CUB 47897
TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'une demande de prestations présentée par
ROBERT CASTELL
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire à
l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
Belleville (Ontario) le 13 mai 1999.
DÉCISION
LE JUGE-ARBITRE MacKAY
L'appelant a déménagé du Canada vers les États-Unis en novembre 1998. Il a déménagé dans la région de Washington (D.C.) pour accompagner son épouse qui avait décroché un nouvel emploi dans cette région. Selon sa présentation, il a quitté son employeur à Ottawa le vendredi et a déménagé pendant la fin de semaine qui suivait. Il s'attendait à ce qu'il soit relativement facile de s'y trouver un emploi, mais il a été surpris de découvrir que tel n'était pas le cas. La plupart des emplois dans la région de Washington (D.C.) sont reliés à la défense; il a éprouvé des difficultés en raison du fait qu'il n'est pas un citoyen américain.
En décembre 1998, l'appelant s'est présenté au bureau de la Commission d'emploi de la Virginie, espérant être admissible aux prestations de chômage. Un agent lui a dit qu'il n'était pas admissible en raison du fait qu'il n'avait jamais travaillé en Virginie. Quelques mois plus tard, en mars, il est retourné au bureau de la Commission et un agent l'a informé à ce moment que, bien qu'il ne soit pas admissible aux prestations de chômage en Virginie, il était probablement couvert en vertu du Programme canadien d'assurance-chômage. L'appelant a immédiatement présenté une demande de prestations au Canada et il a appris qu'il était admissible. Il a demandé une antidatation de ses prestations à sa date de démission en novembre 1998. Cette demande a été refusée, comme le précise un agent d'assurance dans la lettre suivante remontant au 6 avril 1999 :
« La raison est que vous ne nous avez pas démontré qu'entre le 2 novembre 1998 et le 13 mars 1999, vous aviez un motif valable pour présenter une demande de prestations en retard. Cependant, nous avons établi l'entrée en vigueur de votre demande au 14 mars 1999. » [traduction]
L'appelant a interjeté appel à l'encontre de la partie d'antidatation de la décision et affirme qu'il croyait raisonnablement que l'assurance-emploi, comme son assurance automobile et sa protection médicale de la province de l'Ontario ne se déplacent pas et qu'il ne pouvait en profiter s'il n'était plus résident du Canada. Lorsqu'il a été informé de ce fait en mars 1999, il a immédiatement entrepris les démarches nécessaires pour présenter sa demande.
Un conseil arbitral a entendu l'appel de l'appelant le 13 mai 1999. Il lui a été impossible de se présenter à l'audience, mais il a témoigné par téléconférence. Les membres du conseil ont rejeté à l'unanimité son appel en concluant comme suit :
« .. l'appelant n'avait pas, entre le 2 novembre 1998 et le 13 mars 1999, un motif valable pour présenter une demande de prestations en retard. Une personne raisonnable dans la même situation se serait informée de ses droits et obligations avant de quitter le Canada. La jurisprudence établit que l'ignorance de la loi n'est pas un motif valable pour présenter une demande de prestations en retard. Après avoir soigneusement considéré les faits de cette affaire, le conseil n'a pu trouver d'erreur dans la détermination de la Commission.
Décision : L'appel de l'appelant est rejeté. » [traduction]
M. Castell interjette maintenant appel à l'encontre de la décision du conseil arbitral en se basant sur la preuve au dossier et l'enregistrement de l'audience devant le conseil. L'article 115 de la Loi sur l'assurance-emploi, S.C. 1996, c. 23 discute des appels devant un juge-arbitre. Le même article limite les motifs d'appel à trois. Le motif particulier sur lequel se base l'appelant, M. Castell, se retrouve à l'alinéa 115(2)(c) :
« c) le conseil arbitral a fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. »
En bref, l'appelant déclare que le conseil arbitral a commis une erreur en décidant qu'il n'avait pas de motif valable pour présenter une demande en retard, en particulier par rapport à la période du 1er janvier 1999, date à laquelle il aurait été admissible aux prestations s'il avait été bien informé lorsqu'il a demandé des renseignements au bureau d'emploi de la Virginie en décembre 1998.
Afin de renverser la décision du conseil arbitral, un juge-arbitre doit conclure que le conseil est arrivé à sa décision de façon absurde ou arbitraire ou sans égard à la preuve présentée. En raison du fait que la Loi sur l'assurance-emploi ne stipule que trois motifs d'appel, je ne pourrais pas accueillir l'appel à moins que le conseil ait commis une erreur du genre compris dans le paragraphe 115(2) de la Loi même si je n'étais pas d'accord avec le conseil. En bref, sans ce genre d'erreur, je ne peux substituer mes conclusions à celles du conseil ou à celles de la Commission.
La Commission aide cependant l'appelant. Dans ses représentations d'appel, elle indique qu'un examen approfondi de l'affaire suite à la décision du conseil arbitral a mené à la conclusion que l'appelant avait effectivement un motif valable de retard passé le 1er janvier 1999 en raison du fait que l'appelant s'était renseigné à la Commission de chômage de la Virginie en décembre 1998, mais qu'il n'a pas alors été informé de l'option de présenter une demande de prestations au Canada. Il a déployé un effort raisonnable et il a, en bout de ligne, été mal informé par un employé de ce bureau. Pour la période précédant le 1er janvier 1999, la Commission confirme, en accord avec le conseil arbitral, qu'il n'avait pas de motif valable pour présenter une demande de prestations. Jusqu'à sa visite de décembre au bureau de la Commission d'emploi de la Virginie, l'appelant n'a déployé aucun effort pour s'informer de la disponibilité des prestations d'assurance-chômage.
En me basant sur la concession de la Commission concernant la période suivant le 1er janvier 1999, je confirme que l'appelant a déployé des efforts raisonnables pour s'informer de son admissibilité et ses prestations devraient donc entrer en vigueur à partir du 1er janvier 1999. Pour ce qui est de la période précédant le 1er janvier 1999, je ne peux conclure que le conseil arbitral a commis une erreur donnant lieu à cassation en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. La preuve et le dossier n'ont pas dévoilé que l'appelant avait déployé les efforts raisonnables pendant la période de novembre et décembre.
L'appel de l'appelant est accueilli, en partie, et toute période de prestations sera antidatée au 1er janvier 1999.
W.A. MacKay
Juge-arbitre
Ottawa (Ontario)
Le 10 mars 2000