• Accueil >
  • Bibliothèque de la jurisprudence
  • CUB 51905

    CUB 51905

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d'une demande de prestations présentée par
    WALTER MUSSEAU

    - et -

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire
    à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
    Corner Brook (Terre-Neuve) le 27 septembre 2000.

    DÉCISION

    LE JUGE-ARBITRE DAVID G. RICHE

    La question en litige dans la présente affaire consiste à savoir si le prestataire a quitté son emploi auprès de la firme Russell's Ambulance & Taxi Ltd. sans motif valable au sens des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi. Le prestataire a soutenu devant le conseil arbitral qu'il avait quitté son emploi pour prendre une retraite anticipée, mais qu'il aurait conservé son emploi s'il avait pu travailler de jour. Il était d'appel à raison de deux soirs par semaine. Il trouvait fatigant d'être appelé le soir et de devoir rester ensuite pour son quart de jour. Il avait demandé à son employeur de travailler le jour seulement, mais celui-ci avait refusé. Aucun médecin n'a recommandé au prestataire de quitter son emploi.

    L'employeur a confirmé que le prestataire était d'appel deux soirs par semaine et devait alors rester pour son quart de jour. L'employeur ne pouvait permettre à aucun de ses employés de travailler le jour seulement, puisque ceux-ci devaient faire un quart de nuit à tour de rôle. Le prestataire ne travaillait comme conducteur d'ambulance que depuis un an. Il avait auparavant exécuté des travaux d'entretien sur les véhicules ou l'immeuble.

    Dans sa lettre d'appel, le prestataire a déclaré que son emploi l'obligeait à faire des quarts de travail d'au moins 24 heures. Pendant ces postes de 24 heures, il n'était pas rare pour lui d'avoir à répondre à au moins quatre à six appels, d'effectuer deux voyages à Corner Brook et de dormir deux ou trois heures avant de se présenter à son quart de jour à 9 h. Il a expliqué à quel point les exigences du travail nuisaient à sa santé et a affirmé qu'il éprouvait de plus en plus de difficulté à conduire la nuit en raison de son âge et de sa vue qui baissait. Il a décidé que la meilleure solution pour lui était de prendre sa retraite. Il affirme ne pas avoir démissionné. Il a pris une retraite anticipée parce que le travail devenait trop exigeant pour l'homme de soixante ans qu'il était.

    Le conseil arbitral a conclu que si un prestataire dit éprouver des problèmes de santé au point de n'avoir d'autre solution raisonnable que de quitter son emploi, il devrait avoir recours à de l'aide médicale avant de quitter. Le conseil arbitral a cité le CUB 34976 et, de façon particulière, le passage suivant :

    « J'estime que le prestataire n'a pas agi raisonnablement en ne cherchant pas un avis médical au sujet de ce stress. Une personne raisonnable, dans ces circonstances, aurait consulté un professionnel des services de santé si son stress était tel qu'elle estimait ne plus pouvoir continuer à exercer un emploi donné. »

    Le conseil arbitral a conclu que M. Musseau avait omis de démontrer qu'il avait un motif valable pour quitter son emploi.

    À l'audience, M. Musseau a déclaré qu'il devait quitter son emploi parce qu'il lui était impossible de ne travailler que le jour. Il a soutenu que pendant ses quarts de nuit, il devait soulever des personnes et, parfois, en transporter sur une civière sur deux ou trois étages. Il a aussi dit qu'à certains moments, il devait même transporter des charges pouvant aller jusqu'à 300 livres. À force de soulever ainsi des malades et d'exécuter de telles tâches, il a commencé à éprouver des maux de dos. Il a expliqué que la situation aurait été différente s'il avait pu obtenir un horaire de jour, car, pendant ses quarts de jour, s'il devait se rendre à l'hôpital pour y chercher des malades, ces derniers étaient placés sur une civière et transportés jusqu'à l'ambulance par le personnel de l'hôpital. Le prestataire a affirmé que les quarts de nuit étaient ceux qui exigeaient le plus d'effort physiques.

    J'ai étudié l'appel et observé M. Musseau. C'est une personne plutôt mince, et il avait 60 ans lorsqu'il a quitté son emploi. Je peux admettre d'office en justice le fait que les personnes de 60 ans n'ont pas la force et l'endurance qu'ont les plus jeunes. À un moment donné, le travail pénible ne convient plus aux personnes de cet âge. Il existe de nombreux exemples du genre dans notre société; on n'a qu'à penser aux personnes qui travaillent dans les services d'incendie, les services militaires, les services de police et ainsi de suite. Il est vrai que M. Musseau n'avait pas de certificat médical pour soutenir sa preuve, mais je suis convaincu que s'il était allé voir un médecin et avait expliqué sa situation, il n'aurait probablement pas eu de problème à obtenir une lettre du médecin à l'appui de sa prise de position.

    Après avoir étudié tous les faits de la présente affaire, je conviens qu'ils sont tels que le conseil arbitral aurait dû accueillir l'appel du prestataire puisque celui-ci a clairement soutenu que son employeur n'était pas d'accord pour lui accorder un horaire de jour comme il le lui avait demandé, ce qui lui aurait permis de continuer de travailler sans problème.

    Je conclus que M. Musseau avait d'un motif valable en vertu des paragraphes 29(xiv) et 29 (iv), qui stipulent respectivement : « toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement » et « conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité ».

    Le procureur de la Commission a souligné que M. Musseau avait omis de communiquer avec la Commission des normes du travail. Je suis d'avis que les citoyens ne sont pas tous au courant des possibilités qui leur sont offertes pour que la situation qu'ils vivent par rapport à leur emploi soit redressée. La plupart de ces renseignements sont fournis par des groupes syndiqués ou des personnes qui ont vécu une expérience du genre.

    Pour ces raisons, l'appel est accueilli, et la décision du conseil arbitral est annulée.

    David G. Riche

    Juge-arbitre

    St. John's (Terre-Neuve)
    Le 15 juillet 2001

    2011-01-16