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  • CUB 53563

    TRADUCTION

    DANS L’AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d'une demande de prestations présentée par
    JULIE ANNE BROWN

    - et -

    d'un appel interjeté auprès d’un juge-arbitre par la prestataire à
    l'encontre de la décision d’un conseil arbitral rendue à
    Regina (Saskatchewan) le 3 mai 2001.


    DÉCISION



    LE JUGE-ARBITRE RICHE


    Plusieurs questions en litige ont été portées à la connaissance du conseil arbitral, à savoir :

    1. si la prestataire a quitté l'emploi qu'elle occupait au Travel Lodge (Regina) le 11 mai 1998 sans motif valable;

    2. si elle a sciemment omis de déclarer qu'elle avait quitté son emploi, entraînant ainsi l'imposition d'une pénalité;

    3. s'il y a lieu d'évaluer la violation conformément aux dispositions de l'article 7.1 de la Loi sur l'assurance-emploi;

    4. si la rémunération non déclarée de 44,42 $ devrait modifier la demande de prestations.


    Les faits en l'espèce sortent de l'ordinaire. La prestataire a présenté une demande de prestations le 12 janvier 1998, et sa période de prestations a débuté le 21 décembre 1997. Elle a travaillé pour le compte de W.W. Enterprises, à Regina, entre les mois d'août 1992 et août 1997. Elle a quitté son emploi en raison d'une fracture de la cheville. Elle comptait effectuer un retour au travail en janvier 1998. Elle s'est quelque peu absentée de son travail entre mars et avril en raison d'une blessure à un bras. Au moment de présenter sa demande, elle ne travaillait pas en raison d'une blessure subie le 1er janvier 1998.

    La feuille de détection de trop-payé a révélé qu'elle avait travaillé durant une journée au cours du mois de mai 1998 au Regina Travel Lodge. On a demandé des renseignements et, en réponse à cette demande, on a reçu un relevé d'emploi portant la mention « a quitté son emploi »; aucune raison n’était fournie. On a envoyé une lettre à la prestataire pour lui demander si elle avait travaillé au Airline Motor Hotels et touché une rémunération de 44,42 $. On lui a aussi demandé de fournir la raison de son départ et de préciser pourquoi elle a indiqué sur ses cartes de déclaration qu'elle n'avait pas travaillé. Le problème pour la prestataire tient au fait qu'elle n'a jamais travaillé pour Airline Motor Hotels, car en réalité elle a travaillé au Regina Travel Lodge. Elle ne pouvait pas savoir que l'entreprise Airline Motor Hotels était propriétaire du Regina Travel Lodge.

    Au cours de l'audience devant le soussigné et devant le conseil arbitral, la prestataire a soutenu qu'elle s'est rendue au Travel Lodge pour constater si elle était en mesure d'effectuer les tâches requises. Elle y a travaillé durant une journée pour voir si elle était capable d'accomplir ce travail. Le lendemain, elle était incapable de porter des vêtements sur le haut de son corps en raison de l'enflure de son bras. En outre, elle ne s’est pas rendu compte qu'elle recevrait une rémunération puisqu'il ne s'agissait que d'une seule journée et qu'elle désirait constater si elle était en mesure d'accomplir les tâches liées à ce travail. Elle n'est jamais retourné travailler à cet endroit. De plus, elle ne croyait pas qu'elle devait préciser qu'elle quittait cet emploi puisqu'elle ne considérait pas qu'elle avait été officiellement embauchée.

    Le conseil arbitral a conclu que la Commission disposait de preuves démontrant que la prestataire a travaillé durant une journée au Travel Lodge et qu'elle a omis de déclarer ce travail ou qu'elle l'a quitté après la première journée. Le conseil arbitral a conclu à la crédibilité du témoignage de l'appelante au cours de l'audience, particulièrement en ce qui concerne la façon dont il se rattache au fait de ne pas être en mesure d'accepter un emploi au Travel Lodge en raison de problèmes médicaux (incapacité de soulever des charges). Cependant, la conclusion du conseil arbitral s'appuie sur l'explication fournie, ou celle qui fait défaut, et sur le fait qu'elle a accepté la rémunération qui lui a été versée en contrepartie du travail accompli à l'hôtel sans se rendre compte qu'elle avait travaillé, qu'elle a bel et bien été rémunérée pour ce travail et qu'elle a omis d'en informer la Commission. L'appel a été rejeté en vertu des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi. Par la suite, le conseil arbitral a conclu que, en raison du stress subi par l'appelante à la suite de la rupture de son mariage, d'une fracture à la cheville, d'un accident de voiture et d'un diagnostic lié au syndrome du tunnel carpien, elle ne serait vraisemblablement pas en mesure de payer la pénalité ni de rembourser le trop-payé. Le conseil a respectueusement suggéré de laisser tomber les questions relatives au trop-payé et à la pénalité.

