CUB 50475
TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'une demande de prestations présentée par
NORMA GREER
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la prestataire
à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
Kelowna (Colombie-Britannique) le 9 mai 2000.
DÉCISION
LE JUGE-ARBITRE DAVID G. RICHE
Mme Greer a interjeté appel de la décision de la Commission selon laquelle elle aurait quitté son emploi le 11 mars 2000 sans motif valable. La Commission estimait que le fait de démissionner ne constituait pas la seule solution raisonnable dans son cas. La prestataire et son représentant ainsi que son employeur se sont présentés à l'audience. La mère de la prestataire était également présente.
Le représentant de l'appelante a déclaré que la prestataire avait un motif valable de quitter son emploi en raison du stress engendré par ses employeurs. Les problèmes de communication étaient essentiellement liés à M. McKay. En outre, on ne lui a jamais expliqué la nature exacte de ses fonctions. L'appelante a déclaré qu'on lui avait fait des reproches parce qu'elle disposait de renseignements au sujet des fournisseurs qu'elle n'aurait jamais dû connaître. Elle pensait qu'elle outrepassait constamment ses fonctions, mais elle ne connaissait pas les limites de celles-ci en raison du manque de communication entre elle et ses employeurs.
Debbie Reece a présenté des preuves qui appuyaient le point de vue de l'employeur, à savoir que la communication était bonne.
La prestataire travaillait à cet endroit depuis six ans avant l'arrivée des nouveaux propriétaires. Il n'y avait jamais eu de problèmes. La communication était excellente avec les propriétaires précédents. Contrairement à l'ancien propriétaire, les nouveaux propriétaires ont assumé un rôle actif dans la gestion du restaurant. Le représentant de l'appelante a déclaré que, lorsque celle-ci a essayé de parler à M. McKay, ce dernier a déclaré que, si elle n'était pas contente, elle pouvait partir. Il a également souligné que l'horaire de la prestataire faisait qu'elle devait travailler avec M. McKay et non avec Mme Reece. Le jour où elle est partie, elle avait peur de lui et, en raison de la manière dont il lui avait parlé, elle pensait qu'elle avait été congédiée. La prestataire a décrit cette journée à la pièce 4.
Le conseil a statué que l'appelante avait quitté son emploi en raison du stress que lui causaient les nouveaux propriétaires. Elle a déclaré que ses problèmes de communication étaient essentiellement liés à M. McKay. Elle n'a pas fait part du stress qu'elle vivait ni de ses problèmes liés au manque de communication à Mme Reece ni à M. McKay. Le conseil en a conclu que l'appelante avait quitté son emploi sans motif valable, car elle n'avait pas pris de mesures pour parler aux employeurs au sujet des problèmes qu'elle éprouvait dans sa relation avec eux. Le conseil était conscient que l'appelante souffrait visiblement de stress, mais la jurisprudence indique clairement que, pour avoir un motif valable, la prestataire doit tenter de parler à son employeur au sujet de ses préoccupations. Le conseil a déclaré qu'il éprouvait de la sympathie pour la prestataire et qu'il reconnaissait que le changement de propriétaires était une source de stress pour celle-ci. Pour ces raisons, le conseil a rejeté l'appel.
J'ai étudié le dossier et je suis convaincu que le conseil arbitral a commis une erreur, car sa décision est fondée sur une conclusion de fait erronée rendue de manière absurde ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments qui avaient été portés à sa connaissance. Il me semble clair, à la lecture du dossier, qu'il y a eu des communications entre les propriétaires et la prestataire. Il est également évident, à la lecture des présentations de la prestataire et de Debbie Reece, qu'il s'agissait d'une relation tumultueuse qui avait peu de chances de finir de manière satisfaisante. Le dossier me porte à croire que les conditions de travail imposées par les employeurs rendaient le travail de la prestataire si stressant qu'il était probable qu'elle allait démissionner. Lorsqu'elle en a parlé avec M. McKay, il lui a dit que si elle n'était pas contente, elle pouvait partir. Il ne s'agit certainement pas de la réponse d'une personne prête à discuter des problèmes professionnels de la prestataire. La prestataire a également déclaré, à la pièce 4, qu'elle avait subi une agression verbale.
Bien que je me rallie à l'opinion du conseil, à savoir qu'un employé doit discuter de ses problèmes avec l'employeur, dans l'affaire actuelle la prestataire a certainement été tenue à l'écart. Le conseil, dans sa décision, a témoigné beaucoup de sympathie à l'égard de l'appelante. Il a également tenu compte du stress engendré par sa position. Cependant, il n'a pas rendu une décision tenant compte des faits dans cette affaire. Je pense que le conseil, bien qu'il ait été tenté de donner raison à la prestataire, se sentait dans l'impossibilité de la faire parce qu'il jugeait que l'appelante aurait dû faire davantage d'efforts auprès de l'employeur. La lecture du dossier démontre que les employeurs ne souhaitaient pas qu'elle continue.
Pour ces raisons, l'appel est accueilli et la décision rendue par le conseil arbitral est renversée. Je déclare que la prestataire disposait d'un motif valable de quitter son emploi au Cherry Pit Restaurant où elle a travaillé pendant environ sept ans.
David G. Riche
Juge-arbitre
St. John's (Terre-Neuve)
Le 27 novembre 2000