EN VERTU DE LA LOI sur L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
RELATIVEMENT à une demande de prestations par
DANIELLE MONGEAU
- et -
RELATIVEMENT à un appel interjeté par le prestataire auprès
d'un Juge-arbitre à l'encontre de la décision du Conseil arbitral
rendue le 30 septembre 1998 à Laval, province de Québec.
DÉCISION
GASTON HARVEY, J.:
La prestataire a formulé un appel à l'encontre de la décision du conseil arbitral rendue le 30 septembre 1998 par laquelle il confirmait la décision de la Commission de lui refuser des prestations parce qu'elle avait quitté son emploi sans justification.
La décision du conseil arbitral était majoritaire. Tant la majorité du conseil que la dissidente n'ont pas mis en doute la crédibilité de la prestataire. La majorité du conseil arbitral ne s'est appuyé que sur une partie de la preuve faite devant lui et contenue dans le dossier.
En effet, la majorité s'est prononcé sur la question de santé de la prestataire et il rapporte le formulaire sur lequel on a demandé à la prestataire « avez-vous quitté votre emploi pour des questions de sauté ? La prestataire a répondu oui. On lui demande si elle a consulté un médecin avant de quitter son emploi et elle répond également oui et elle répond non à la question « est-ce que le médecin vous a conseillé de quitter votre emploi ? (pièce 4.1.).
Le dernier paragraphe avant les conclusions de la décision du conseil arbitral rapporte une conversation agressive entre l'employeur et la prestataire. Cette conversation et le ton agressif de l'employeur équivaut pratiquement à un congédiement.
Comme l'employée démontrait les difficultés qu'elle éprouvait dans son emploi, l'employeur ne lui a pas suggéré d'amélioration et l'a placée devant un fait accompli « si tu n'es pas contente, tu n'as qu'à t'en aller, c'est aussi simple que ça. » Il est évident qu'elle n'était pas satisfaite. Il ne lui restait d'autre choix que de partir.
Le conseil arbitral ne s'est pas posé la bonne question. À la pièce 4, la prestataire décrit les motifs qui l'ont amenée à quitter son emploi. Il y avait d'abord son problème de santé mais ce n'était pas le seul. La prestataire souligne que son employeur n'avait pas confiance en elle et elle a discuté avec ce dernier de ses divers problèmes sans obtenir aucun résultat. Elle a demandé des augmentations de salaire et de l'aide. L'employeur aurait alors engagé une superviseure qui, loin d'alléger son travail, l'a compliqué par toutes sortes de tracasseries. La prestataire, pendant cette période, faisait des recherches d'emploi. La pièce 7.3 décrit l'atmosphère du travail chez Mondia Éditeurs inc.; des employés ont été remerciés de leurs services et n'ont pas été remplacés.
La prestataire, dans l'accomplissement de son travail, avait des décisions à prendre. La situation financière de la compagnie était difficile et l'employeur chargeait la prestataire de prendre des arrangements avec les clients; les ententes prises avec les clients n'étaient pas respectées par son employeur et il en résultait de sérieux mécontentements de la part des clients qui la rabrouaient.
Elle décrit longuement l'atmosphère de travail qui régnait chez son employeur et ce n'était pas facile. À la pièce 5.1, l'employeur confirme en partie les propos de la prestataire.
Dans de telles circonstances, je crois que le conseil arbitral ne pouvait exiger que la prestataire se soit assurée d'un autre travail avant de quitter son emploi. Ceci est, à mon sens, une erreur de droit. Je crois que la prestataire était justifiée de quitter cet emploi étant donné l'atmosphère qui y régnait et que vu l'ensemble de ces circonstances, son départ constituait la seule solution raisonnable. Selon l'article 29c)(x) de la Loi, les conditions de travail étaient intolérables et la prestataire était dans la situation décrite dans l'article précité « relations conflictuelles dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur ».
Dans l'arrêt de Marie-France LaVictoire, CUB 28189, le juge Rouleau relate des circonstances qui peuvent être apparentées au cas sous étude. À la page 3, il souligne :
« En l'espèce, le Conseil arbitral ne s'est pas penché sur la bonne question qui était de déterminer si la prestataire était justifiée de quitter son emploi. À la lumière des faits au dossier, je suis d'avis qu'il existait des circonstances justifiant cette dernière de quitter son emploi comme elle l'a fait. »
Dans CUB 30369, Frances Lesperance, l'honorable Hollingworth a décidé dans le même sens en s'appuyant sur une décision du juge Strayer dans le CUB 18995, où il le cite en ces termes à la page 4 :
"It will be noted that Justice Strayer said that "a reasonably prudent person does not leave one job without fnding another one unless circumstances at the existing job are impossible, intolerable or dangerous."
La Commission a soutenu dans son plaidoyer qu'il s'agissait, dans les circonstances, d'une question de faits où le juge-arbitre ne devait pas intervenir.
J'étais justifié d'intervenir étant donné que la majorité du conseil arbitral n'avait tenu compte que dune partie des pièces au dossier.
POUR CES MOTIFS, l'appel de la prestataire est accueilli.
(S) GASTON HARVEY, C.R.
GASTON HARVEY, C.R.
JUGE-ARBITRE
ALMA (Québec) ce 24 novembre 1999.
2011-01-16