TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-CHÔMAGE
- et -
d'une demande de prestations présentée par
KEVIN WALLACE
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire
à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue
à Kingston (Ontario) le 4 mars 1998.
DÉCISION
LE JUGE MURDOCH
J'ai entendu cette affaire à Kingston (Ontario) le 21 octobre 1998.
Le prestataire est représenté par Mme Grace Vaccarelli, du Queen's Legal Aid. Le procureur de la Commission est M. Darrell Kloeze.
Le prestataire interjette cet appel à l'encontre de l'imposition, en vertu des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi, d'une inadmissibilité indéfinie pour avoir perdu son emploi en raison de sa propre inconduite.
Le prestataire travaillait chez Burgess Wholesale Ltd. et il a perdu son emploi le 5 novembre 1997, date à laquelle il s'est querellé avec un collègue de travail. Le prestataire, au cours de cette querelle, a poussé son collègue, geste pour lequel il s'est plus tard excusé.
La Commission a conclu que les actes commis par le prestataire constituaient une inconduite dans les limites de la définition de la Loi, car les employeurs sont en droit de s'attendre à ce que leurs employés règlent leurs problèmes ou incidents de manière non physique ou violente.
Le dossier contient le commentaire (pièce 9) de Eugene Guthro, un collègue de travail, qui précise :
« Je ne sais pas vraiment quoi dire, mais je sais que dans le passé, la politique de Burgess était d'avertir par écrit les employés et, à ma connaissance, jamais un employé n'a été congédié pour un incident, et je travaille ici depuis près de quatre ans. J'ai personnellement été témoin de combats entre d'autres employés, dont Martin George, John Thompson, Zach Amey, Jeff Hunter et Gordy. Ils se sont tous battus, bousculés ou engagés dans d'autres genres de disputes, même depuis le congédiement de M. Wallace. Dans ces situations, ils ont été avertis par écrit, retournés à la maison ou envoyés en haut pour se calmer. »
[TRADUCTION]
Une preuve similaire apparaît dans une lettre de Martin George, remontant au 15 mars 1998, adressée à qui de droit. Cette lettre n'a malheureusement pas été répertoriée comme pièce au dossier mais elle dit ceci :
« Je travaille à temps partiel pour Burgess depuis 1989 et à plein temps depuis 1994. J'ai vu et assisté à beaucoup de bisbilles, bousculades et batailles entre confrères de travail sans qu'aucun d'entre eux ne soit à la suite congédié, sauf Kevin Wallace. Il ne faisait que demander de l'aide pour son travail. Il y a une limite à lever des poids sans devoir lever ceux des autres! Je pense vraiment qu'on s'est servi de Kevin comme exemple et il ne le méritait pas. Il y a eu d'autres batailles et de la bisbille depuis son départ et personne n'a été réprimandé. »
[TRADUCTION]
Le prestataire affirme ce qui suit dans la pièce 4-2 :
« D'autres employés ont été impliqués dans des circonstances semblables. Ils ont reçu un avertissement écrit et ont été retournés à la maison pour le reste du quart de travail. J'ai demandé qu'on me serve un avertissement écrit ou qu'on me retourne à la maison, mais on m'a dit que je n'étais pas au service de l'entreprise depuis assez longtemps. »
[TRADUCTION]
La preuve non controversée semble être que le genre de conduite à laquelle le prestataire s'est livré ne résulterait pas en un congédiement pour inconduite. Le conseil arbitral n'a pas consulté le jugement P.G. Canada c. Langlois (A-94-95), dans lequel le juge Pratte précise :
« L'inconduite dont parle l'article 28(1), et qui, comme le fait de quitter volontairement son emploi, entraîne, suivant l'article 30.1, l'exclusion du prestataire du bénéfice des prestations pour toute la durée de sa période de prestations, n'est pas un simple manquement de l'employé à n'importe quelle obligation liée à son emploi; c'est un manquement d'une portée telle que son auteur pouvait normalement prévoir qu'il serait susceptible de provoquer son congédiement. » (J'ai souligné) (L'article 28 de la Loi sur l'assurance-chômage est dorénavant connu comme l'article 30 de la Loi sur l'assurance-emploi)
Toute la preuve semble démontrer que tout employé de Burgess Wholesale Ltd., se conduisant de la même manière que le prestataire, ne s'attendrait pas à ce qu'une telle conduite provoque son congédiement.
Le conseil arbitral a commis une erreur de droit en ne consultant pas la jurisprudence applicable.
L'appel est accueilli.
G. Murdoch
Juge-arbitre
Peterborough (Ontario)
Le 10 novembre 1998