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  • CUB 66381A

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la Loi sur l'assurance-emploi

    - et -

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par le prestataire à l'encontre de la décision rendue par un conseil arbitral le 23 mars 2006 à Belleville (Ontario)

    DÉCISION

    Le juge-arbitre GUY GOULARD

    Le prestataire a travaillé pour un fabricant jusqu'au 12 octobre 2005. Il a présenté une demande initiale de prestations d'assurance-emploi qui a pris effet le 16 octobre 2005. La Commission a déterminé que le prestataire avait travaillé pour des services d'alimentation du 30 novembre 2004 au 6 mai 2005 et qu'il avait perdu cet emploi en raison de son inconduite. Les relevés d'emploi produits par ses employeurs indiquaient tous les deux que le prestataire avait été congédié. Après avoir déterminé que le prestataire avait perdu l'emploi qu'il occupait chez des services d'alimentation en raison de son inconduite, la Commission l'a exclu du bénéfice des prestations pour une période indéterminée à partir du 16 octobre 2005. La Commission a également déterminé que, après avoir perdu son emploi en raison de son inconduite, le prestataire avait accumulé le nombre d'heures d'emploi assurable requis pour pouvoir faire établir une période de prestations à son profit. Par ailleurs, la Commission a déterminé que l'emploi qu'avait occupé le prestataire chez des services d'alimentation ne pouvait pas être utilisé pour le calcul de son taux de prestations, qui a été fixé à 376 $ par semaine.

    Le prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant un conseil arbitral, qui a rejeté l'appel. Il a ensuite porté la décision du conseil en appel. Cet appel a été instruit à Kingston, en Ontario, le 22 avril 2008, en présence du prestataire.

    L'employeur a affirmé qu'il avait congédié le prestataire parce que celui-ci n'avait pas respecté la politique de l'entreprise selon laquelle les employés ne peuvent pas quitter le lieu de travail pendant leur période de repas. L'employeur a expliqué que cette politique avait été mise en place pour des raisons de sécurité et d'équité. Le fait de quitter le lieu de travail peut avoir pour effet de laisser un employé seul, créant ainsi un problème de sécurité. Le prestataire avait reçu un exemplaire de cette politique et avait été avisé de prendre ses rendez-vous lorsqu'il était en congé.

    Lors de son dernier jour de travail, alors que le prestataire s'apprêtait à quitter le lieu de travail pour se rendre chez le médecin pendant sa pause-repas, son superviseur lui a dit qu'il ne pouvait pas partir et que, s'il le faisait, il serait congédié. Le prestataire est allé à son rendez-vous chez le médecin puis à la pharmacie et, à son retour, il a été congédié.

    Dans son appel devant le conseil arbitral, le prestataire a nié le fait qu'on lui ait dit de prendre ses rendez-vous lorsqu'il était en congé. Il a reconnu avoir quitté le lieu de travail pour aller chez le médecin pendant sa période de repas non payée, et ce, pendant une période peu occupée au travail. Il a soutenu que l'employeur ne pouvait pas exiger qu'il demeure sur le lieu de travail pendant sa pause-repas non payée. Il a ajouté qu'à 6 heures, il avait dit à son gestionnaire qu'il se rendrait à un rendez-vous chez le médecin pendant sa période de repas et, qu'à ce moment, on ne lui avait pas dit qu'il ne pouvait pas s'absenter. Ce n'est que plus tard, soit au moment où il s'apprêtait à partir, que le gestionnaire lui a dit qu'il ne pouvait pas quitter les lieux. Il a également affirmé qu'il avait demandé à la Commission de lui remettre une copie de son dossier, mais qu'il ne l'avait jamais obtenue. Il a également soutenu qu'on lui avait refusé le droit de participer à son audience au moyen d'une ordonnance d'interdiction de violation de propriété. Il a demandé au conseil de déterminer si une telle ordonnance pouvait être portée en appel.

    Le prestataire s'est présenté devant le conseil arbitral, il a fourni une copie de ses arguments écrits et les a lus. Il a répété ce qu'il avait déjà déclaré en ce qui concerne son absence pour se rendre chez le médecin pendant sa période de repas. Il a ajouté que son milieu de travail et sa relation avec son superviseur ne le rendaient pas heureux. Il a souligné le fait que le bureau de son médecin était situé à seulement cinq minutes de marche de son lieu de travail. Il a également soulevé la question d'une ordonnance d'interdiction de violation de propriété qu'a obtenue Service Canada contre lui.

