TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'une demande de prestations présentée par
ALBERT BITTERN
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire
à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
Brandon (Manitoba) le 16 octobre 1998.
DÉCISION
Appel entendu à Winnipeg (Manitoba) le jeudi 7 octobre 1999.
LE JUGE-ARBITRE HADDAD, C.R.
C'est le prestataire qui interjette appel. La question est de savoir si le prestataire a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite.
Le prestataire a commencé à travailler à titre de chargeur de fret chez Wasaya Airways de Thompson (Manitoba) le 1er décembre 1996 et il a été congédié le 23 juillet 1998 pour ne pas s'être présenté au travail.
Le conseil a rendu une décision dans laquelle il a négligé d'étudier toute la preuve substantielle et, en plus, il ne s'est pas arrêté sur la définition du mot « inconduite ». Je rendrai donc la décision que le conseil aurait dû rendre.
À la suite de son congédiement, le prestataire a rempli une demande de prestations de chômage et une demande initiale de prestations a été établie à partir du 26 juillet 1998.
Le prestataire est un père célibataire ayant à sa charge cinq enfants âgés de 2, de 3, de 5, de 5 (jumeaux) et de 13 ans. Son horaire de travail lui demandait de se présenter les lundis et jeudis de 7 h à 18 h. Il lui fallait donc trouver quelqu'un pour garder ses enfants à partir de 6 h les lundis et les jeudis. Lorsque le prestataire a commencé à travailler en décembre 1996, sa conjointe de fait s'occupait des enfants. Elle a quitté le prestataire et les enfants et c'est à ce moment-là que ses problèmes ont commencé.
Parce qu'il n'avait pas trouvé de gardienne pour ses enfants, il n'a pu se présenter au travail le 5 juillet 1998; il a demandé à un jeune homme avec qui il se rendait normalement au travail d'informer l'employeur qu'il ne pouvait pas se présenter au travail. Le même jeune homme a de nouveau informé l'employeur le 27 juillet 1998 du fait que le prestataire devait rester à la maison avec ses enfants. Entre ces deux dates, le prestataire a fait part de son problème à l'employeur. Il faut concéder que le prestataire a commis une erreur en négligeant de téléphoner personnellement et directement à l'employeur. Néanmoins, l'employeur a, à chaque occasion, été informé de l'impossibilité pour le prestataire de se présenter au travail.
L'inconduite a été définie de diverses façons. La définition suivante, extraite du Black's Law Dictionary (5e édition), est acceptée comme une définition juste :
« ..Misconduct, which renders discharged employee ineligible for unemployment compensation, occurs when conduct of employee evinces wilful or wanton disregard of employer's interest, as in deliberate violations or disregard of standards of behaviour which employer has right to expect of his employees, or in carelessness or negligence of such degree or recurrence as to manifest wrongful intent... »
Le fait que le prestataire ait négligé de se présenter au travail, compte tenu des circonstances l'empêchant de s'y présenter, n'entre pas dans cette définition. La conduite du prestataire n'était ni volontaire ni délibérée, deux principaux éléments pertinents à la question posée dans cette affaire. Une situation indépendante de sa volonté a causé son absence. Il aurait été très déplacé de sa part de ne pas tenir compte du bien-être de ses jeunes enfants en les laissant seuls. Il était dans l'obligation de s'occuper d'eux. En plus, bien qu'il eût dû informer personnellement son employeur lorsqu'il devait rester à la maison, ce fait constitue une indélicatesse qui n'entre pas dans la définition du mot « inconduite » - surtout lorsque l'employeur était au courant du problème du prestataire.
L'employeur, malgré le fait que le prestataire soit obligé de s'occuper de ses enfants, ne peut être blâmé d'avoir congédié le prestataire parce qu'il ne pouvait compter sur lui - mais ce fait n'indique aucune inconduite.
Parce que la preuve n'établit pas d'inconduite, l'appel est accueilli pour faire en sorte que le prestataire soit admissible aux prestations.
W.C. Haddad
Juge-arbitre
Edmonton (Alberta)
Le 22 novembre 1999