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  • CUB 60638

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d'une demande présentée par
    MIRIAM WIEBE

    - et -

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la Commission de l'assurance-emploi du Canada à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à North York (Ontario) le 2 mai 2003

    DÉCISION

    La juge-arbitre R. KRINDLE

    La Commission porte en appel une décision rendue par le conseil arbitral, lequel a décidé que les prestations de maternité versées par le ministère de la Santé de l'Ontario ne constituent pas une rémunération devant être répartie conformément au Règlement.

    La prestataire a occupé un emploi de médecin auprès d'un centre de santé communautaire en Ontario jusqu'au 16 janvier 2003. Elle a fait établir une période de prestations de maternité conformément à la Loi sur l'assurance-emploi, à compter du 19 janvier 2003. En outre, à compter du 20 janvier 2003, le ministère de la Santé de l'Ontario a commencé à verser à la prestataire des prestations de maternité d'un montant de 880 $ par semaine. La Commission est d'avis que les prestations versées par le ministère de la Santé de l'Ontario constituent une rémunération qui doit être répartie conformément aux articles 35 et 36 du Règlement. La prestataire est d'avis que les prestations que lui verse le ministère de la Santé de l'Ontario ne sont pas visées par les dispositions de l'article 35 sauf si, et seulement si, ces prestations, combinées aux prestations qu'elle touche au titre de la Loi sur l'assurance-emploi, n'excèdent le revenu hebdomadaire normal qu'elle tire de son emploi.

    On trouve à l'article 35 du Règlement une définition de ce qui constitue une rémunération aux fins de l'établissement des prestations. Ainsi, il est prévu que « revenu » s'entend de tout revenu en espèces ou non que le prestataire reçoit ou recevra d'un employeur ou d'une autre personne. Dans l'arrêt King (A-0486-95), la Cour d'appel fédérale a décidé que des indemnités reçues du ministère du Travail de l'Ontario étaient visées par la définition du terme « revenu » puisqu'elles proviennent « d'une autre personne ». Il s'ensuit que des indemnités versées par le ministère de la Santé de l'Ontario constituent un « revenu ».

    Le paragraphe 35(2) porte que la « rémunération » qu'il faut prendre en compte pour déterminer s'il y a eu un arrêt de rémunération et fixer le montant à déduire des prestations à payer (y compris les prestations de maternité), est le revenu intégral du prestataire provenant de tout emploi.

    Le programme de prestations de maternité de l'Ontario a été mis sur pied à la suite d'une entente entre l'Ontario Medical Association et le ministère de la Santé de l'Ontario. Il vise à permettre aux femmes médecins de l'Ontario de consacrer du temps à leur enfant après la naissance et de prendre le temps de se reposer après leur maternité : (pièce 10). On comprendra mieux que ce programme a été mis sur pied pour tenir compte du fait qu'une grande majorité des médecins de l'Ontario sont des travailleurs autonomes, qu'ils ne contribuent pas au régime établi en vertu de la Loi et qu'ils ne sont pas admissibles aux prestations versées en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. Le programme de l'Ontario prévoit le versement de prestations pendant dix-sept semaines consécutives. Le montant des prestations est établi d'après la rémunération du médecin au cours de la période de six mois précédant immédiatement la demande de prestations; il correspond à 50 % de la rémunération hebdomadaire moyenne touchée au cours de cette période, sans excéder 880 $ par semaine. Tandis qu'il reçoit des prestations, le participant au programme peut toucher une rémunération brute n'excédant pas 1 000 $ par semaine. S'il touche plus que cette somme, le montant des prestations sera réduit d'autant (pièce 10).

    Compte tenu de la nature du programme de l'Ontario et des indemnités qu'il prévoit, je crois qu'il est clair que les indemnités ainsi versées constituent une rémunération provenant d'un emploi au sens où l'expression est utilisée au paragraphe 35(2) du Règlement. La prestataire ne conteste pas cette interprétation. Ainsi, à moins de dispositions particulières de la Loi excluant des dispositions générales du paragraphe 35(2) les prestations versées par le ministère de la Santé de l'Ontario, les dispositions générales s'appliquent et le revenu provenant du ministère de la Santé de l'Ontario constitue une rémunération qui doit être répartie.

