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  • CUB 55173


    EN VERTU DE LA LOI sur L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    RELATIVEMENT à une demande de prestations par
    Clément FORTIN (et autres)

    - et -

    RELATIVEMENT à un appel interjeté par la Commission de l'assurance-emploi du Canada auprès d'un Juge-arbitre à l'encontre de la décision du Conseil arbitral rendue le 13 février 2002 à Baie Comeau, Québec

    DÉCISION

    André Quesnel, juge-arbitre :

    La Commission a décidé qu'elle ne pouvait payer des prestations régulières au prestataire parce qu'il avait quitté son emploi chez Abitibi Consolidated inc. sans justification, alors que ce départ n'était pas la seule solution raisonnable.

    Le conseil arbitral a renversé cette décision en invoquant les dispositions de l'article 51 du Règlement sur l'assurance-emploi qui, selon lui, ont été respectées.

    Art 51(1) «Sous réserve de la Loi et des autres dispositions du présent règlement, et malgré l'article 30 de la Loi, le prestataire qui a quitté son emploi dans le cadre d'une compression du personnel, effectuée par l'employeur et ayant pour effet de protéger l'emploi d'autres employés, peut recevoir des prestations si :
    a) d'une part, il a accepté l'offre de quitter volontairement cet emploi;
    b) d'autre part, l'employeur a confirmé que ce départ a effectivement eu pour effet de protéger l'emploi d'un autre employé, lequel emploi aurait autrement cessé dans le cadre de la compression du personnel.»
    Art 51(2) «Pour l'application du paragraphe (1), une compression du personnel est une mesure :
    a) qui est instituée par l'employeur;
    b) qui vise à réduire de façon permanente l'effectif global;
    c) qui offre aux employés le choix de quitter volontairement leur emploi;
    d) dont les caractéristiques, y compris celles visées aux alinéas a) à c), figurent dans des documents établis par l'employeur. »

    En appel, la Commission plaide que le conseil arbitral a erré en fait et en droit en se prononçant comme il l'a fait sur l'abandon volontaire de son emploi par le prestataire. Elle argumente que les dispositions de l'article 51 n'ont pas été respectées par les parties aux présentes.

    L'employeur prévoyait une coupure de 30 postes dans le but de réduire l'effectif.

    Une entente est intervenue, par laquelle l'employeur créait, à partir de postes permanents à temps plein, une banque de travailleurs saisonniers dans le but de répondre à un besoin supplémentaire de main-d'oeuvre durant la période du premier juin au premier novembre de chaque année. Ainsi, l'employeur gardait à plein temps des employés plus jeunes qui autrement auraient été mis à pied à la fin de la saison, soit au début de novembre.

    Comme l'article 51(2) fait référence à une réduction permanente de l'effectif global; la Commission prétend que la mesure instituée par l'employeur ne répond pas à cette exigence, en ce sens que cette mesure ne visait qu'à déterminer quel groupe d'employés sera mis à pied à la fin de chaque saison.

    Il s'agit donc, selon elle, d'une mise à pied temporaire en ce que l'employé qui a choisi d'adhérer à cette banque de travailleurs saisonniers doit reprendre son travail au début de la saison estivale et ce pour une durée maximale de cinq saisons; il reste donc sur la liste des employés de la compagnie et l'effectif global n'est pas réduit de façon permanente par l'application de cette mesure.

    Il faut retenir que l'employeur à coupé 30 postes de façon permanente. Dans le cas de ceux qui ont été affectés par ces coupures, ils ont quitté définitivement leur emploi pour prendre leur retraite et ils n'ont pas été remplacés. En ce sens, le programme d'incitation à la retraite mis sur pied par l'employeur, est une mesure qui rencontre les dispositions réglementaires ci-dessus mentionnées, ce qui n'était pas le cas pour ceux qui abandonnaient librement leur statut de travailleurs permanents pour devenir employés saisonniers. Pour ces derniers, le lien d'emploi n'était brisé que temporairement et non de façon permanente.

    Les employés qui ayant le plus d'ancienneté qui pouvaient abandonner leur permanence, n'étaient nullement obligés d'accéder à ce programme; s'ils y accédaient, c'était le fruit d'une décision personnelle et libre.

    Il s'ensuit que la liste d'effectif ne variait pas de façon permanente par la mise en application de cette mesure et de ce fait, les exigences de l'article 51 n'étaient pas respectées.

    Par contre, le procureur du prestataire argumente que si son client avait décidé de garder son emploi permanent, sa décision aurait eu pour effet la mise à pied permanente d'un employé ayant moins d'ancienneté puisque de toute façon, l'employeur avait décidé de couper 30 postes.

    Cette prétention est d'autant plus bien fondée que lorsque le prestataire a réalisé après coup qu'il n'avait pas droit au bénéfice des prestations d'assurance-emploi, il a réussi à convaincre sont employeur de le reprendre à son service de façon permanente ce qui a automatiquement entraîné le renvoi d'un employé ayant moins d'ancienneté.

    C'est donc dire que la notion de réduction de l'effectif global de façon permanente est omni présente dans l'entente touchant l'incitation à du travail saisonnier pour un certain groupe d'employés dont le prestataire faisait partie.

    Le prestataire a donc quitté son emploi dans le cadre d'une compression du personnel effectuée par l'employeur dans le but de protéger l'emploi d'autres employés; de ce fait le prestataire devient éligible au bénéfice des prestations parce que la mesure incitative instituée par l'employeur visait à réduire de 30 postes de façon permanente l'effectif global.

    Une entente, à laquelle toutes les parties ont donné leur consentement, est intervenue, par laquelle la présente décision s'applique à tous les employés visés dans les dossiers portant les numéros 01-0048 à 01-0057 inclusivement.

    Par les motifs ci-dessus exposés, l'appel de la Commission est rejeté et les prestataires en question sont déclarés éligibles aux prestations d'assurance-emploi selon leurs demandes respectives à partir des dates inscrites dans leurs dossiers d'appel.

    André Quesnel

    juge-arbitre.

    Montréal, Québec,
    Le 29 août 2002.

    2011-01-16