• Accueil >
  • Bibliothèque de la jurisprudence
  • CUB 59475

    TRADUCTION

    Dans l'affaire de la Loi sur l'assurance-emploi,
    L.C. 1996, ch. 23

    et

    d'une demande de prestations de chômage présentée par
    Suzanne N. Wilkinson

    et

    d'un appel interjeté par la prestataire à l'encontre de la décision rendue par un conseil arbitral à Edmonton (Alberta) le 28 novembre 2002

    Appel instruit à Edmonton (Alberta) le 24 novembre 2003.

    DÉCISION

    LE JUGE-ARBITRE R. C. STEVENSON

    Mme Wilkinson porte en appel la décision d'un conseil arbitral ayant rejeté son appel d'une décision de la Commission selon laquelle elle ne pouvait recevoir de prestations à partir du 2 septembre 2002 parce qu'elle exploitait une entreprise et que par conséquent, elle ne pouvait être considérée comme en chômage.

    Aux termes de l'article 9 de la Loi sur l'assurance-emploi, lorsqu'une personne qui remplit les conditions requises demande des prestations et qu'une période de prestations est établie à son profit, des prestations lui sont payables pour chaque semaine de chômage comprise dans la période de prestations. Le paragraphe 11(1) de la Loi précise qu'une semaine de chômage, pour un prestataire, est une semaine pendant laquelle il n'effectue pas une semaine entière de travail. Les paragraphes 30(1), (2) et (3) du Règlement sur l'assurance-emploi contiennent les dispositions suivantes :

    30. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (4), le prestataire est considéré comme ayant effectué une semaine entière de travail lorsque, durant la semaine, il exerce un emploi à titre de travailleur indépendant ou exploite une entreprise soit à son compte, soit à titre d'associé ou de coïntéressé, ou lorsque, durant cette même semaine, il exerce un autre emploi dans lequel il détermine lui-même ses heures de travail.

    (2) Lorsque le prestataire exerce un emploi ou exploite une entreprise selon le paragraphe (1) dans une mesure si limitée que cet emploi ou cette activité ne constituerait pas normalement le principal moyen de subsistance d'une personne, il n'est pas considéré, à l'égard de cet emploi ou de cette activité, comme ayant effectué une semaine entière de travail.

    (3) Les circonstances qui permettent de déterminer si le prestataire exerce un emploi ou exploite une entreprise dans la mesure décrite au paragraphe (2) sont les suivantes :

    a) le temps qu'il y consacre;

    b) la nature et le montant du capital et des autres ressources investis;

    c) la réussite ou l'échec financiers de l'emploi ou de l'entreprise;

    d) le maintien de l'emploi ou de l'entreprise;

    e) la nature de l'emploi ou de l'entreprise;

    f) l'intention et la volonté du prestataire de chercher et d'accepter sans tarder un autre emploi.

    Mme Wilkinson travaillait comme aide-comptable pour Triple G Construction Inc. En septembre 2001, elle a commencé à suivre un cours par correspondance dans l'intention de devenir comptable professionnelle. En octobre 2001, elle a constitué en société une entreprise qui a conclu un accord visant à fournir des services de tenue de livres à Triple G. Mme Wilkinson s'est fait quelques autres clients et, pour diverses raisons, elle a mis fin à ses relations avec Triple G le 31 août 2002. Elle a continué à exploiter son entreprise.

    Le conseil arbitral n'a pas examiné expressément les facteurs énoncés au paragraphe 30(3) du Règlement, ni tiré de conclusions à leur égard, commettant en cela une erreur de droit.

    Je pourrais à juste titre renvoyer l'affaire devant un conseil arbitral pour qu'elle soit instruite à nouveau, mais Mme Wilkinson me demande de rendre la décision que le conseil aurait dû rendre, et l'avocat de la Commission est lui aussi d'avis que je devrais examiner les six facteurs en question.

    Temps consacré

    Dans sa demande de prestations, Mme Wilkinson a souligné les difficultés qu'elle avait à donner à Triple G le temps qu'il demandait. Elle disait notamment « En juillet, j'ai demandé à mon employeur de changer les heures parce que j'avais maintenant trop de clients pour travailler à plein temps le jour et la nuit » [Traduction]. Dans le questionnaire relatif au travail indépendant qu'elle a rempli le 5 septembre 2002, elle a indiqué qu'elle consacrait en moyenne 40 heures par semaine à l'entreprise. Interrogée au téléphone par un employé de la Commission le 5 novembre, elle a répondu qu'elle avait six clients et qu'elle était très occupée au début du mois « puis ça retombait tranquille » [Traduction]. Dans sa lettre d'appel au juge-arbitre, elle nie avoir dit au conseil arbitral qu'elle travaillait 40 heures par semaine et soutient qu'elle travaillait parfois 40 heures, jusqu'à un maximum de 50 heures, et parfois moins que cela chaque mois. Elle employait une personne. Il n'y a pas d'indication des heures travaillées par cette personne ni du salaire qu'elle touchait.

    Nature et montant du capital et des autres ressources investies

    Mme Wilkinson a investi 8 000 $ pour un télécopieur et un ordinateur. Elle travaille chez elle.

    Réussite ou échec financiers de l'entreprise

    Le dossier ne contient pas d'états financiers, c'est-à-dire aucune information concernant le revenu et les dépenses de l'entreprise. Mme Wilkinson n'a tiré aucun revenu de quelque nature que ce soit de l'entreprise. Dans sa lettre d'appel au conseil arbitral, elle précisait « l'entreprise ne fait pas assez d'argent pour couvrir plus que ses dépenses pour l'instant » [Traduction].

    Maintien de l'entreprise

    Au moment de l'audience devant le conseil arbitral, la preuve permettait d'établir que l'entreprise continuait alors ses activités.

    Nature de l'entreprise

    L'entreprise était engagée dans la prestation de services de tenue de livres, ce qui était compatible avec l'expérience professionnelle de Mme Wilkinson.

    Intention et volonté de M me Wilkinson de chercher et d'accepter sans tarder un autre emploi

    Comme l'a noté le conseil arbitral, la preuve montrait que Mme Wilkinson visait à long terme à travailler à son compte, mais qu'elle était prête à prendre un emploi à temps plein si elle pouvait trouver des services de garde appropriés pour ses enfants.

    Conclusion

    Mme Wilkinson a lancé une petite entreprise dans une petite communauté. À la lumière des six facteurs, je conclus, selon la prépondérance de la preuve, qu'elle était engagée dans l'exploitation d'une entreprise dans une mesure si limitée qu'une personne ne compterait normalement pas sur cela comme principal moyen de subsistance.

    L'appel est accueilli, et l'inadmissibilité est annulée.

    RONALD C. STEVENSON

    Juge-arbitre

    FREDERICTON (NOUVEAU-BRUNSWICK)
    Le 6 janvier 2004

    2011-01-16