CUB 36023
TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE
- et -
d'une demande de prestations présentée
par Sawarnjit Sidhu
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par
le prestataire à l'encontre d'une décision du conseil arbitral
rendue à New Westminster (Colombie-Britannique) le 23 mars 1995
D É C I S I O N
LE JUGE WALSH
Cet appel a été soumis au juge-arbitre pour une décision à partir des renseignements fournis. Le prestataire a comparu devant le conseil arbitral accompagné d'un interprète.
L'appel portait sur la question de la disponibilité prévue à l'alinéa 14a) et au paragraphe 40(1) de la Loi.
Le prestataire a présenté une demande de prestations le 4 septembre 1994. Il avait été empaqueteur de bardeaux pour Langley Wood Pro Co-op du 18 avril au 2 septembre 1994 alors qu'il a été mis à pied à cause d'un manque de travail. Il a de nouveau travaillé du 12 septembre 1994 au 21 novembre 1994 pour Fort Langley Cedar Products. Il suivait un cours financé par le gouvernement fédéral sur l'intégration linguistique à l'intention des nouveaux arrivants. Il s'agissait d'un cours à plein temps, de 9 h 30 à 15 h 30, qui a débuté le 13 juin 1994, complétant 88 heures d'un cours de 600 heures. Selon une déclaration écrite faite le 7 octobre 1994, il devait commencer à temps partiel, le lundi, le mercredi et le vendredi de 9 h à midi, ce qui a continué jusqu'en janvier 1995. Il ne s'agissait pas d'un cours entrepris à la demande de la Commission. La déclaration indique que l'école permet aux étudiants de changer les heures de cours, dans la mesure du possible. Il déclare que son intention était d'obtenir du travail à plein temps tout en suivant le cours et qu'en date de la déclaration, il occupait un emploi chez Fort Langley Cedar Products. Il précise que du 23 juillet 1994 à la date de la déclaration, il avait travaillé 40 heures par semaine comme empaqueteur de bardeaux et avait suivi le cours pendant 25 heures. L'enseignant du centre dit de lui qu'il s'agit d'un bon travailleur.
Dans une demande de prestations faite le 24 novembre 1994, il indique que malgré ses recherches intenses, il n'a pas réussi à trouver un emploi. Il est prêt à travailler comme manoeuvre n'importe où dans les basses terres du Fraser de la C.-B. et serait disposé à travailler dans une pépinière à 10 $ l'heure. Malheureusement, il nie, dans sa demande, avoir suivi un cours.
Le 1er février 1995, il fournit des détails à propos de ses recherches d'emploi depuis le 23 novembre jusqu'en décembre et janvier. Dans une autre pièce à l'appui, il donne des précisions sur ses recherches jusqu'en février.
Il a été déclaré inadmissible à compter du 21 novembre 1994 dans une décision du 2 février 1995.
L'information sur le marché du travail indique que les employés de pépinières font en moyenne 8 $ à 9 $ l'heure, le quart de travail de jour étant de 8 h à 16 h 30.
Le conseil explique que le prestataire suivait le cours d'anglais depuis le 6 mai 1994 et l'a abandonné le 20 février 1995, date à laquelle il est retourné au travail pour l'employeur sur le quart de nuit. Le conseil mentionne également qu'il cherchait du travail dans une pépinière mais à un salaire plus élevé que la moyenne. Le conseil a examiné un ancien cas, la décision CUB 9524.
L'appelant écrit une lettre très claire et détaillée pour appuyer son appel. Il précise qu'il a commencé son cours le 13 juin 1994 et qu'à compter de cette date jusqu'au 2 septembre 1994, il a également travaillé à plein temps chez Fort Langley Cedar Products. (Puisqu'il travaillait pour Langley Cedar Products jusqu'au 2 septembre, il a pu démontrer pour une partie de la période du cours qu'il pouvait, en même temps, suivre le cours et travailler.)
