EN VERTU de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
et
RELATIVEMENT à une demande de prestations par
Jeannot DARAICHE
et
RELATIVEMENT à un appel interjeté auprès d'un juge-arbitre par la Commission de la décision d'un conseil arbitral rendue le 9 février 2005 à Gaspé, Québec
DÉCISION
GUY GOULARD, Juge-arbitre
Le prestataire a établi une demande initiale de prestations prenant effet le 25 octobre 2004. La Commission détermina par la suite que le prestataire avait volontairement quitté son emploi sans justification et que son départ ne représentait pas la seule solution raisonnable dans son cas. En conséquence, la Commission a imposé une exclusion d'une période indéterminée à compter du 25 octobre 2004.
Le prestataire en appela de cette décision devant un conseil arbitral qui accueillit son appel. La Commission porta la décision du conseil en appel devant un juge-arbitre. Cet appel a été entendu à Ste-Anne-des-Monts, Québec le 15 juin 2006. Le prestataire était présent.
Ayant entendu les représentations du prestataire et de la Commission, j'en suis venu à la conclusion que ce dossier doit être retourné devant un autre conseil pour une nouvelle détermination. Cette décision est fondée sur le fait que le conseil n'a pas décidé la question qu'il avait à trancher.
Le prestataire avait pris la position qu'il avait été congédié tandis que l'employeur avait insisté que le prestataire avait volontairement quitté son emploi parce qu'il ne voulait pas accepter une suspension de sept jours que voulait lui imposer l'employeur pour ne pas s'être présenté au travail quand il devait le faire.
Le conseil a revu la preuve et en est arrivé à une conclusion de faits qui est, en soi, contradictoire. Le conseil avait indiqué à la pièce 19-7 « Le renvoi n'ayant de toute évidence pas été démontré, il reste à déterminer si M. Daraiche a quitté volontairement son emploi ». À la pièce 19-8, le conseil indique « Dans les circonstances, le conseil arbitral conclut que la preuve n'a pas été faite à l'effet que l'appelant a quitté son emploi volontairement ». Le conseil a accueilli l'appel du prestataire.
Le conseil a donc omis de décider si le prestataire avait perdu son emploi par congédiement ou par départ volontaire, indiquant que ce n'était ni l'un ni l'autre.
Il a été déterminé par la Cour d'appel fédérale dans les arrêts Easson (A-1598-92), Dufour (A-1398-92) et Eppel (A-3-95) que le conseil doit déterminer si le motif de la perte d'emploi était suite à un congédiement et, si tel était le cas, si le congédiement était en raison d'inconduite ou, s'il s'agissait d'un départ volontaire, si le départ était justifié au sens de la Loi sur l'assurance-emploi. Dans Easson (A-1598-92), le juge Marceau écrivait :
« Les notions de « perte d'emploi pour inconduite » et de « départ volontaire sans justification » peuvent être deux notions abstraites distinctes, mais elles sont traitées ensemble aux articles 28 et 30 de la Loi - ce qui est tout à fait logique puisqu'elles visent toutes deux des situations où la perte d'emploi est la conséquence d'un ou plusieurs actes délibérés de l'employé - et elles sont sanctionnées de la même façon par l'exclusion spéciale, dont cette Cour a clairement défini l'objet, il y a longtemps, dans les termes suivants :
« Il s'agit là de dispositions d'une loi visant l'établissement d'un régime d'assurance-chômage en faveur des assurés qui, sans aucune faute de leur part, perdent leur emploi. Elle n'a pas pour but de profiter à ceux qui choisissent de ne pas travailler ou qui perdent leur emploi par suite de leurs propres gestes. Dans un tel contexte, le sens du paragraphe 41(1) apparaît avec assez de clarté. Les expressions qui y sont utilisées ne sont pas techniques et ne devraient pas être examinées comme si elles l'étaient. Il y est écrit, et c'est là le sens qu'il faut lui donner, que les personnes qui quittent leur emploi sans justification ou le perdent en raison de leur propre inconduite sont exclues du bénéfice des prestations. »
Et dans Eppel (A-3-95), le juge Marceau ajoutait :
« Dans les cas d'exclusion aux termes de cette disposition, lorsque les faits entourant la perte d'emploi permettent de conclure que le prestataire a volontairement quitté son emploi sans justification ou que le congédiement est motivé, l'affaire doit être examinée sous les deux angles. Ayant conclu que l'intimé n'avait pas quitté son emploi volontairement, le juge-arbitre devait examiner les circonstances du congédiement pour savoir si l'intimé avait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite ou renvoyer l'affaire devant le conseil arbitral pour que celui-ci fasse cette détermination. »
Le conseil se devait de déterminer la cause de la fin d'emploi et ensuite décider si le prestataire avait démontré qu'il n'avait pas été congédié pour inconduite ou s'il avait établi une justification pour avoir quitté volontairement et si son départ représentait la seule solution raisonnable dans son cas. En omettant de trancher la question le conseil a erré en droit.
La décision du conseil arbitral est annulée. Le dossier sera retourné devant un conseil différemment constitué pour une nouvelle détermination. La décision du conseil datée le 9 février 2005 sera retirée du dossier d'appel.
Guy Goulard
JUGE-ARBITRE
OTTAWA, Ontario
Le 7 juillet 2006