TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
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d'une demande présentée par
GURPREET K. DHILLON
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la Commission de l'assurance-emploi du Canada à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Burnaby (Colombie-Britannique) le 14 juin 2002
DÉCISION
L'honorable RUTH KRINDLE
La Commission conteste la décision d'un conseil arbitral dans laquelle il est établi que la prestataire était fondée à quitter volontairement l'emploi qu'elle occupait à Westfair Foods et qu'elle avait cumulé suffisamment d'heures d'emploi assurable pour être admissible au bénéfice des prestations au sens de l'article 7 de la Loi.
La prestataire occupait deux emplois simultanément en 2001. L'après-midi et le soir, elle travaillait à Sky Chefs; au début, cet emploi était occasionnel. De plus, elle occupait un emploi permanent à temps partiel à Westfair, où elle travaillait le matin. Le fait que la prestataire a quitté volontairement son emploi à Westfair le 23 août 2001 n'est pas contesté. Cependant, il est important de noter que la prestataire a quitté l'emploi à temps partiel qu'elle occupait à Westfair seulement après avoir commencé à travailler à temps plein à Sky Chefs, qui lui offrait un meilleur salaire que Westfair. Elle a commencé à travailler à temps plein en juin 2001. À partir du 26 septembre 2001, la prestataire faisait officiellement partie du personnel permanent de Sky Chefs et occupait un poste à temps plein.
Après le 23 août 2001, la prestataire suivait des cours afin de devenir agente hospitalière; elle allait en classe le matin et l'après-midi, elle travaillait à temps plein à Sky Chefs. À la suite des événements du 11 septembre 2001, l'industrie du transport aérien a connu un important ralentissement et des mises à pied ont eu lieu à Sky Chefs; la prestataire a été mise à pied à la mi-octobre. Après cela, la prestataire a terminé sa formation d'agente hospitalière et a commencé à chercher un emploi dans ce domaine. Depuis, elle a repris ses fonctions à temps plein à Sky Chefs.
La Commission porte en appel la décision du conseil arbitral parce qu'elle considère que la prestataire a quitté l'emploi qu'elle occupait à Westfair sans justification. La Commission considère qu'elle a quitté cet emploi pour suivre un cours. Elle soutient par conséquent que toutes les heures d'emploi accumulées auprès des deux employeurs avant le 23 août 2001 ne peuvent être prises en considération dans la détermination de l'admissibilité de la prestataire au bénéfice des prestations. La Commission maintient que la prestataire était tenue de conserver son emploi à temps partiel à Westfair et ce, malgré le fait qu'elle recevait une meilleure rémunération et qu'elle travaillait à temps plein à Sky Chefs. Apparemment, elle était tenue de conserver indéfiniment son emploi à temps partiel et seul un changement dans les conditions de travail à Westfair l'aurait fondée à quitter cet emploi.
Je ne suis pas du tout de cet avis. L'alinéa 29c) de la Loi prévoit que, pour qu'une personne soit fondée à quitter à quitter un emploi, elle doit avoir « l'assurance raisonnable de trouver un autre emploi dans un avenir immédiat ». La prestataire avait l'assurance raisonnable d'avoir un emploi à temps plein à Sky Chef à partir du 23 août 2001, date à laquelle elle a quitté son emploi à Westfair, et cette assurance a été confirmée puisqu'elle a été nommée officiellement par la suite à un poste à temps plein à Sky Chef. La prestataire ne pouvait raisonnablement pas prévoir les événements du 11 septembre, ni leur répercussion sur son emploi à Sky Chef. Si la prestataire avait quitté son emploi à Westfair pendant qu'elle travaillait de façon très occasionnelle à Sky Chef, on n'aurait pas pu affirmer qu'elle avait une assurance raisonnable d'obtenir un emploi à Sky Chef.
Je ne peux accepter l'interprétation de la Commission, selon laquelle une personne qui occupe deux emplois à temps partiel est tenue de conserver ses deux emplois, sans égard au fait que l'emploi le mieux rémunéré s'apparente presque à un emploi à temps plein. Le sens que l'on donne à l'expression « un autre emploi » dans le sous-alinéa 29c)(vi) doit raisonnablement supposer que l'emploi occupé en même temps qu'un autre a subi un changement si important qu'on pourrait dire qu'il s'agit d'un nouvel emploi. Dans l'affaire en l'espèce, le fait que l'emploi occasionnel de la prestataire à Sky Chefs soit devenu un emploi à temps plein constitue un changement important. Cela fondait la prestataire à affirmer, à partir du 23 août 2001, qu'elle avait l'assurance raisonnable de trouver un autre emploi dans un avenir immédiat et l'autorisait à quitter volontairement l'emploi à temps partiel qu'elle occupait à Westfair.
Le conseil arbitral n'a pas traité de l'exigence de la justification. Je suis d'accord avec la Commission sur le fait que le conseil a simplement réagi à l'injustice inhérente à la position de la Commission. Cependant, les conclusions de fait sur la crédibilité établies par le conseil sont claires, et à la lumière de ces conclusions, je n'ai pas la moindre hésitation à conclure que la prestataire a démontré qu'elle était fondée à quitter l'emploi qu'elle occupait à Westfair. Par conséquent, l'appel est rejeté.
Ruth Krindle
JUGE-ARBITRE
OTTAWA (Ontario)
Le 5 juin 2003