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  • CUB 60134

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Nanaimo (Colombie-Britannique) le 18 octobre 2000

    DÉCISION

    Le juge-arbitre en chef désigné ROULEAU

    Cet appel a été interjeté par la prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral qui a conclu qu'elle n'était pas admissible au bénéfice des prestations parce qu'aucune prestation ne peut être versée à une enseignante durant une période de congé, aux termes du paragraphe 33(2) du Règlement sur l'assurance-emploi. La prestataire n'a pas demandé d'audience. L'affaire sera donc instruite sur la foi du dossier.

    Les faits ayant conduit au présent appel sont explicites. La prestataire a fait une demande de prestations le 30 juin 2000 après qu'elle eut été mise en disponibilité comme monitrice à l'éducation permanente, dans le district scolaire. Après avoir reçu la demande, la Commission a communiqué par téléphone avec l'employeur afin de discuter de la situation d'emploi de la prestataire. L'enregistrement de cette conversation téléphonique est consigné à la pièce 5, dont voici un extrait :

    « J'ai précisé que la prestataire est monitrice à l'éducation permanente et non pas aide-enseignante.

    La prestataire aide les enseignants dans les cours de perfectionnement des adultes qui sont inscrits à un programme adapté à leur rythme personnel, ce qui inclut certains éléments d'enseignement sous la supervision d'un enseignant; la monitrice note les documents, effectue des tâches de bureau, consigne les présences et discute avec les étudiants de leurs progrès. Les enseignants sont responsables de l'organisation du programme, de la constitution des classes, de la notation, etc. La prestataire n'est donc pas enseignante selon leur définition mais elle apporte plutôt son aide à l'enseignant et elle fait partie du SCFP. »

    [Traduction]

    Dans une lettre datée du 26 juillet 2000, la Commission a informé la prestataire qu'elle ne pouvait lui verser des prestations pour la période du 3 juillet au 18 août 2000, puisque aucune prestation ne peut être versée aux enseignants durant une période de congé. La prestataire a porté cette décision en appel devant le conseil arbitral, au motif qu'elle n'était pas une enseignante, mais plutôt une assistante en éducation travaillant avec les adultes, dans le cadre d'un programme d'éducation permanente. Le conseil arbitral a rejeté l'appel pour les motifs suivants :

    « Le membres du conseil ont examiné la preuve exposée lors du présent appel et sont convaincus que, si l'on applique la définition de l'« enseignement » donnée au paragraphe 33(1) du Règlement à ladite preuve, on ne peut que conclure que la prestataire exerce un emploi dans l'enseignement.

    Une abondante jurisprudence confirme que, dans ces circonstances, il faut conclure que la prestataire n'est pas admissible au bénéfice des prestations pour la période du 3 juillet au 18 août 2000 (voir en particulier la décision CUB 49194 et la jurisprudence qui y est citée). »

    [Traduction]

    La prestataire porte maintenant cette décision en appel devant le juge-arbitre, alléguant que le conseil a commis une erreur en statuant qu'elle était enseignante et qu'elle n'était donc pas admissible au bénéfice des prestations durant une période de congé. Dans son argumentation, la Commission a déclaré que « [L]orsqu'elle doit juger si un prestataire est un « enseignant » dans le contexte de la loi, la Commission soutient qu'il importe peu que l'enseignement ait lieu dans une école ou ailleurs, que l'enseignant soit qualifié d'« enseignant » ou d'un autre titre comme par exemple « moniteur », ou que les étudiants soient des enfants, des adolescents ou des adultes. » [Traduction].

    Selon moi, cet argument est inexact et ne s'appuie pas sur une bonne interprétation de la loi. Il n'y a aucune raison impérieuse de donner au terme « enseignement » apparaissant à l'article 33 du Règlement un autre sens que son sens ordinaire, c'est-à-dire celui de profession d'enseignant exercée par une personne dans l'enseignement. Un enseignant, comme c'est le cas pour les membres de toutes les autres professions reconnues, est une personne qui a reçu la formation requise et possède les qualités nécessaires qui lui permettent de se qualifier d'enseignant, et de se présenter à des employeurs éventuels comme tel. Ce terme n'inclut pas, contrairement à la prétention de la Commission, les personnes qui, comme la prestataire, apportent leur aide ou leur assistance à des enseignants.

