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  • CUB 59311

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d'une demande présentée par
    JASON WHITEDUCK

    - et -

    d'un appel interjeté devant la juge-arbitre par l'employeur, THE RESTORERS GROUP INC., à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à Toronto (Ontario) le 3 décembre 2002

    DÉCISION

    La juge-arbitre KRINDLE

    L'employeur interjette appel de la décision d'un conseil arbitral ayant statué que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi. Ni l'employeur ni le prestataire n'étaient présents à l'audience, bien qu'ils aient été dûment avisés par courrier, à leur dernière adresse connue. Les lettres n'ont pas été retournées. Avec le consentement de la Commission, cet appel a été tranché sur la foi de l'information au dossier.

    Bien qu'elle ne conteste pas la conclusion du conseil quant à la justification, la Commission fait remarquer que le conseil a omis de déterminer si le prestataire avait des solutions autres que de quitter son emploi.

    Le prestataire avait travaillé très en hauteur dans des chantiers de construction, et il a peu à peu développé une acrophobie. Il a déclaré qu'il en était arrivé à un point où sa peur était tellement grande qu'il ne pouvait en discuter avec personne. Il a commencé à mettre en doute les pratiques de l'employeur en matière de sécurité. Le prestataire a présenté au conseil un certificat médical indiquant qu'il n'était plus capable d'occuper son emploi. L'employeur a présenté une preuve réfutant l'existence de problèmes en matière de sécurité et a déclaré que le prestataire n'avait jamais fait état de son acrophobie.

    Le conseil a tenu pour avéré que, alors qu'il travaillait à la construction de la tour du CN, le prestataire avait développé une acrophobie. Il a constaté que le prestataire avait été affecté à un autre chantier, mais que son sentiment d'être en danger avait persisté. Il a constaté que son acrophobie était aiguë au point de nuire à son travail. Le conseil a déclaré que le prestataire était dans un tel état d'esprit qu'il était incapable de discuter de la situation avec son employeur et que ce n'est qu'après avoir quitté son emploi qu'il a consulté un médecin au sujet de ses troubles de santé. Le conseil a clairement constaté que le prestataire était crédible à tous les égards. Il a reconnu que le dossier de l'employeur en matière de sécurité était exemplaire. La crainte qu'éprouvait le prestataire était attribuable à son état et non pas à des manquements de la part de l'employeur au chapitre des pratiques de sécurité.

    Dans son avis d'appel, l'employeur fait état de ses préoccupations au sujet de la crédibilité du prestataire. Le conseil a entendu la déposition de ce dernier. Il savait que, dans les premiers documents que le prestataire a fournis immédiatement après être parti, celui-ci n'avait pas fait état de son acrophobie. Les faits relatifs à la crédibilité du prestataire ont été clairement présentés au conseil et celui-ci les a examinés. Le conseil a conclu à la crédibilité du prestataire, conclusion raisonnablement fondée sur la preuve. Il n'y a aucune raison d'intervenir dans sa décision en ce qui concerne le poids de la preuve ou la crédibilité.

    La question soulevée par la Commission découle des affirmations portant sur les faits figurant dans l'avis d'appel de l'employeur, mais dont le dossier d'appel ne fait mention nulle part ailleurs. Si l'employeur avait une preuve établissant qu'il aurait pu offrir au prestataire un emploi ne l'obligeant pas à travailler en hauteur, il aurait dû la présenter au conseil. Une telle preuve ne peut certainement pas être admissible en tant que nouvelle preuve. En se fondant sur la preuve qui lui a été présentée quant au travail pouvant être offert au prestataire, le conseil a déclaré ceci :

    « Bien que le prestataire n'ait pas parlé de ses inquiétudes à son employeur, le conseil estime que, compte tenu de la situation tout à fait unique que le prestataire devait affronter, celui-ci ne pouvait plus travailler dans cet environnement parce que quelque chose était cassé en lui et qu'il n'arrivait plus à travailler suspendu à quelque 100 à 300 pieds dans les airs. Le conseil constate que le sentiment d'insécurité que vivait le prestataire quand il se trouvait à ces hauteurs l'empêchait d'être un membre productif des effectifs et qu'il n'avait donc d'autre choix que de quitter quand il l'a fait. Dans ces circonstances, le conseil juge raisonnable le comportement du prestataire. »

    Le conseil a manifestement conclu que le prestataire avait démontré qu'il n'avait d'autre solution raisonnable que de quitter son emploi. Selon la preuve qui lui a été présentée, le conseil a été convaincu que « compte tenu de la situation unique qu'il devait affronter », le prestataire n'avait pas d'autre solution raisonnable.

    L'appel est rejeté.

    Ruth Krindle

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA (Ontario)
    Le 18 novembre 2003

    2011-01-16