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  • CUB 60288

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    et

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par l'employeur
    à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
    Montréal, Québec le 27 mars 2003

    DÉCISION

    Le juge-arbitre GUY GOULARD

    Le prestataire a travaillé du 19 juin 2000 au 17 octobre 2002. Le 20 octobre 2002, il a renouvelé sa demande. La Commission a, par la suite, déterminé que le prestataire avait quitté son emploi volontairement sans justification et que son départ ne constituait pas la seule solution raisonnable dans ce cas. La Commission lui a imposé une période d'inadmissibilité à compter du 20 octobre 2002.

    Le prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant le conseil arbitral qui a, à l'unanimité, accueilli l'appel. L'employeur a interjeté appel de cette décision devant le juge-arbitre. Cet appel a été entendu à Montréal (Québec), le 4 février 2004. Le prestataire était représenté et l'employeur aussi. La Commission n'est pas intervenue dans cet appel.

    Le prestataire avait indiqué (pièce 6) qu'il avait quitté son emploi parce qu'il craignait pour sa santé en raison du rayonnement sur le lieu de travail. L'employeur était d'avis que le prestataire avait quitté son emploi parce qu'on lui avait refusé une augmentation de salaire. L'employeur a affirmé qu'il n'y avait pas de risques pour la santé sur le lieu de travail et que ni le prestataire, ni les autres employés ne s'étaient plaints auparavant de rayonnement dans ces lieux (pièces 7, 11 et 12).

    Le prestataire a comparu devant le conseil, mais non l'employeur. La décision se lit comme suit :

    Le prestataire et son représentant ont convoqué un témoin devant le conseil, qui a affirmé qu'il y avait un haut niveau de rayonnement au travail et que l'employeur n'avait pas apprécié que le prestataire commence à en parler.

    Les déclarations de l'employeur comportent plusieurs contradictions et par conséquent ne paraissent pas crédibles au conseil arbitral. Puisque le prestataire a obtenu le versement de deux semaines de salaire comme préavis, le conseil en déduit qu'il a été renvoyé et qu'il n'est pas parti de son plein gré. L'employeur a utilisé la question salariale comme prétexte pour congédier le prestataire, parce qu'il n'appréciait pas que ce dernier parle de la CSST et des normes du travail. Le témoignage du prestataire a semblé crédible au conseil arbitral.

    Lors de l'audience de l'appel, l'employeur a fait valoir que le conseil avait fondé sa décision sur une déformation des faits dont il avait été saisi. L'employeur a allégué que rien ne prouvait que le prestataire avait été congédié. L'employeur a essentiellement repris ses arguments, à savoir qu'il n'y avait pas de problème de rayonnement sur les lieux de travail et que le prestataire avait quitté son emploi parce qu'il n'avait pas pu obtenir son augmentation de salaire. La somme tenant lieu de préavis de deux semaines avait été payée tel que l'exige la législation des normes du travail et ne constituait pas une preuve de congédiement du prestataire. L'employeur a fait savoir qu'il avait même donné la fin de semaine au prestataire pour lui permettre de réfléchir à la possibilité de reprendre son travail mais que ce dernier avait refusé. L'employeur a expliqué qu'il avait choisi, faute de temps, de ne pas se présenter devant le conseil, et qu'il estimait que tous les éléments de preuve nécessaires figuraient au dossier d'appel.

    Le représentant du prestataire a soutenu que la décision du conseil était bien fondée sur la preuve dont disposait le conseil, y compris la preuve non contestée irréfutable d'un collègue.

    Pour déterminer si un prestataire était fondé à quitter son emploi ou s'il a été renvoyé sans être en faute, il faut essentiellement procéder à un examen et à une constatation des faits. La jurisprudence a établi sans équivoque que le conseil arbitral était la principale juridiction en matière de conclusion des faits dans les affaires de l'assurance-emploi.

    Dans la décision A-1036-96, le juge Marceau a écrit :

    « Nous sommes tous d'avis, après ce long échange avec les procureurs, que cette demande de contrôle judiciaire portée à l'encontre d'une décision d'un juge-arbitre agissant sous l'autorité de la Loi sur l'assurance-chômage se doit de réussir. Nous pensons, en effet, qu'en contredisant, comme il l'a fait, la décision unanime du Conseil arbitral, le juge-arbitre n'a pas respecté les limites dans lesquelles la Loi assoit son pouvoir de contrôle.

    (...)

    De toute façon, dans tous les cas, c'est le Conseil arbitral -- le pivot de tout le système mis en place par la Loi pour ce qui est de la vérification des faits et de leur interprétation -- qui est celui qui doit apprécier ».

    Et, dans la décision A-115-94, le juge Desjardins a écrit :

    Il ressort clairement de la décision du conseil que l'opinion majoritaire et l'opinion minoritaire avaient toutes deux été examinées à fond. Certes, les tenants de l'opinion majoritaire auraient pu conclure autrement, mais ils ont choisi de ne pas croire la prétention de l'intimé portant qu'il avait quitté son emploi en raison de sa santé. La juge-arbitre ne pouvait substituer son opinion à celle de la majorité. Les membres du conseil étaient les mieux placés et les mieux en mesure d'apprécier la preuve et de tirer des conclusions relativement à la crédibilité....

    Et, plus récemment, dans la décision relative au A-547-01, le juge Létourneau a déclaré que le rôle d'un juge-arbitre se limitait à décider si l'appréciation des faits par le conseil arbitral était raisonnablement compatible avec les éléments versés au dossier.

    En l'espèce, la décision du conseil est fondée sur les éléments de preuve portés à sa connaissance. L'employeur a choisi de ne pas comparaître devant le conseil. S'il avait été présent, il aurait pu être en mesure de contester la preuve présentée par le prestataire et son témoin, mais ce ne fut pas le cas. L'employeur n'a pas pu démontrer que le conseil avait commis une erreur en rendant sa décision.

    Par conséquent, l'appel est rejeté.

    Guy Goulard

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA (Ontario)
    Le 24 février 2004

    2011-01-16