EN VERTU de la LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE
- et -
RELATIVEMENT à une demande de prestations par
LORRAINE LAMEQUIN
- et -
RELATIVEMENT à un appel interjeté auprès d'un juge-arbitre par la prestataire
de la décision d'un conseil arbitral rendue le 23 août 1994, à Longueuil, Québec
DÉCISION
LE JUGE ROULEAU
La prestataire en appelle de la décision majoritaire du conseil arbitral qui a accueilli l'appel de son ancien employeur ayant déterminé que ce dernier avait congédié Mme Lamequin en raison d'inconduite.
Mme Lamequin a produit une demande de prestations le 9 juin 1994. Elle indiquait avoir travaillé comme représentante pour Mille et un métiers Inc. du 10 janvier au 8 juin 1994 et avoir été congédiée.
Elle a expliqué que la veille de son renvoi, elle avait demandé au conseil d'administration de Mille et un métiers Inc. s'il était possible qu'elle relève directement de la Directrice de production et d'une administratrice parce que selon elle ces deux personnes avaient l'entreprise à coeur. L'employeur, M. Foster, a déclaré que Mme Lamequin avait été congédiée en raison de ses ventes insuffisantes et d'un problème de communication entre lui et elle. Il soumet qu'il y avait divergences d'opinion,
qu'elle refusait qu'il l'accompagne chez les clients et qu'elle avait de la difficulté à prendre une direction dans son travail.
La prestataire a déclaré que M. Foster avait indiqué que ses ventes étaient bonnes trois semaines seulement avant son congédiement. Elle réitère avoir été congédiée à cause de sa lettre au conseil d'administration demandant de relever directement d'un autre supérieur. Elle soumet avoir pris des mesures légales relativement à ce congédiement.
Par avis en date du 6 juillet 1994, la Commission avisait l'employeur que des prestations avaient été accordées à Mme Lamequin.
L'employeur a porté cette décision en appel devant un conseil arbitral. M. Foster a déclaré que Mme Lamequin avait été congédiée en raison de son insubordination et faible rendement. Il a soumis qu'elle avait refusé de discuter à porte fermée de dossiers importants et confidentiels, qu'elle avait refusé qu'il l'accompagne pour rencontrer des clients importants et qu'elle n'avait pas contacté certains clients alors qu'il l'avait enjoint de le faire. Il a également soumis qu'elle avait démontré un niveau inacceptable de recrutement de nouveaux clients. Une lettre en date du 10 mai 1994 fut déposée par l'employeur à l'appui de ses allégations à l'effet qu'il n'était pas satisfait du rendement de Mme Lamequin. Lors de l'audience, l'employeur a fait valoir que la prestataire ignorait ses directives et refusait de se conformer aux politiques de développement de l'entreprise. Il a également déclaré qu'elle nuisait au développement et à la rentabilité de l'entreprise.
Après avoir entendu les témoignages oraux et étudié la preuve documentaire au dossier, la majorité du conseil arbitral a accueilli l'appel de
l'employeur et rejeté la décision de la Commission. Le membre dissident, quant à lui, a accordé crédibilité au témoignage de la prestataire. Selon lui l'employeur n'a pas fait la preuve qu'il était justifié de congédier Mme Lamequin.
Les parties ont comparu devant le juge-arbitre le 10 septembre 1996. Suite à l'audition et après avoir attentivement révisé le présent dossier, je suis d'avis que la preuve d'inconduite n'a pas été faite. La décision majoritaire du conseil arbitral est entachée d'erreurs de droit et de faits et elle doit être renversée.
Je traiterai tout d'abord des points retenus par le conseil dans sa décision. Le premier point confirme que les conditions de travail étaient connues des deux parties. On réfère ensuite à la lettre que M. Foster aurait remise à la prestataire le 10 mai 1994. Je suis incapable de trouver une trace quelconque d'inconduite de ces deux éléments et le conseil n'a aucunement précisé en quoi ceux-ci pouvaient appuyer leur conclusion d'inconduite. Le troisième point est à l'effet que la prestataire passait outre aux directives de son supérieur immédiat en ne voulant pas se conformer aux politiques de développement de l'entreprise. Le conseil a considéré que les pièces 3.1 et 3.2 appuient cet argument. Encore une fois, je ne vois rien à la lecture de ces documents qui pourrait démontrer avec prépondérance l'inconduite alléguée de la prestataire. En effet, la déclaration de la prestataire ne fait que relater le fait non contesté qu'elle a été congédiée par M. Foster le lendemain du jour où elle adressait une demande de modification de supérieur immédiat au conseil d'administration. Finalement, le conseil semble avoir retenu l'allégation de l'employeur à l'effet que la prestataire nuisait au développement et à la rentabilité de l'entreprise. Or, le conseil n'a pas
précisé les faits à la base de cette affirmation et je n'en retrouve aucune trace au dossier. De plus, le conseil indiquait dans sa décision que les raisons développées par l'employeur sont confirmées par la prestataire. Je ne suis pas d'accord puisque la preuve documentaire, plus précisément la pièce 3.2, contredit clairement au moins le dernier élément énoncé ci-haut. En raison de ces erreurs, je suis d'avis que le conseil a erronément conclu à l'inconduite de la prestataire.
En l'espèce, la preuve démontre clairement qu'il existait un problème d'incompatibilité entre la prestataire et son supérieur. La jurisprudence constante a établi que les difficultés de communication entre un prestataire et son employeur ou l'incompatibilité ne constituent pas en soi de l'inconduite.
J'estime que la conclusion de la majorité du conseil arbitral est erronée. Par conséquent, la décision majoritaire du conseil arbitral en date du 24 août 1994 est annulée et l'appel de la prestataire accueilli.
"P. ROULEAU"
JUGE-ARBITRE
OTTAWA, Ontario
Le 8 novembre 1996