    Le conseil arbitral a examiné la preuve et estimé qu'il n'avait pas le pouvoir de commenter la relation entre le prestataire et la Commission. En ce qui concerne la question de savoir si le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite, le conseil a rejeté l'appel du prestataire pour les raisons suivantes :

    « En ce qui concerne la décision touchant les articles 29 et 30 de la Loi, nous tenons pour avéré que le prestataire a signé le manuel de l'employé, consentant ainsi à la clause selon laquelle les employés ne peuvent quitter le milieu de travail pendant leur pause. On avait précédemment averti le prestataire que le fait de quitter les lieux de travail contrevenait à la politique. Même si le prestataire a affirmé ne pas avoir obtenu de réponse tôt le matin lorsqu'il a dit à son superviseur qu'il quitterait les lieux, ce dernier lui a dit à 13 h, au moment où le prestataire s'apprêtait à quitter les lieux, qu'il serait congédié s'il s'en allait.

    Pour constituer de l'inconduite, l'acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d'une telle insouciance ou négligence que l'on pourrait dire que l'employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions de ses actes. A-381-85

    Dans l'arrêt A-834-82, on indique également qu'on doit établir que c'est l'inconduite qui a entraîné le congédiement du prestataire. En l'espèce, le conseil estime que le prestataire a choisi de ne pas tenir compte de la politique de l'employeur et des instructions spécifiques des superviseurs, sachant que son comportement entraînerait son congédiement. »

    Lorsque j'ai instruit l'appel, le prestataire a indiqué qu'il n'avait rien à ajouter. Il a insisté sur le fait que la GRC, la Police provinciale de l'Ontario et le Service de police locale menaient une enquête sur la Commission et que, par conséquent, il ne pouvait pas faire de commentaires.

    La Commission a soutenu que la décision du conseil arbitral était fondée sur les éléments de preuve qui ont permis d'établir que le prestataire avait été congédié parce qu'il n'avait pas respecté la politique de l'employeur selon laquelle il ne pouvait pas quitter le lieu de travail pendant les pauses-repas. Le prestataire connaissait cette politique. De plus, lorsqu'il se préparait à partir, on lui a rappelé qu'il ne pouvait pas s'absenter pendant sa période de repas. Il est tout de même parti et a été congédié à son retour.

    En l'espèce, l'employeur avait instauré une politique qui interdisait aux employés de quitter le lieu de travail pendant les pauses. Il a expliqué que cette politique avait été conçue pour une question de sécurité. Le prestataire connaissait la politique et on lui avait déjà dit qu'il ne pouvait pas s'absenter pendant ses pauses-repas. Lors de son dernier jour de travail, on lui a expressément dit qu'il ne pouvait pas s'absenter et que, s'il le faisait, il serait congédié. Il est tout de même parti et il a été congédié pour ne pas avoir respecté la politique de l'employeur.

    Il est bien établi dans la jurisprudence que lorsqu'un prestataire outrepasse une directive légitime et raisonnable adoptée par un employeur et que le prestataire connaît cette directive, cela constitue de l'inconduite aux termes de la Loi sur l'assurance-emploi (décisions CUB 17780, 32458, 35498, 39993 et 45307).

    Pour déterminer si les actes d'un prestataire constituent l'inconduite ayant entraîné son congédiement, il faut essentiellement, et ce, quelles que soient les circonstances, examiner et établir les faits. Or, il est clairement établi dans la jurisprudence que le conseil arbitral est le principal juge des faits dans les affaires relatives à l'assurance-emploi (arrêts [A-1036-96] et [A-115-94]). Plus récemment, dans l'arrêt A-547-01, le juge Létourneau a déclaré que le rôle d'un juge-arbitre se limite à décider si l'appréciation des faits par le conseil arbitral est raisonnablement compatible avec les éléments de preuve portés à la connaissance de ce dernier.

    Les pouvoirs du juge-arbitre sont limités par les dispositions du paragraphe 115(2) de la Loi sur l'assurance-emploi. À moins que le conseil arbitral n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'il ait rendu une décision entachée d'une erreur de droit ou qu'il ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le juge-arbitre est tenu de rejeter l'appel ( [A-547-01], [A-600-93], [A-115-94], [A-255-95] et [A-97-03]).

    Le prestataire n'a pas démontré que le conseil arbitral avait rendu une décision entachée d'une erreur. Au contraire, le conseil a rendu une décision fondée sur la preuve et sur les dispositions législatives applicables, telles qu'elles sont interprétées dans la jurisprudence.

    Par conséquent, l'appel est rejeté.

    Guy Goulard

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA (Ontario)
    Le 15 mai 2008

    2011-01-16