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  • CUB 61466

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    et

    d'une demande de prestations présentée par
    THAMBIPILLAI KANESALINGAM

    et

    d'un appel interjeté par le prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Mississauga (Ontario), le 12 août 2003

    DÉCISION

    Le juge David G. Riche

    La question en litige est de savoir si le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi.

    D'après la preuve au dossier, le prestataire a été engagé comme opérateur de machine. Il a quitté son emploi au bout de dix mois, parce qu'on lui demandait d'effectuer d'autres tâches.

    Le conseil arbitral a conclu qu'on avait demandé au prestataire d'effectuer un autre genre de travail que celui pour lequel il avait été engagé, sans que sa rémunération ou son horaire de travail ne soient modifiés. Le prestataire avait été embauché comme opérateur de machine, mais on l'avait affecté plus tard à l'emballage et au nettoyage. Le conseil a conclu que le prestataire n'aimait pas ses nouvelles tâches, mais que ses heures de travail et sa rémunération étaient restées les mêmes. Le conseil arbitral est arrivé à la conclusion que le prestataire avait démissionné et qu'il n'avait pas cherché d'autre emploi pendant qu'il travaillait; les tâches du prestataire avaient effectivement changé, mais sa rémunération, ses heures de travail et ses conditions d'emploi étaient restées les mêmes.

    Lorsque le prestataire s'est présenté devant moi, il a déclaré qu'il avait été engagé comme opérateur de machine. On l'avait affecté plus tard à un autre travail en lui demandant de faire du découpage, ce qui lui demandait beaucoup plus d'efforts et différait de son travail d'opérateur de machine.

    De l'avis de l'avocat de la Commission, le prestataire aurait dû essayer de négocier un quelconque arrangement avec son employeur avant de démissionner. L'avocat a également dit que le prestataire aurait dû conserver son emploi jusqu'à ce qu'il puisse en trouver un autre.

    Le prestataire a répliqué en déclarant qu'on lui avait dit qu'il ne pouvait plus travailler comme opérateur de machine et qu'il lui fallait effectuer ce nouveau travail, ce à quoi il ne pouvait se résoudre. S'il n'acceptait pas, on n'aurait plus eu d'autre emploi pour lui. Selon la Commission, le prestataire devait d'abord essayer de régler le problème avec son employeur, ce qu'il n'a pas fait. Toujours d'après la Commission, rien ne prouve que le travail était si intolérable que le prestataire ne pouvait pas attendre d'avoir trouvé un autre emploi convenable avant de démissionner.

    Si je compare les suggestions de l'avocat de la Commission et ce que le prestataire a déclaré devant moi, je constate que les possibilités que le prestataire et l'employeur ne parviennent à trouver un terrain d'entente étaient bien minces. J'ignore si cette information a été communiquée au conseil arbitral. Quoi qu'il en soit, le conseil a mentionné que les conditions d'emploi étaient restées les mêmes, ce qui contredit tout à fait la preuve puisqu'il est évident qu'on avait confié au prestataire un autre travail que celui d'opérateur de machine. Le conseil arbitral a même constaté que le prestataire avait été affecté à l'emballage et au nettoyage.

    Le prestataire a clairement dit devant moi que, lorsqu'on l'avait affecté à l'autre travail qu'il refusait de faire, on l'avait placé devant l'alternative suivante : il acceptait ce nouveau travail ou il n'aurait plus d'emploi.

    J'estime que la preuve portée à la connaissance du conseil arbitral montre qu'il y a eu un important changement dans les fonctions du prestataire. Le prestataire avait été engagé comme opérateur de machine et il a travaillé en qualité d'opérateur de machine pendant dix mois.

    J'estime que le prestataire a été engagé comme opérateur de machine et qu'on n'aurait pas dû l'affecter à d'autres fonctions sans son consentement. Passer d'un travail d'opérateur de machine à des tâches de nettoyage ou de découpage constitue à mon avis une modification importante de ses fonctions. L'information fournie par l'agent d'assurance dans le formulaire Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations rend les choses plus confuses au lieu de les éclairer puisqu'elle diffère quelque peu des constatations du conseil arbitral et des déclarations du prestataire.

    Même si j'acceptais les constatations du conseil arbitral, à savoir que la preuve démontre que le prestataire a été engagé comme opérateur de machine et qu'on l'a affecté plus tard à des tâches d'emballage et de nettoyage, cela n'en constituerait pas moins à mon avis une modification importante des fonctions.

    Pour ces raisons, j'estime que la preuve en l'espèce m'autorise à rendre la décision que le conseil arbitral aurait dû rendre, vu qu'il a tiré des conclusions de fait erronées, qui contredisent la preuve portée à sa connaissance.

    La conclusion du conseil arbitral, à savoir que les conditions d'emploi du prestataire n'avaient pas été modifiées, contredit sa constatation fondée sur la preuve, selon laquelle le prestataire avait été engagé comme opérateur de machine et qu'on l'avait affecté plus tard à des tâches d'emballage et de nettoyage. Cette constatation permettait, à mon avis, d'en arriver à la conclusion raisonnable qu'il y avait eu une modification importante des fonctions du prestataire.

    J'estime également que le conseil arbitral a commis une erreur de droit en n'appliquant pas le sous-alinéa 29c)(ix) dans la présente affaire. La preuve dont il disposait indiquait également que le prestataire n'aurait plus eu d'emploi s'il avait refusé d'effectuer ces autres tâches.

    J'estime pour ces raisons que la décision du conseil arbitral doit être annulée et l'appel du prestataire accueilli.

    David G. Riche

    JUGE-ARBITRE

    St. John's (T.-N.)
    Le 30 août 2004

    2011-01-16