quelconque. Il affirme qu'aucune accusation n'a été portée contre lui.
Il a déposé une demande reconventionnelle dans une poursuite civile engagée contre lui par son employeur, United Grain Growers, pour qui il a travaillé pendant 27 ans. La poursuite civile vise d'importantes sommes.
L'appel interjeté devant le juge-arbitre est fondé sur la justice naturelle, bien que les trois motifs d'appel soient invoqués. Il faut dire que la décision du conseil arbitral est fort insatisfaisante. Elle se reporte à l'exposé positif de l'appelant selon lequel il n'a rien fait de malhonnête et l'entreprise n'avait pas de raison de mettre fin à son emploi, et à de nouveaux renseignements qui ne font qu'attirer l'attention sur certains paragraphes de sa demande reconventionnelle dans la poursuite civile. Le conseil arbitral affirme ensuite qu'il est convaincu, d'après la pièce 16, que l'entreprise a agi de bonne foi et pour des motifs raisonnables en le congédiant pour inconduite. La pièce 16 est la déclaration sous-tendant la poursuite civile. Il ne se trouve au dossier aucun élément de preuve de sa culpabilité ou de son innocence et on ne peut certainement tirer des conclusions des allégations que renferment la déclaration et la demande reconventionnelle. La décision du conseil arbitral fait vraiment une entorse à la justice naturelle et est entachée d'une erreur de droit. Il faut accueillir l'appel qu'en fait le prestataire.
On peut comprendre la difficulté qu'a eue l'agent de la Commission qui a prononcé l'exclusion, laquelle peut éventuellement s'avérer bien méritée, mais on ne peut dire que ce dernier disposait d'assez de renseignements pour la justifier. Il est affirmé dans la pièce 7 que l'employeur ne divulguera aucun renseignement avant que des accusations soient portées et une action en justice intentée. Il se peut bien que l'issue de la poursuite civile et de la poursuite criminelle, si elles sont engagées, fournisse une justification de l'exclusion, mais, pour le moment, à la lumière des renseignements disponibles, il serait contraire à la justice naturelle de l'imposer. Bien que la décision touchant la demande de prestations d'assurance-chômage dépende de la prépondérance des probabilités et non d'une preuve hors de tout doute raisonnable comme dans une affaire criminelle, les seuls éléments de preuve, en l'espèce, sont les allégations de l'employeur. L'exclusion ne peut tenir.
A.M. Walsh
JUGE-ARBITRE
OTTAWA (Ontario)
le 4 août 1993