TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE
- et -
d'une demande de prestations présentée par
GLEN GIFFEN
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire à
l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
Calgary (Alberta) le 29 août 1995
Appel entendu à Calgary (Alberta), le 16 octobre 1996.
DÉCISION
LE JUGE W.J. HADDAD, C. R.
Le prestataire a quitté volontairement son emploi chez H & R Transport Ltd. La Commission a approuvé la demande de prestations d'assurance-chômage du prestataire après avoir déterminé qu'il était fondé de quitter son emploi.
L'employeur a porté appel devant un conseil arbitral qui a rendu une décision majoritaire en sa faveur - un membre du conseil a rédigé un rapport de dissension. Le prestataire porte maintenant en appel la décision du conseil arbitral.
Le prestataire s'est présenté en personne accompagné de sa femme Edna. La Commission a préféré ne pas participer. L'employeur n'était pas représenté à cette audition. Il avait cependant été représenté par Dave Foder à l'audition devant le conseil arbitral. Après un bref ajournement pour permettre à la greffière adjointe de communiquer avec l'employeur par téléphone, elle a affirmé avoir parlé à M. Foder qui a admis avoir reçu l'avis concernant la tenue de cette audition et n'être plus intéressé à continuer les procédures. J'ai donc entendu les observations du prestataire, présentées par sa femme parce que lui-même souffre d'une déficience auditive.
Le prestataire affirme avoir quitté son emploi en raison d'une « modification importante des fonctions » suivant l'alinéa 28(4)i) de la Loi sur l'assurance-chômage. Cependant, l'appel du prestataire se fonde principalement sur l'alinéa 80c) de la Loi sur l'assurance-chômage.
Le prestataire, un homme de 50 ans, et sa femme travaillaient en équipe et ils avaient conduit des semi-remorques de transport nombre de fois aux États-Unis. En raison de sa déficience auditive, le prestataire requiert l'assistance de sa femme qui s'occupe de la plus grande partie du volet communication dans son emploi. De son côté, la femme du prestataire a subi une blessure au dos qui la rend incapable de soulever des articles lourds.
Le prestataire et sa femme ont été embauchés par l'employeur en février 1993. Leur emploi a pris fin en juin 1995. Durant cette période, le prestataire et sa femme n'étaient pas tenus par l'employeur de décharger leur semi-remorque. Si les clients ne s'occupaient pas eux-mêmes du déchargement, l'employeur payait des travailleurs occasionnels pour le faire. Les choses se passaient ainsi, et cette façon de procéder était devenue une condition de leur emploi.
Les conjoints affirment que ni l'un ni l'autre n'était capable d'effectuer des travaux manuels lourds, un fait dont l'employeur avait connaissance. D'après la décision minoritaire, le prestataire a présenté des preuves de sa déficience auditive et des problèmes de dos de sa femme. La majorité des membres n'a pas tenu compte de ces preuves dans sa décision.
En mai 1995, l'employeur a informé le prestataire qu'il devrait dorénavant décharger lui-même les camions ou payer quelqu'un pour faire le travail parce qu'il n'en assumerait plus la responsabilité. L'employeur reconnaît avoir imposé cette modification aux fonctions du prestataire. C'est pour cette raison que le prestataire a quitté son emploi.
Le mot clé à l'alinéa 28(4)i) est « importante ». Un changement mineur aux fonctions n'est pas suffisant pour invoquer cet alinéa. Il faut que la modification soit importante, quelle fasse une différence qui sorte des normes. Le fait que le prestataire, qui n'avait pas à travailler physiquement, ait été obligé de choisir entre effectuer des travaux manuels lourds ou faire effectuer ces travaux à ses frais pour libérer l'employeur de cette dépense constitue une modification importante de ses fonctions et une modification qui dépasse manifestement les normes. C'est un facteur dont le conseil arbitral n'a pas tenu compte. Celui-ci s'est plutôt attardé à l'état de santé du prestataire et de sa femme et sur leur capacité à effectuer des travaux manuels lourds.
Je crois que le conseil arbitral a commis une erreur en ne tenant pas compte de l'importance de la modification unilatérale imposée aux prestataires. Le conseil arbitral a fondé sa décision sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance et il a commis une erreur de droit.
Je suis d'avis que l'ensemble de la preuve montre qu'il y a eu modification importante des fonctions. Je suis d'accord par ailleurs avec la décision du membre dissident du conseil arbitral, laquelle est fondée sur un raisonnement juste.
J'ai envisagé de demander que l'appel soit de nouveau entendu par un conseil arbitral pour qu'il détermine si la modification des fonctions était « importante », mais j'ai choisi de rendre moi-même la décision que le conseil arbitral aurait dû rendre en premier lieu.
L'appel est accueilli et la décision de la Commission est rétablie.
« W.J. Haddad »
Juge-arbitre
Edmonton (Alberta)
Le 29 octobre 1996