    La Commission n'a pas été en mesure d'appuyer son argument selon lequel la prestataire devrait être considérée comme une enseignante aux termes du paragraphe 33(1) du Règlement. Même si la Commission a effectivement invoqué une affaire (décision CUB 43503) dans laquelle la prestataire avait allégué qu'elle n'était pas enseignante parce qu'elle exerçait des fonctions de conseillère, cette affaire peut être considérée espèce différente de celle qui nous occupe, car la prestataire dans cette affaire était réellement une enseignante qualifiée. Comme l'a déclaré le juge-arbitre « [i]l est évident que seule une personne qualifiée pour enseigner serait employée pour exercer les fonctions de conseillère. »

    Je signale également que le Règlement sur l'assurance-emploi et le Guide de la détermination de l'admissibilité de la Commission viennent appuyer mon interprétation de l'article 33 du Règlement. Le chapitre 14.2.1 du Guide est ainsi libellé :

    Aux termes du Règlement, l'enseignement désigne uniquement la profession dans une école maternelle, primaire, intermédiaire ou secondaire, notamment dans une école de formation technique ou professionnelle. La définition s'applique à toute personne qui enseigne aux niveaux ou dans les écoles énumérés, quel que soit le temps consacré à l'enseignement ou la matière enseignée.

    De plus, la définition ne s'applique pas seulement aux enseignants et aux enseignantes qui travaillent pour une commission scolaire provinciale ou municipale : elle comprend aussi le personnel enseignant qui travaille dans les écoles privées ou indépendantes. Toutefois, le personnel enseignant des autres niveaux, notamment universitaire et collégial, n'est pas inclus dans cette définition et est soumis aux mêmes règles que les autres prestataires.

    Finalement, les éléments de preuve au dossier montrent que les personnes dans la même situation que la prestataire n'ont jamais été auparavant considérées comme des enseignants aux fins des prestations de l'assurance-emploi. Dans une lettre à la Commission datée du 29 août 2000 (pièce 11), le directeur des services aux étudiants du district scolaire explique ce qu'était l'emploi de la prestataire et se demande pourquoi celle-ci et une autre prestataire, dans les mêmes circonstances, ont été considérées comme enseignantes, alors que des collègues occupant le même poste ne l'ont pas été. Voici un extrait de cette lettre :

    « On m'a signalé que ces deux employées sont classées comme "enseignantes" aux termes de l'article 33 du Règlement sur l'assurance-emploi et qu'elles sont donc inadmissibles à des prestations.

    Veuillez vous assurer que ces postes à notre Service de l'éducation permanente sont classés comme "aide-enseignant" ou, comme ils sont qualifiés dans notre district "assistante en éducation". Sur les diverses affiches que nous avons utilisées au cours des années, il a été clairement indiqué que de tels employés ont un rôle "d'encadrement et de soutien" auprès des étudiants adultes. Dans tous les cas, ces employés relèvent des enseignants du Centre.

    Il y aurait lieu de signaler que nous avons en fait, au cours des années, changé le titre d'"assistant en éducation" pour celui de "moniteur" pour des raisons de nature sociale. Bon nombre de nos étudiants adultes retournent aux études après avoir eu pendant de nombreuses années des perceptions et des sentiments négatifs à l'égard des établissements d'enseignement. Souvent, les effets secondaires "négatifs" découlant du fait d'avoir besoin du soutien d'une "assistante en éducation" nous ont amenés à diminuer les appréhensions, que nous avons surmontées en changeant le titre du poste pour celui de "moniteur".

    Étant donné que je suis responsable de tous les assistants en éducation (aides-enseignants) dans notre district scolaire, je suis quelque peu décontenancé par le fait que ces deux personnes soient jugées inadmissibles à leurs prestations, alors que toutes les autres ont été acceptées. »

    (soulignement ajouté)

    [Traduction]

    Pour toutes ces raisons, je suis convaincu que le conseil arbitral a commis une erreur de droit et de fait lorsqu'il a statué que la prestataire était une enseignante et qu'elle n'était donc pas admissible au bénéfice des prestations, aux termes de l'article 33 du Règlement. La décision du conseil est par la présente annulée et la demande de prestations de la prestataire devra être traitée conformément aux règles qui s'appliquent aux prestataires ordinaires.

    Le juge Rouleau

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA (Ontario)
    Le 16 avril 2004

    2011-01-16