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    CUB 54092

    EN VERTU de la LOI sur L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et

    RELATIVEMENT à une demande de prestations par
    Céline DUGAL

    - et

    RELATIVEMENT à un appel interjeté par la Commission de
    l'assurance-emploi du Canada auprès d'un Juge-arbitre à l'encontre de la
    décision du Conseil arbitral rendue le 26 juin 2001 à Montréal, Québec

    DÉCISION

    André Quesnel, juge-arbitre:

    La Commission avait rejeté la demande de prestations parce que la prestataire avait quitté son emploi sans justification.

    Le conseil arbitral a renversé cette décision en retenant que la prestataire avait démontré qu'elle avait quitté son emploi à cause d'une modification importante dans ses fonctions, tel que prévu à l'article 29c) ix) de la Loi sur l'assurance-emploi.

    La Commission plaide que le conseil arbitral a erré en décidant comme il l'a fait, plus particulièrement en qualifiant d'importantes les modifications apportées aux fonctions de la prestataire alors qu'elle reprenait le travail à la suite d'une absence pour cause d'un accident de travail.

    La prestataire avait été embauchée comme caissière et comme préposée à l'accueil dans un supermarché d'alimentation.

    À son retour, non seulement son horaire de travail a-t-il été modifié pour y inclure des sessions le soir, mais de plus elle a été affecté pour remplacer au besoin une absence au département des viandes où elle devait faire des sandwiches au poulet.

    Elle a fait part de son insatisfaction à son employeur qui lui aurait répondu : « ton horaire n'existe plus, si t'es pas contente, part. »

    De son côté, l'employeur affirme : « elle n'a discuté de rien avant de quitter, si le problème était les heures, cela aurait pu s'arranger. »

    À noter que l'employeur ne fait aucune allusion au changement de département dénoncé par la prestataire.

    Constatant que l'employeur ne faisait rien pour rétablir la situation, la prestataire décide de quitter pour des raisons personnelles après environ deux semaines.

    Le conseil arbitral est le maître dans l'appréciation de la preuve; la Cour d'appel l'a rappelé dans l'affaire Guay1

    De toute façon, dans tous les cas, c'est le conseil arbitral le pivot de tout le système mis en place par la Loi pour ce qui est de la vérification des faits et de leur interprétation - qui est celui qui doit apprécier. Le conseil arbitral ici, sur la base des faits qu'il avait constatés et des témoignages qu'il avait entendus, avait refusé d'admettre que les manquements du requérant, même considérés ensembles, aient pu constituer de l'inconduite au sens de l'article 28 de la Loi, peu importe que l'employeur ait pu trouves là matière à congédiement. Le juge-arbitre, d'après nous, ne pouvait pas rejeter cette conclusion du Conseil sur la seule base d'un raisonnement qui, en somme, ne fait que donner pleine priorité aux vues de l'employeur. "

    Dans l'affaire Ash2, la Cour d'appel fédérale, reconnaît qu'il n'appartient pas à un juge-arbitre de substituer son opinion à celle d'un conseil arbitral :

    " Il ressort clairement de la décision du conseil que l'opinion majoritaire et l'opinion minoritaire avaient toutes deux été examinées à fond. Certes, les tenants de l'opinion majoritaire auraient pu conclure autrement, mais ils ont choisi de ne pas croire la prétention de l'intimé portant qu'il avait quitté son emploi en raison de sa santé. La juge-arbitre ne pouvait substituer son opinion à celle de la majorité. Les membres du conseil étaient les mieux placés et les mieux en mesure d'apprécier la preuve et de tirer des conclusions relativement à la crédibilité. "

    Le conseil arbitral a décidé, à la lumière de la preuve, que la prestataire, après avoir attendu environ deux semaines, était justifiée de quitter son emploi, pour protester contre les modifications jugées importantes, apportées à ses fonctions et à son horaire.

    En affirmant qu'il ne voit aucune raison de ne pas croire la prestataire, le conseil arbitral préfère retenir son témoignage plutôt que celui de l'employeur, en lui donnant le bénéfice du doute. En effet, il est peu vraisemblable que la prestataire ait, selon les termes de l'employeur, quitté son emploi, après un essai de deux semaines d'un nouveau régime, « sans discuter de rien. »

    Cependant, dans l'affaire D.Landry3, la Cour d'appel fédérale a écrit :

    « Depuis l'adoption du nouvel article 284, de la Loi sur l'assurance-chômage, dans un cas comme celui-ci, le conseil arbitral n'a pas à se demander s'il trouve raisonnable la conduite du prestataire; il doit plutôt se demander si le prestataire a quitté son emploi dans l'une ou l'autre des circonstances décrites aux alinéas a) à e) du paragraphe 28(4) de la Loi, et, dans négative, si le départ immédiat du prestataire constituait la seule solution raisonnable dans son cas. »

    Il faut déduire de cette citation, que le conseil arbitral, qui avait conclu que la prestataire était justifiée de quitter son emploi dans les circonstances prévues au paragraphe 29 c) ix) de la Loi, n'avait pas à se poser la question de savoir si c'était la seule solution raisonnable dans son cas.

    La conclusion à laquelle le conseil arbitral est arrivé n'est donc pas erronée, et il n'y a pas lieu d'intervenir pour la modifier.

    En conséquence, l'appel est rejeté.

    André Quesnel

    Juge-arbitre.

    Montréal, Québec
    Le 15 mars 2002.



    1M. Guay (A-1036-96)
    2S. Ash (115-94)
    3D. Landry (A-1210-92)
    4art 29 de la Loi actuelle 2011-01-16