    La prestataire dit qu'aux termes de l'article 38 du Règlement, est exclu de la rémunération tout revenu versé au titre de la grossesse ou provenant d'un régime de soins à un ou plusieurs enfants, dans la mesure où lorsqu'on le combine aux prestations versées au titre de la Loi, le revenu n'excède pas la rémunération hebdomadaire normale du prestataire provenant de son emploi. L'article 38 du Règlement dit ce qui suit :

    38 Est exclue à titre de rémunération pour l'application de l'article 35 la partie de tout versement payé en raison d'une grossesse, des soins donnés à un ou plusieurs enfants visés au paragraphe 23(1) de la Loi ou des soins ou du soutien donnés à un membre de la famille visé au paragraphe 23.1(2) de la Loi, ou d'une combinaison de ces raisons, qui :

    a) d'une part, lorsqu'elle est ajoutée à la partie du taux de prestations hebdomadaires du prestataire provenant de son emploi, n'excède pas sa rémunération hebdomadaire normale provenant de cet emploi;

    b) d'autre part, ne réduit pas les crédits de congés de maladie non utilisés ou de vacances, l'indemnité de départ ou tout autre crédit accumulé par lui dans le cadre de son emploi.

    La Commission allègue que l'article ne vise qu'à permettre aux employeurs de verser un supplément pour porter les prestations parentales ou de maternité au niveau de la rémunération hebdomadaire normale du prestataire et qu'il n'y a pas lieu de considérer ce supplément comme une rémunération. Une telle interprétation peut ou non correspondre à l'intention des autorités de réglementation au moment où elles ont prescrit l'article 38 du Règlement. Ce que ces autorités ont dit toutefois est beaucoup plus vaste et n'est pas du tout ambigu. À l'article 38, est exclue de la définition de la rémunération pour l'application de l'article 35, « partie de tout versement payé en raison d'une grossesse, des soins donnés à un ou plusieurs enfants » qui lorsqu'elle est ajoutée aux prestations parentales ou de maternité prévues par la Loi, n'excède pas la rémunération hebdomadaire normale provenant de l'emploi du prestataire. Les indemnités prévues par le ministère de la Santé de l'Ontario sont versées en raison de la grossesse ou de soins accordés à un enfant.

    Je conclus qu'il y a dans le Règlement une disposition particulière, l'article 38, qui exclut de la définition de la rémunération pour l'application de l'article 35, toute indemnité versée par le gouvernement de l'Ontario qui, lorsqu'elle est ajoutée aux prestations prévues au titre de la Loi, n'excède pas la rémunération hebdomadaire normale du prestataire provenant de son emploi. Dans la mesure où les sommes combinées excèdent la rémunération hebdomadaire normale du prestataire provenant de son emploi, le montant excédentaire continue en vertu de l'article 38 d'être considéré comme une rémunération en application de l'article 35 et sera de fait considéré comme une rémunération au sens de l'article 35 du Règlement.

    L'article 38, tel qu'il est libellé, ne s'applique pas qu'aux indemnités versées à titre de supplément de rémunération, pas plus qu'il ne s'applique qu'aux indemnités versées seulement par l'employeur du prestataire. L'article 38 exclut simplement l'application de l'article 35 du Règlement à d'autres prestations parentales ou de maternité provenant de quelque source que ce soit, versées au prestataire, dans la mesure où ces autres prestations ajoutées aux prestations prévues par la Loi ne permettent pas au prestataire de gagner plus que la rémunération hebdomadaire normale qu'il tire de son emploi.

    Le conseil a conclu que la prestataire tirait de son emploi une rémunération hebdomadaire normale bien supérieure au total des prestations prévues par la Loi et des prestations de maternité que lui versait le ministère de la Santé de l'Ontario. La Commission n'a pas contesté cette conclusion de fait. Le conseil a également conclu que les prestations versées par le ministère de la Santé de l'Ontario n'avaient pas pour effet de réduire les crédits de congés de maladie ou de vacances de la prestataire, ce que n'a pas contesté la Commission. Le libellé de l'article 38 est donc clair et non ambigu; je ne vois aucune raison de m'immiscer dans la décision du conseil arbitral.

    L'appel interjeté par la Commission est donc rejeté.

    Ruth Krindle

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA (Ontario)
    Le 26 avril 2004

    2011-01-16