TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'une demande présentée par
GEOFF SANDERSON
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la Commission de l'assurance-emploi du Canada à l'encontre de la décision rendue par un conseil arbitral le 20 mai 2003 à Ottawa (Ontario)
DÉCISION
La juge-arbitre KRINDLE
La Commission conteste deux conclusions tirées par la majorité des membres du conseil arbitral, à savoir que le prestataire a exercé un emploi comme travailleur indépendant dans une mesure limitée en janvier, février et mars 2002, et a démontré qu'il était sans emploi pendant cette période.
La Commission allègue que le conseil a fait erreur, premièrement en concluant que le prestataire travaillait à titre indépendant dans une mesure limitée seulement, une conclusion qui ne serait pas corroborée par l'ensemble des faits. Deuxièmement, le conseil arbitral aurait commis une erreur de droit en ne cherchant pas à déterminer si le prestataire était disponible pour travailler, la disponibilité étant une condition à l'admissibilité aux prestations.
Le conseil s'est bien penché sur la question de la disponibilité et a conclu que le prestataire était disponible pour travailler, comme en témoigne un passage de sa décision majoritaire :
f) Intention et volonté de chercher un autre emploi et de l'accepter immédiatement. C'est le plus complexe des six facteurs examinés. Le prestataire a toujours été et continue d'être disposé à accepter un emploi immédiatement, comme le prouve sa demande d'emploi présentée récemment à Star Motors. Il ne pose aucune condition pouvant trop restreindre ses perspectives d'emploi, et nous estimons qu'il est en mesure de continuer, comme il le prétend, de chercher du travail par l'entremise de ses réseaux au cours de la période en question.
[...] la majorité du conseil estime que, même si le prestataire a démarré une entreprise, il avait et continue d'avoir l'intention de l'exploiter à long terme et à temps partiel. Il a continué de chercher du travail et était disposé à commencer un emploi à temps plein immédiatement.
La Commission soutient à juste titre que la disponibilité pour travailler est une exigence aux termes de la Loi, et que cette exigence ne peut pas être ignorée, peu importe les circonstances (arrêts Bertrand, A-613-81, et Stolniuk, A-686-93). La Commission a aussi raison de dire qu'il incombe au prestataire de prouver sa disponibilité, selon l'alinéa 18a) de la Loi sur l'assurance-emploi. Le prestataire doit pouvoir établir qu'il a « fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi ». Le juge Mackay a déclaré au sujet d'une affaire dont il était saisi (CUB 18013) que, pour que les démarches du prestataire soient considérées habituelles et raisonnables, il aurait dû faire plus que consulter le babillard de la Commission de l'assurance-chômage une fois par semaine et postuler un seul emploi en quatre mois. Toutefois, cette déclaration n'établissait pas un nombre minimal de demandes d'emploi à effectuer pour être admissible aux prestations. Dans la présente affaire, le conseil a conclu que le prestataire avait continué à « chercher du travail par l'entremise de ses réseaux au cours de la période en question ». La Cour d'appel fédérale a précisé dans l'affaire Faucher (A-56-96) ce qui est attendu d'un prestataire :
« [...] la disponibilité devait se vérifier par l'analyse de trois éléments, soit le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu'un emploi convenable serait offert, l'expression de ce désir par des efforts pour se trouver cet emploi convenable, et le non-établissement de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travail, et que les trois éléments devaient être considérés pour arriver à la conclusion. »
Ce que représentent des « efforts pour se trouver [un] emploi convenable » dépend évidemment des faits et de la situation. Il n'existe pas de règle universelle. En l'espèce, le conseil arbitral a examiné le témoignage du prestataire et de son épouse en fonction des trois critères énoncés dans l'arrêt Faucher. La Commission a souligné que le prestataire « avait communiqué avec un seul employeur éventuel » [Traduction]; en contrepartie, le conseil a noté que le prestataire cherchait du travail au moyen de réseaux de connaissances pendant la période en question. La majorité des membres pouvaient raisonnablement conclure que le prestataire avait prouvé sa disponibilité d'après la preuve montrant qu'il avait postulé un emploi et avait recours à des réseaux pour chercher du travail.
La Commission conteste aussi une conclusion de fait tirée par le conseil, soit que le prestataire travaillait à titre indépendant dans une mesure limitée. Cette conclusion est fondée sur les faits. Le conseil n'a pas commis d'erreur de droit. Il a examiné chacun des six critères qu'il devait examiner, et a tiré une conclusion de fait avec laquelle la Commission n'est pas d'accord. La Commission fait valoir que, selon la prépondérance de la preuve, le prestataire a agi après le 6 janvier 2003 comme une personne qui compte sur son emploi en tant que travailleur indépendant comme principal moyen de subsistance. J'ignore si j'aurais forcément rendu la même décision que la majorité des membres du conseil. Toutefois, le conseil a examiné la preuve dont il disposait et les six facteurs applicables, et je ne peux pas dire qu'il a fondé sa décision sur une conclusion tirée de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.
Par conséquent, l'appel de la Commission est rejeté.
Ruth Krindle
Juge-arbitre
OTTAWA (Ontario)
Le 13 juin 2004