TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE
- et -
d'une demande de prestations présentée par
MICHELLE SECOURS
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par
la prestataire, d'une décision du conseil arbitral
rendue le 11 février 1993 à Kitchener (Ontario).
DÉCISION DE LA COUR D'APPEL FÉDÉRALE CORRESPONDANTE : A-352-94
DÉCISION
L'Honorable Marin, JUGE-ARBITRE :
J'ai entendu le présent appel à Kitchener (Ontario), le 24 mars 1994.
La prestataire a travaillé pour une courte période de temps dans un marché d'alimentation et a été renvoyée sans préavis pour avoir modifié manuellement une carte d'heures de travail plutôt que d'avoir traité la carte selon les politiques mises de l'avant par la société.
La prestataire travaillait pour cette société depuis environ deux ans. Devant le conseil, elle a affirmé qu'elle ne savait pas que la politique interne interdisait la modification manuelle des cartes. La prestataire avait déjà auparavant parafé une carte et avait été avisée que cette façon de faire ne correspondait pas à la procédure recommandée. Des allégations ont été faites que, en modifiant sa carte pour une seconde fois, elle tentait de frauder la société. Le fait demeure que c'est la prestataire elle-même qui a porté ce fait à l'attention de l'employeur. Le conseil arbitral en est arrivé à la conclusion que la prestataire devait être exclue du bénéfice des prestations parce qu'elle ne s'était pas conformée aux politiques de la société et, ce faisant, elle s'était rendue coupable d'inconduite.
J'estime que le conseil arbitral, en prenant sa décision, n'a pas appliqué la bonne jurisprudence. À mon avis, bien que les conclusions de fait du conseil puissent être exactes, il a commis une erreur en appliquant le mauvais critère juridique. Je n'ai pas affaire à un cas de fraude et, en l'espèce, aucune allégation de fraude n'a été faite. Bien que la possibilité de fraude ait été vaguement suggérée, le conseil arbitral ne laisse aucunement entendre qu'il y a eu fraude dans le cas qui nous occupe. J'estime que l'employeur avait plusieurs options, par exemple une suspension, des mesures disciplinaires ou un avertissement, plutôt que de prendre la mesure ultime en renvoyant la prestataire.
Dans Procureur général du Canada c. Tucker (A-381-85), à la page 4, le juge MacGuigan établit clairement :
...pour constituer de l'inconduite, l'acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d'une telle insouciance ou négligence que l'on pourrait dire que l'employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement au travail.
En appliquant le critère de juge MacGuigan aux faits devant moi, je dois conclure qu'il n'y avait, de la part de la prestataire, aucune mauvaise intention. Il est vrai qu'elle ne s'est pas conformée à la politique, mais si l'on considère l'ensemble du dossier et des éléments de preuves produits devant le conseil arbitral, il ne semble pas évident que la politique en question ait été facilement utilisable, affichée et connue des employés.
Compte tenu des circonstances, l'appel doit être accueilli et la décision du conseil arbitral annulée. La décision de l'agent d'assurance sera également annulée et la prestataire aura droit aux prestations qu'elle réclame.
R.J. Marin
JUGE-ARBITRE
OTTAWA (Ontario)
le 3 mai 1994