Il a commencé à chercher du travail dès qu'il a été mis à pied. Il aurait abandonné le cours, qui se donnait maintenant trois jours par semaine, s'il avait pu trouver un emploi. En fin de compte, il a repris son emploi le 12 septembre, ce qui veut dire que cette demande de prestations ne constitue plus un problème. Étant donné ses recherches d'emploi après sa deuxième mise à pied en novembre, il soutient que trouver un emploi à plein temps était son objectif premier et que le cours pour améliorer son anglais (qui semble maintenant excellent) était un objectif secondaire. Je pense qu'il y a lieu de le croire. Il explique qu'il a donné une réponse négative à la question de savoir s'il suivait un cours parce que le cours n'était pas commandité et, qu'à son avis, cela n'influait pas sur sa disponibilité puisqu'il pouvait abandonner le cours à n'importe quel moment. C'est toutefois à cause du cours qu'il a été déclaré inadmissible. Il explique que sa réponse (pièce à l'appui 3-1) selon laquelle son intention était de trouver du travail à plein temps tout en suivant le cours était une erreur et qu'il avait mis une coche dans la mauvaise case alors qu'en réalité il voulait mettre sa coche dans la case au-dessus, son intention primaire – et cela a toujours été ainsi – étant d'obtenir un emploi à plein temps plutôt que de suivre le cours. De plus, cela était en rapport avec sa première demande de prestations qui n'est plus en litige.
En ce qui concerne le montant de 10 $ l'heure demandé pour travailler dans une pépinière, il a répondu sans connaissances préalables puisqu'il n'avait jamais fait ce genre de travail. Cependant, cette réponse a été invoquée contre lui par la Commission et le conseil arbitral.
La règle générale est que si les heures de cours d'un étudiant influent sur sa disponibilité pour un emploi à plein temps, il est déclaré inadmissible aux prestations à moins qu'il puisse démontrer qu'il a, auparavant, occupé un poste à plein temps et suivi des cours en même temps. De prime abord, il semblerait, dans le cas présent, que le fait de suivre des cours trois fois par semaine dans la matinée justifie une déclaration d'inadmissibilité. Cependant, même s'il semble y avoir une certaine confusion quant aux dates, il a été signalé (plus haut) que de juin au 4 septembre 1994, il a été en mesure de travailler à plein temps et suivre un cours (soit à plein temps, soit trois jours par semaine) et qu'encore, du 12 septembre au 21 novembre 1994, il travaillait à plein temps et suivait des cours. Il semble avoir suffisamment démontré un modèle d'activité pour que son cas relève de l'exception.
De plus, il est évident que c'était un genre de cours très souple quant aux heures de cours et qu'aucune date n'avait été fixée pour son achèvement. On ne peut pas considérer ce cours comme étant semblable à un cours artisanal ou universitaire. Il est certainement différent d'un cours imposé qu'il aurait été obligé de suivre. Il s'agit plutôt d'un cours de formation personnelle qu'il a suivi de son propre chef. Il ne fait aucun doute que le cours était pour lui d'importance secondaire par rapport à sa recherche d'un emploi à plein temps.
Il y a un certain appui dans la jurisprudence selon lequel il faut regarder l'intérêt véritable de l'étudiant. Il ne suffit pas, bien sûr, que l'étudiant dise qu'il abandonnera le cours s'il trouve un emploi à plein temps. Cela ne s'applique pas au cas présent comme le confirment les recherches d'emplois. (Voir par exemple, Moore, CUB 10415, une décision du juge Reed, Mosher, CUB 19821 (juge Mackay), Fountain, CUB 9793 (juge Reed), Faye, CUB 11075 (juge Strayer), Edwards, CUB 18559 (juge en chef adjoint Jerome) et Riess, CUB 18492 (juge Rouleau).
Il y a aussi une jurisprudence selon laquelle un délai raisonnable devrait être accordé pour trouver un emploi : CUB 11679A, juge Deneault, CUB 12697, Doiron (juge Rouleau).
Pour terminer, je conclus que, à la lumière des faits inhabituels du cas présent, le conseil arbitral n'a prêté une attention suffisante ni à la documentation déposée par le prestataire ayant rapport au fait que celui-ci travaillait et suivait un cours en même temps, ni au genre inhabituel de cours, ni à l'intention véritable de l'appelant d'abandonner ce cours, ou du moins de l'achever plus tard, s'il trouvait un emploi à plein temps qu'il cherchait sincèrement. La décision du conseil arbitral est donc absurde au niveau des faits et mal fondée en droit à la lumière de l'importante jurisprudence. La soi-disant restriction sur le salaire qu'il chercherait a obtenir dans un genre d'emploi dans une pépinière n'est pas importante.
Par conséquent, l'appel est accueilli.
Walsh
juge-arbitre
Ottawa (Ontario)
Le 1er octobre 1996