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  • CUB 58234

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    -et -

    d'une demande de prestations présentée par
    Gordon JOHN

    - et -

    d'un appel interjeté par la Commission à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à Whitehorse (Territoire du Yukon) le 28 octobre 2002

    DÉCISION

    Le juge-arbitre GUY GOULARD

    Le prestataire a travaillé pour White River First Nation du 11 avril 2000 au 1er novembre 2001. Le 15 janvier 2002, il a présenté une demande de prestations en déclarant avoir perdu son emploi en raison d'une pénurie de travail. Une demande initiale a été établie en date du 13 janvier 2002. Le prestataire voulait que la demande soit antidatée avec prise d'effet le 2 novembre 2001. La Commission a refusé d'antidater la demande parce qu'elle a déterminé que le prestataire n'avait pas démontré qu'il avait un motif valable pour justifier son retard.

    Le prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant le conseil arbitral qui, par décision unanime, a accueilli l'appel. La Commission a interjeté appel de la décision du conseil devant le juge-arbitre. L'appel a été entendu à Whitehorse (Territoire du Yukon) le 22 août 2003. Le prestataire a assisté à l'audience et la Commission était représentée par Me Ward Bansley.

    Le prestataire a déclaré qu'il n'avait pas présenté immédiatement de demande après avoir perdu son emploi parce qu'il prévoyait être rappelé. Il a expliqué qu'il avait été mis à pied parce que l'employeur attendait le financement nécessaire pour terminer le projet auquel travaillait le prestataire. Il ne voulait pas commencer à toucher des prestations parce qu'il prévoyait revenir rapidement au travail. Il savait qu'il serait ultérieurement mis à pied pour une période indéterminée et il voulait attendre à ce moment pour présenter une demande. Le prestataire n'a jamais laissé entendre qu'il n'était pas au courant de ses droits et obligations. Bien au contraire, le prestataire avait déjà reçu des prestations d'assurance-emploi et il était informé de ses droits et obligations.

    La décision du conseil est libellée comme suit :

    « M. Gordon John a agi raisonnablement et de bonne foi en attendant avant de présenter une demande de prestations d'assurance-emploi. Cette réaction est appropriée compte tenu des conditions de vie dans une petite collectivité du Yukon, sujette à diverses difficultés concernant la main-d'oeuvre, les matériaux et le financement, le mauvais temps, etc.

    Les paragraphes 10(1) et 10(4) ont été évoqués dans cette affaire. Toutefois, nous croyons détenir l'autorité discrétionnaire nécessaire pour autoriser l'antidatation de la période de prestations du prestataire.

    Décision

    Le conseil arbitral accueille l'appel de M. John concernant le refus de la Commission d'antidater sa période de prestations. »

    Dans son appel, la Commission a soutenu que le conseil avait erré en droit en n'appliquant pas le critère des motifs valables pour avoir tardé à demander des prestations. L'avocat de la Commission a déclaré qu'il est bien établi dans la jurisprudence qu'il incombe au prestataire de s'informer au sujet de ses droits et obligations concernant sa demande, et comme il ne l'a pas fait, le prestataire n'a pas agi comme une personne raisonnable l'aurait fait dans les mêmes circonstances. La Commission a fait référence à la décision CUB 51720. Dans cette affaire, le prestataire avait attendu environ six mois avant de présenter une demande de prestations parce qu'il cherchait un emploi. Il a déclaré qu'il n'avait pas compris les règles car il n'avait jamais demandé de prestations.

    Ces faits sont bien différents de ceux qui sont exposés dans la présente affaire. M. John n'a pas prétendu qu'il n'était pas au courant de ses droits et obligations. Il s'attendait à être rappelé au travail sous peu. Lorsqu'il a su qu'il était mis à pied pour une période indéterminée, il a présenté une demande de prestations. Son relevé d'emploi est daté du 10 janvier 2002 et sa demande du 15 janvier 2002.

    La Cour d'appel fédérale, dans les arrêts Larouche (A-644-93) et a précisé Albrecht (A-172-85) que pour déterminer s'il existe un motif valable justifiant la présentation tardive d'une demande de prestations, il faut savoir si le prestataire a agi comme une personne raisonnable aurait fait dans les mêmes circonstances.

    Dans cette affaire, le conseil, qui a tenu compte de la situation particulière dans laquelle se trouvait le prestataire vu qu'il travaillait dans une petite collectivité du Yukon, a déterminé qu'il avait agi de façon raisonnable. Au nombre de ses responsabilités, le conseil arbitral doit tenir compte de toutes les circonstances pertinentes qui sont propres à la communauté. C'est ce que le conseil a fait dans cette affaire, et il a conclu que le prestataire avait agi de façon raisonnable et qu'il avait un motif valable pour avoir tardé à demander des prestations.

    La compétence du juge-arbitre est déterminée par le paragraphe 115(2) de la Loi sur l'assurance-emploi. À moins que le conseil arbitral ait omis d'observer un principe de justice naturelle, qu'il ait commis une erreur de droit ou qu'il ait appuyé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le juge-arbitre doit rejeter l'appel.

    Je ne peux conclure que le conseil arbitral a commis une telle erreur. Le conseil a appliqué le critère approprié tel qu'établi par la Cour d'appel fédérale. Il a conclu, à la lumière des faits qui lui ont été exposés, que le prestataire avait un motif valable pour la présentation tardive de sa demande. La décision du conseil est clairement étayée par les éléments de preuve qui lui ont été présentés.

    Par conséquent, l'appel est rejeté.

    GUY GOULARD

    JUGE-ARBITRE

    Ottawa (Ontario)
    Le 29 août 2003

    2011-01-16