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    CUB 51148

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d'une demande de prestations présentée par
    JOSEPH K. BREAU

    - et -

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire
    à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
    Saint John (Nouveau-Brunswick) le 25 novembre 2000.

    DÉCISION

    LE JUGE-ARBITRE DAVID G. RICHE

    Le prestataire, qui travaillait pour la firme Irving Oil Limited, a soutenu qu'au moment où il est arrivé à la station de distribution d'essence pour y remplir le réservoir, il s'est rendu à l'intérieur pour aviser l'exploitant de la station de son arrivée. Il a allégué qu'il avait sans doute mal évalué son temps cette fois et qu'il avait l'habitude de toujours retourner aussitôt pour rester près du pistolet de distribution pendant le remplissage du réservoir. La politique de l'entreprise à cet égard stipule que les conducteurs doivent demeurer en tout temps près du réservoir, mais en pratique ceux-ci ne s'y conforment pas toujours, surtout en hiver. Le prestataire a affirmé n'avoir jamais causé de déversement d'essence auparavant. Selon lui, environ cinq gallons d'essence seulement se sont déversés sur le sol. Il a soutenu que ni lui ni l'exploitant de la station ne croyaient que la situation était grave en raison de l'évaporation de l'essence. Il a donc cru qu'il n'était pas nécessaire pour lui de signaler le déversement.

    L'entreprise, elle, a souligné qu'en vertu de sa politique les conducteurs étaient tenus de demeurer près du réservoir durant le remplissage et de signaler tout déversement. Le prestataire a violé la politique à ces deux niveaux et il a été congédié.

    Le conseil arbitral a conclu que le prestataire savait qu'il aurait dû demeurer à proximité du réservoir pendant le remplissage, il connaissait la politique de l'entreprise et il savait qu'il devait signaler le déversement. Ces violations de la politique de l'entreprise constituaient de l'inconduite; le prestataire a donc perdu son emploi en raison de sa propre inconduite en vertu des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi.

    J'ai tenu compte de la preuve dans la présente affaire ainsi que des allégations présentées par M. Breau. Celui-ci a dit qu'il n'avait été distrait que pendant peu de temps par l'exploitant de la station avec qui il s'entretenait.

    J'ai fait référence à l'affaire Banque Toronto Dominion c. Fraternité unie des charpentiers et menuisiers d'Amérique (unité 785) et al., 168 N.R., où, au paragraphe 7, on peut lire ce qui suit :

    Il est vrai comme le prétend le procureur de l'intimé et pour reprendre les termes de l'arrêt Tucker (précité) que, pour qu'un geste puisse constituer de l'inconduite au sens de l'article 28 de la Loi, il faut que l'acte reproché ait un caractère volontaire ou délibéré ou résulte d'une insouciance ou d'une négligence telle qu'il frôle le caractère délibéré. []

    « Dans le cas du paragraphe 41(1) de la présente Loi, tous les facteurs qu'il m'a été possible d'isoler viennent appuyer l'interprétation du juge Reed. Tout d'abord, la définition tirée du Black's Law Dictionary qui met l'accent sur le fait que l'employé « néglige volontairement ou gratuitement les intérêts de l'employeur ». Il y a également le syntagme possessif « sa propre » précédant le mot inconduite, qui laisse sous-entendre la responsabilité et par conséquent le caractère intentionnel ou l'insouciance. »

    Dans la présente affaire, je conviens que M. Breau a fait preuve de négligence lorsqu'il s'est éloigné momentanément pendant le remplissage du réservoir. Il s'est toutefois absenté pendant une très courte période puisque le déversement était mineur, si l'on prend en considération les milliers de gallons qui sont convoyés à une station service par un transporteur d'essence. Je conviens que M. Breau a été négligent, mais il ne s'agissait purement que d'une simple négligence et non pas d'une négligence grave et certainement pas d'une inconduite que l'on pourrait qualifier d'insouciance volontaire ou totale à l'égard des intérêts de l'employeur. La preuve ici ne soutient pas la conclusion selon laquelle M. Breau a commis un acte insouciant, délibéré ou intentionnel.

    Dans les circonstances, l'employeur avait le droit de renvoyer l'employé pour cause de violation des règles et règlements, ce qui ne signifie pas par contre que M. Breau était coupable d'inconduite au sens de la Loi.

    Je conviens que le conseil arbitral, en mettant en pratique les faits de la présente cause, n'a pas correctement appliqué la loi. Pour ces raisons, l'appel est accueilli et la décision du conseil arbitral est annulée.

    David G. Riche

    Juge-arbitre

    St. John's (Terre-Neuve)
    Le 27 février 2001

    2011-01-16