DÉCISION DE LA COUR D'APPEL FÉDÉRALE CORRESPONDANTE : A-510-96
EN VERTU de la LOI SUR L’ASSURANCE-CHÔMAGE
- et -
Dame Claire BRISEBOIS, de Vaucluse, Qué
Appelante
C.
LA COMMISSION DE L'EMPLOI ET DE L'IMMIGRATION
Intimée
DÉCISION
L'hon. NOËL BARBÈS C. R.
Cet appel de la décision unanime qu'avait prononcée le Conseil arbitral, le 27 avril 1994, me fut présenté à Joliette, le 12 février 1996.
L'appelante fut cuisinière de métier. Elle obtint, pour motif valable, des prestations après le 31 janvier 1993. Et elle obtint un emploi au Restaurant Les Prés, de Montréal, jusqu'au 9 mai quand elle a quitté volontairement son emploi.
La question essentielle sera de voir si dans son cas, il y eut justification au sens légal, de renoncer à son travail, mais de continuer à prétendre avoir droit aux bénéfices d'assurance-chômage.
Quand la commission de l'emploi connut le fait que la prestataire avait quitté volontairement l'emploi sous prétexte qu'elle avait mal aux pieds à raison d'un travail prolongé en position debout, elle prononça exclusion de tout bénéfice d'assurance depuis le 10 mai 1993. L'appelante avait alors obtenu une somme totale de $9,724.00
En appel devant un conseil arbitral, on a convenu du fait que les sommes perçues en bénéfices avant le 9 mai 1993, devaient être corrigées dans le sens suggéré par un agent de la Commission.
Et le Conseil arbitral n'a pas admis, le 27 avril 1994, que l'assurée aurait quitté son emploi au Restaurant Les Prés, en mai 1993, pour motif acceptable, qui serait une des raisons admises en l'article 28.(4) de la Loi, ou à tout événement une raison grave qui ferait décider raisonnablement qu'il n'est pas possible de continuer à travailler.
Dame Brisebois avait exposé à un enquêteur le 27 octobre 1993, qu'elle avait décidé de quitter son emploi de cuisinières où elle devait travailler debout parce qu'elle avait mal aux pieds.
Elle n'a pas cru devoir consulter un médecin et se faire traiter comme il se doit; elle n'a pas demandé un congé, ni non plus tenté d'obtenir un autre emploi moins fatiguant pour elle. Elle n'a pas cherché à ce sujet, ni avant départ, ni après. Elle aurait par contre voulu travailler dans un centre d'accueil pour personnes âgées, où les conditions de la tâche seraient moins onéreuses.
Le Conseil a constaté que la prestataire n'a pas invoqué de maladie qui l'aurait forcée de renoncer à son travail habituel de cuisinière dans un restaurant, où elle ne serait pas soumise à trop de fatigues. Et voilà pourquoi la décision première d'un agent de la Commission fut maintenue.
L'appelante fit inscription en appel de la décision défavorable, et prétendit que les arbitres auraient refusé d'exercer leur compétence. Elle invoquait erreur de droit, en ce qu'on aurait exigé preuve médicale d'un motif sérieux de ne plus travailler debout, pendant de longues heures à chaque jour, tandis que la Loi ne requiert pas une telle démonstration.
Elle prétend aussi que la décision serait déraisonnable en regard des preuves présentées.
L'appelante avait eu sans doute le fardeau de démontrer avoir été justifiée, en mai 1993, de quitter son emploi.
Et l'article 28.(3) de la Loi dit qu'il s'agit bien du dernier emploi exercé avait de formuler demande de prestations, «sauf prescription contraire des règlements». Et il appert qu'on ajouta en avril 1993 la précision suivante par l'article 59.1(1) au Règlement:
Sous réserve du paragraphe (2) (de 59.) pour l'application de l'article 28 de la Loi, emploi s'entend du dernier emploi que le prestataire a perdu en raison de sa propre inconduite, ou qu'il a quitté volontairement depuis le début de sa période de référence.
