CUB 50083
TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'une demande de prestations présentée par
AARON NEIL MOSER
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire à
l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
New Westminster (Colombie-Britannique) le 13 décembre 1999.
Appel entendu à Vancouver (Colombie-Britannique) le mercredi 18 octobre 2000
LE JUGE-ARBITRE URIE
DÉCISION
Le prestataire/appelant interjette appel de la décision majoritaire du conseil arbitral, qui avait accueilli l'appel interjeté par son employeur, Hemlock Printers Ltd. (« Hemlock »), à l'encontre d'une décision de la Commission approuvant le versement de prestations à l'appelant. La Commission avait établi que l'appelant avait un motif valable de quitter son emploi. Une minorité du conseil arbitral avait évoqué que l'appelant avait été implicitement congédié par son employeur et que la seule solution valable dans son cas était de quitter son emploi.
L'appelant a comparu en son propre nom. L'employeur a été informé de la tenue de l'audience et a accusé réception de l'Avis d'audience, après s'être renseigné sur la nature de la procédure, mais n'a pas comparu. L'avocat de la Commission a informé le juge-arbitre qu'il n'interviendrait pas dans l'appel.
Les faits pertinents sont brièvement exposés ici. L'appelant a été un employé de Hemlock du 19 juillet 1994 au 23 juillet 1999, et il avait gravi les échelons jusqu'à occuper le poste de « réceptionnaire des marchandises/gérant d'inventaire ». Suite à une réorganisation des activités de la compagnie, il semble que le poste de l'appelant a dû être éliminé, mais on lui a offert un nouveau poste qu'il définit comme « aide de plancher sur l'équipe d'après-midi ». L'employeur, quant à lui, définit cet emploi comme « expédition, réception, mise en entrepôt, emmagasinage » (pièce 5.3). L'appelant devait recevoir le même salaire horaire qu'auparavant, même si ses heures de travail avaient été déplacées en après-midi/soirée, ce qui faisait obstacle à sa carrière musicale qui l'obligeait à travailler le soir. Une période de probation de trois mois lui avait été imposée, parce que son employeur qualifiait le poste de nouveau poste assorti de nouvelles fonctions. Conformément à sa politique, la compagnie a exigé l'imposition d'une période de probation. L'appelant s'est fermement opposé à ces nouvelles conditions de travail, comme en fait foi la pièce 5.5 :
« Comme je vous l'ai mentionné, j'étais prêt à accepter votre offre pour un emploi de substitution, sans toutefois que cela ne me cause préjudice, mais pas sous l'obligation de faire face à une nouvelle période de probation de trois mois.
Je suis un employé qui compte cinq années d'expérience, sans problèmes de rendement, et qui a déjà terminé avec succès sa période de probation. Il ne m'apparaît pas juste ni raisonnable de me voir offrir un poste qui, selon vos dires, est « plus près du poste pour lequel vous [M. Moser] avez initialement été embauché avant qu'il ne soit changé à un poste de réception/mise en entrepôt », assorti d'une nouvelle période de probation de trois mois.
Je demeure convaincu que votre offre pour un emploi de substitution assorti d'une nouvelle période de probation, de même que la modification de mes conditions d'emploi actuelles, constituent la base d'un congédiement implicite. Je suis prêt à défendre mon point de vue au moment propice et à l'endroit approprié. » [TRADUCTION]
Dans la même lettre, l'appelant a demandé à ce que son relevé d'emploi, ses rémunérations non payées, sa paye de vacances et son indemnité de départ lui soient envoyés. Ces documents lui ont été envoyés par Jeff Taylor (directeur de la fabrication chez l'employeur), accompagnés d'une lettre datée du 28 juillet 1999 (pièce 5.7). Toutefois, aucune indemnité de départ n'a été payée et le relevé d'emploi stipulait que l'appelant avait démissionné ou refusé de travailler.
Une majorité du conseil arbitral a soutenu que l'appelant avait quitté son emploi de façon volontaire. Le conseil a conclu que lorsque l'appelant a quitté son emploi, il avait d'autres alternatives raisonnables, malgré le fait que son employeur lui avait offert « un nouveau poste assorti de nouvelles fonctions ». La majorité a par la suite conclu que l'appelant aurait pu, et aurait dû, continuer de travailler (probablement au nouvel emploi qui lui avait été offert), plutôt que de croire qu'il était congédié implicitement et ainsi quitter son emploi.
D'autre part, le membre minoritaire du conseil arbitral a soutenu que l'appelant avait été implicitement congédié et que la seule alternative raisonnable qui se présentait à lui était de quitter son emploi. Selon le membre minoritaire du conseil, plusieurs raisons portent à croire que l'appelant a été implicitement congédié : réduction du nombre d'heures de travail, obligation de travailler sur l'équipe d'après-midi (ce qui nuisait à son autre emploi comme musicien), changement dans les tâches, rétrogradation et nouvelle période de probation de trois mois. Le membre minoritaire est d'avis que l'appelant n'aurait pas dû se voir imposer une nouvelle période de probation. Il a également fait remarquer que même si la compensation monétaire de l'appelant était équivalente, son nombre d'heures de travail avait été réduit.
À mon avis, le point de vue du membre minoritaire du conseil arbitral tient davantage compte des faits divulgués dans le relevé d'emploi et que l'appel, de cette façon, devrait être accueilli. Il appuie la thèse de la Commission selon laquelle l'appelant a démontré qu'il avait un motif valable de quitter volontairement son emploi puisque son poste avait été aboli. Même en admettant que l'employeur avait offert un nouveau poste à l'appelant, il faut tenir compte que l'horaire de travail était moins favorable. M. Moser possédait une expérience considérable et de bons états de service. De plus, selon les apparences, l'appelant avait de bonnes évaluations de son rendement au travail. Dans ce cas, l'imposition d'une autre période de probation laisserait sous-entendre un manque de confiance de la part de l'employeur envers M. Moser et pourrait être formulée comme une façon de le congédier ultérieurement sans avoir à lui verser une indemnité de départ pour le travail accompli au sein de la compagnie.
Il est clair, en vertu de l'alinéa (c) de l'article 29 de la Loi sur l'assurance-emploi, que l'appelant avait un motif valable de quitter volontairement son emploi dans les conditions prévues au paragraphe (ix), puisque des changements significatifs sont survenus dans ses fonctions.
Puisqu'il en est ainsi, l'appel est accueilli. La décision de la majorité du conseil arbitral est révoquée et la décision de la Commission est rétablie.
John J. Urie
Juge-arbitre
Ottawa (Ontario)
le 7 novembre 2000