    La mère de la prestataire s'est présentée en son nom devant le soussigné. Elle a répété fondamentalement les mêmes arguments qu’avait présentés la prestataire au cours de l'audience devant le conseil arbitral. J'ai examiné les présentations et je conviens que la preuve portée à la connaissance du conseil arbitral ne vient pas appuyer la conclusion qu'il a tirée. À cet égard, je crois qu'il y a lieu de dire que le conseil a tiré une conclusion arbitraire sur les faits. Cette constatation repose sur la conclusion de fait tirée par le conseil arbitral relativement à la crédibilité du témoignage de l'appelante. Le conseil n’a semblé éprouver des difficultés qu'avec le fait que la prestataire a accepté un chèque de 44 $ et qu'elle l'a encaissé sans savoir qu'il s'agissait d'une rémunération pour avoir tenté de se trouver un emploi au Travel Lodge. Elle a tout simplement encaissé le chèque de façon automatique. En outre, sa mère m'a fait remarquer que, en vertu de l'alinéa 19(2)a), la prestataire pouvait toucher une rémunération jusqu'à concurrence de 50 $. Cependant, la rémunération doit tout de même être déclarée.

    Dans la présente affaire, il me semble que la prestataire n'a pas réellement été embauchée puisqu'elle s'est rendu travailler au Travel Lodge à titre d'essai. Le conseil arbitral a conclu que la prestataire était crédible, si bien que, si elle doit être cru, alors elle n'a pas réellement été embauchée puisqu'elle n'a pas quitté cet emploi, et ce, même si un formulaire a été rempli. Il n'existe aucune preuve démontrant qu'elle a informé l’employeur de son intention de quitter son emploi pour la simple raison qu'elle n’avait jamais été embauchée. Puisqu’il en est ainsi, les questions en litige nos 1, 2 et 3 auraient certainement dû être tranchées en sa faveur lorsqu'elle a déclaré qu'elle n'avait ni travaillé ni quitté son emploi, et elle aurait dû se voir accorder le bénéfice du doute particulièrement parce qu'on a conclu à sa crédibilité.

    Bien qu'il soit vrai qu'elle a omis de déclarer une rémunération au montant de 44,42 $, il s'agit d'une somme inférieure à celle permise en vertu de l'article 19. Elle a seulement omis d'en déclarer l'existence. Tout au plus, on peut dire que la prestataire a commis cette erreur par mégarde. En effet, il faut considérer que cette personne a été à l'essai durant une journée et a reçu, quelque temps après, un chèque de 44 $ qui pouvait ou non être lié à cet événement précis. Même en supposant qu'elle savait que cette somme était versée en contrepartie de sa journée de travail, elle a pu croire en toute honnêteté qu'elle était en droit de la recevoir puisque le montant était inférieur à la somme maximale permise aux termes de l'article 19. Toutefois, elle était tenue de déclarer cette rémunération.

    Techniquement, de la façon dont je vois les choses, il s'agit de son seul manquement à la Loi. Elle aurait eu avantage à s'informer pour déterminer à quoi s'appliquait cette somme de 44 $ puisqu'elle avait été versée par l'entreprise Travel Lodge, puis de déclarer cette rémunération à la Commission. Puisqu'elle a omis d'agir ainsi et, selon toute probabilité, elle est coupable d'avoir omis de déclarer sa rémunération.

    À la suite de l'examen approfondi de l'affaire et de l'analyse des circonstances entourant la rémunération de 44,42 $, je dirais que l'imposition d'une pénalité est une mesure inappropriée. À mon avis, nous sommes en présence d'une affaire où un simple avertissement aurait suffi et contribué à trancher toutes les questions en litige pour le bénéfice de tous et chacun.

    Des sommes considérables ont été investies relativement à la présente affaire, laquelle, à mon avis, aurait pu être résolue bien avant qu'elle soit portée à la connaissance du conseil arbitral ou du juge-arbitre.

    Pour les motifs précités, j’accueille l’appel de la prestataire relativement aux questions nos 1, 2 et 3. En ce qui concerne la quatrième question en litige, la pénalité devrait être supprimée.


    D.G. Riche

    Juge-arbitre

    St. John’s (Terre-Neuve)
    Le 6 mars 2002

    2011-01-16