(2) Pour l'application de l'article 28 de la Loi, lorsque la durée du dernier emploi que le prestataire a exercé avant de présenter sa 'demande de prestations est de moins de cinq (5) jours, «emploi» s'entend également de l'avant-dernier emploi qu'il a exercé.
On peut lire à ce sujet CUB 24697 re Dennis RANDALL.
Donc, le dernier emploi est bien ici celui que détenait l'appelante au début de mai 1993.
Au sujet d'une preuve médicale d'une santé physique qui empêcherait de travailler en situation pénible, la Loi n'oblige pas formellement qu'une preuve de juste cause de départ soit présentée au strict moyen de preuve médicale, Elle exige que la preuve de conditions de travail pénibles ou dangereuses pour la santé, soit convaincante, Et à ce sujet, l'appelante n'a pas vraiment démontré avoir été obligée de quitter à cause d'un mal aux pieds qui aurait empêché de travailler habituellement debout.
Elle ne vit pas de médecin pour faire soigner ses pieds endoloris; elle a dit qu'elle se croyait capable de faire un travail de cuisinière en un autre endroit; elle ne fit à ce sujet aucune recherche avant de quitter l'endroit où elle travaillait depuis quelques mois. Enfin, elle n'a pas décidé de solliciter un congé temporaire pour se reposer.
Il convient encore de dire que si une personne veut avoir les prestations de chômage, elle doit justifier par des motifs très sérieux l'abandon d'un emploi. Et dans le cas de Dame Brisebois, la peine qu'elle éprouvait de travailler longtemps debout devait être assez grave, pour l'inciter d'avoir recours à des soins professionnels.
Enfin, celui qui prétend souffrir de maladie, et, affirmé être incapable de travailler, pourrait en vertu des articles 14 de la Loi et 47 du Règlement, réclamer des prestations de maladie, moyennant preuve:
47.(l) Le prestataire qui, conformément à l'alinéa 14b) de la Loi, allègue qu'il est incapable de travailler par suite d'une maladie, d'une blessure ou d'une mise en quarantaine doit fournir à ses frais à la Commission un certificat établi par un médecin ou un autre professionnel de la santé qui contient les renseignements concernant la nature et la durée probable de la maladie, de la blessure ou de la quarantaine et toute autre circonstance s'y rapportant, qui prouvent l'incapacité du prestataire de travailler.
Cet article est repris pour signaler l'importance de la preuve requise de quiconque réclame les bénéfices de la Loi sur l'assurance-chômage, ou de celui qui aurait des motifs sérieux de quitter un emploi.
L'appelante n'a pas été ici victime d'une erreur de droit de la part du Conseil arbitral; celui-ci n'a pas prétendu que la Loi oblige l'assuré de faire une preuve par médecin du mal sérieux dont il souffre. il a seulement dit qu'un certificat médical confirmant le fait d'une difficulté sérieuse, et non un prétexte, aurait été désirable.
Dame Brisebois n'a pas cru devoir présenter preuve convainquante d'une situation qui l'aurait vraiment obligée de quitter son emploi subitement. Et dans son cas, le départ n'était pas la seule solution raisonnable. Ce qui peut être reproché à cette prestataire dont le cas est sympathique, c'est d'avoir omis d'employer les moyens raisonnables pour améliorer sa situation avant de quitter définitivement.
Et je suis convaincu que la preuve, en ce cas justifiait le Conseil arbitral de décider comme il fit. Il n'y a pas eu d'erreur dans l'appréciation des éléments de preuve offerts avant ou pendant l'audience de la cause.
EN CONSÉQUENCE, l'appel est déclaré non fondé en faits et en droit.
NOËL BARBÈS
Hon. Noël Barbès, c.r.
Juge-arbitre
AMOS, 28 mars 1996.
2011-01-16