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  • CUB 66311

    TRADUCTION

    Dans l'affaire de la Loi sur l'assurance-emploi,
    L.C. 1996, ch. 23

    et

    d'une demande de prestations d'assurance-emploi présentée par
    Devon Liggatt

    et

    d'un appel interjeté par le prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Burnaby (Colombie-Britannique) le 4 mai 2005

    Appel instruit à Vancouver (Colombie-Britannique) le 31 mai 2006

    DÉCISION

    LE JUGE-ARBITRE R. C. STEVENSON

    M. Liggatt interjette appel de la décision d'un conseil arbitral de rejeter l'appel qu'il a interjeté de la décision de la Commission de l'exclure du bénéfice des prestations d'assurance-emploi parce qu'il a quitté volontairement son emploi sans justification.

    Du 7 octobre 2004 au 6 février 2005, M. Liggatt a travaillé pour Frasam Investments Ltd., qui exploitait une franchise de Mr. Lube à Langley. Le 31 octobre, M. Liggatt, qui travaillait jusqu'alors à titre de technicien, a été promu à un poste de superviseur. Il avait déjà travaillé dans deux autres franchises, qui étaient, comme toutes les franchises de Mr. Lube, indépendantes l'une de l'autre. Un nouveau directeur a été nommé à l'atelier de Langley. Il ressort clairement, à la lecture du dossier, qu'à la suite de cet événement, M. Liggatt a commencé à entretenir des relations conflictuelles avec le directeur pour qui il travaillait. Je ne m'attarderai pas à la nature de ces relations, puisque des précisions à cet égard figurent au dossier. M. Liggatt a tenté, en vain, de résoudre les problèmes qu'il avait avec le directeur régional, en vain.

    Aux termes de l'alinéa 29c) de la Loi sur l'assurance-emploi, un prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi si son départ constitue la seule solution raisonnable dans son cas, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles énumérées à cet alinéa, dont la suivante : « relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un superviseur ».

    Le conseil arbitral a déclaré ce qui suit :

    En l'espèce, le conseil tient pour avéré que M. Liggatt disposait d'autres solutions raisonnables que de quitter son emploi. Il avait déjà démissionné de deux postes au sein de la même entreprise et savait qu'il devait donner un préavis de deux semaines. Son employeur a déclaré pendant l'audience que le préavis de deux semaines lui aurait donné suffisamment de temps pour trouver une solution raisonnable pour les deux parties aux prises avec un conflit de personnalité. L'employeur de M. Liggatt a déclaré à maintes reprises que celui-ci était un précieux employé qui faisait du bon travail, et qu'il regrettait que le prestataire ait quitté si rapidement son emploi sans qu'aucun « plan d'action » n'ait pu être mis en place.

    Le conseil tient pour avéré que le prestataire disposait de solutions raisonnables, mais que celui-ci avait choisi de ne pas en tenir compte.

    Le conseil arbitral ne s'est pas penché sur la question de savoir s'il existait des relations conflictuelles entre M. Liggatt et le directeur, ni si, le cas échéant, la cause de ces relations était essentiellement imputable à M. Liggatt. Selon les éléments versés au dossier, le conseil a omis d'examiner cette question et a par conséquent refusé d'exercer sa compétence.

    Je souhaite faire remarquer que la Commission ne s'est pas entretenue avec le directeur lorsqu'elle a procédé à son enquête relativement à la demande du prestataire.

    Le conseil arbitral n'a pas précisé la nature des solutions raisonnables qui s'offraient selon lui au prestataire mais que ce dernier n'a pas envisagées. Il semble que, selon le conseil, le prestataire aurait dû continuer à exercer les fonctions de son poste pendant deux semaines pour permettre à l'employeur de trouver une solution au problème. Le conseil a peut-être également été influencé par l'affirmation de la Commission, selon laquelle M. Liggatt aurait pu demander une mutation dans un autre atelier, affirmation qui selon moi n'est pas raisonnable compte tenu du fait que les franchises sont indépendantes les unes des autres, et qu'il aurait donc fallu que le prestataire quitte l'emploi qu'il occupait à Langley pour pouvoir présenter une demande d'emploi dans un autre atelier.

    En outre, le conseil arbitral n'a pas tenu compte du fait que M. Liggatt avait tenté à maintes reprises de discuter avec le directeur régional afin de trouver une solution à ses problèmes.

    La question de déterminer si un prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi, c'est-à-dire qu'il n'a d'autre solution raisonnable que de démissionner, relève à la fois du droit et des faits. La norme de contrôle judiciaire que doit appliquer le juge-arbitre est celle du caractère raisonnable de la décision du conseil.

    À la lumière de l'ensemble des éléments de preuve versés au dossier, je conclus que la constatation du conseil, voulant que des solutions raisonnables se soient offertes à M. Liggatt, est déraisonnable. La preuve selon laquelle M. Liggatt et le directeur entretenaient des relations conflictuelles dont la cause n'était, ni en partie ni en totalité, imputable au prestataire, est accablante et n'a pas été contredite.

    L'appel est accueilli et la décision d'exclure le prestataire du bénéfice des prestations est annulée.

    Ronald C. Stevenson

    Juge-arbitre

    FREDERICTON (NOUVEAU-BRUNSWICK)
    Le 17 juillet 2006

    2011-01-16