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  • CUB 52857

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d'une demande de prestations présentée par
    HEATHER RICHARDSON

    - et -

    d'un appel interjeté auprès d'un juge-arbitre par la prestataire à
    l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à
    North York (Ontario) le 18 avril 2001.

    Appel entendu à Toronto (Ontario) le 30 octobre 2001.

    DÉCISION

    LE JUGE-ARBITRE R.C. STEVENSON

    Mme Richardson interjette appel à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral qui a rejeté son appel d'une décision de la Commission selon laquelle elle n'avait pas droit aux prestations à compter du 15 mars 1992 parce qu'elle exploitait une entreprise. Son appel a d'abord été entendu le 7 mars 1996 par un conseil arbitral qui a rejeté son appel. Le 7 octobre 1997, le juge-arbitre Murdoch a accueilli un appel et renvoyé l'affaire à un nouveau conseil arbitral pour décider si Mme Richardson était travailleuse indépendante entre le 15 mars et le 21 octobre 1992. Elle a admis que c'était le cas pour la période subséquente au 21 octobre.

    L'affaire n'a pas été réentendue par un conseil arbitral avant le 18 avril 2001, principalement en raison des demandes d'ajournements et de suspensions faites par l'avocat de Mme Richardson en attendant la conclusion d'une poursuite civile de sa cliente contre la Commission.

    L'affaire doit être tranchée en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. L'article 10 de cette Loi stipule qu'une semaine de chômage est une semaine dans laquelle un prestataire ne travaille pas une semaine entière de travail. Le paragraphe 43(1) du Règlement sur l'assurance-emploi stipule que si un prestataire est travailleur indépendant ou engagé dans l'exploitation d'une entreprise pour son propre compte, il doit être considéré comme travaillant une semaine entière de travail. Le paragraphe 43(2) fait une exception, c'est-à-dire dans le cas où l'emploi en est un auquel si peu de temps est consacré qu'une personne ne le ferait normalement pas comme principal moyen de subsistance et elle est alors considérée comme ne travaillant pas une semaine entière de travail.

    Dans une décision antérieure1, le juge Dubé, siégeant comme juge-arbitre, a établi six facteurs pertinents à considérer pour déterminer si un travail indépendant est un emploi auquel peu de temps est consacré, soit :

    En 1995, la Cour d'appel fédérale2 a déclaré que le facteur le plus important, le plus pertinent et le seul à prendre en compte doit être, dans tous les cas, le temps consacré.

    Dans la présente affaire, le conseil arbitral s'exprime ainsi :

    Dans la pièce 7-3, l'appelante affirme qu'en mars 1992, elle consacrait environ 2 ou 3 jours par semaine, en moyenne 3 heures par jour, à l'installation du bureau de la franchise, « soit beaucoup de temps », a-t-elle admis. L'appelante a indiqué qu'elle se renseignait sur l'équipement et l'industrie, le conseil conclut qu'il s'agit d'une période de « formation ».

    La pièce 7-1, une copie de l'enregistrement du nom de l'entreprise, montre clairement que l'appelante a enregistré une entreprise le 19 mars 1992. La pièce 7-4 montre également qu'en mars 1992, l'appelante a enregistré une entreprise ou une société et a ouvert un compte bancaire au nom de l'entreprise.

    Le conseil accorde beaucoup de poids aux pièces 7-1, 7-3 et 7-4.

    Le conseil conclut que la formation de l'appelante comme travailleuse autonome ou autrement la rend non disponible pour travailler.

    Le conseil conclut également que l'enregistrement du nom d'une entreprise et l'ouverture d'un compte bancaire pour cette entreprise correspondent à un travail indépendant.

    Après avoir pondéré soigneusement tous les éléments de preuve dont il dispose et avoir considéré les critères légaux établis dans les pièces 13-2 et 13-3, selon la prépondérance des probabilités, le conseil conclut qu'il est très probable que l'appelante était en fait travailleuse indépendante au cours de la période en question.

    Le conseil a tiré une conclusion de fait erronée en ce qui concerne l'ouverture du compte bancaire - il n'a pas été ouvert avant le 11 mai. Le conseil a erré en droit pour au moins deux aspects, premièrement, il a confondu la question du travail indépendant avec celle de la disponibilité. Deuxièmement, et aspect encore plus important, il n'a pas tiré une conclusion quant à savoir si, pendant la période en question, en tout ou en partie, le travail autonome de Mme Richardson était un emploi auquel peu de temps est consacré.

    En raison de l'âge de ce dossier, et comme il n'y a aucune contestation réelle des faits et aucun problème de crédibilité, je rendrai la décision que le conseil aurait dû rendre.

    Je conclus tout d'abord que certains des facteurs du travail autonome étaient présents dès le mois de mars – l'enregistrement du nom de l'entreprise et le temps consacré à la formation avec le franchiseur, The Answer Plus.

    Les pièces 5 et 7 indiquent que Mme Richardson a consacré de six à neuf heures par semaine de mars à mai pour obtenir la franchise et apprendre le fonctionnement du service de réponse. De mai à septembre, elle a consacré neuf à 12 heures par semaine à des campagnes de marketing d'essai, travaillant avec une autre personne pour rencontrer les clients actuels et éventuels et entreprenant une activité de vente à temps partiel chez elle. Elle a signé une lettre d'intention en août et un contrat de franchise le 21 octobre. Par la suite, elle a consacré 40 heures par semaine à l'entreprise.

    Elle a commencé à réaliser des ventes en mai. Les ventes nettes de ce mois ont été de 899,60 $. De juin à septembre, les ventes nettes se sont situées entre 1 972,81 $ et 3 852,22 $. En octobre, les ventes ont été de 5 456,35 $ et elles sont demeurées au-dessus de ce chiffre chaque mois jusqu'en avril 1993, le dernier mois pour lequel les chiffres sont disponibles dans le dossier. L'entreprise a commencé à réaliser un profit, c'est-à-dire un revenu net, en septembre 1992.

    Il est clair que le temps consacré au début (de mars à mai) était inférieur au temps qu'une personne moyenne consacrerait à une activité entreprise normalement comme principal moyen de subsistance. La difficulté pour un conseil arbitral ou un juge-arbitre dans un tel cas consiste à déterminer si la prestataire a traversé la ligne entre un travail autonome qui est un emploi auquel peu de temps est consacré à celui où on peut dire que l'activité serait normalement son principal moyen de subsistance.

    Bien que nécessairement fondée sur les faits, la décision est arbitraire dans une certaine mesure. Dans ce cas, un poids doit être accordé à la preuve quant au temps consacré et également à l'augmentation des ventes à compter d'octobre.

    Je conclus que Mme Richardson était travailleuse autonome à compter du 15 mars 1992 mais qu'elle a consacré peu de temps à son emploi du 15 mars au 30 septembre 1992.

    L'appel est accueilli et l'inadmissibilité est annulée pour la période du 15 mars au 30 septembre 1992.

    Ronald C. Stevenson

    Juge-arbitre

    Fredericton (Nouveau-Brunswick)
    Le 13 novembre 2001



    1CUB 5454 (Schwenk)
    2Canada (Procureur général) c. Jouan, 179 N.R. 127. 2011-01-16