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  • CUB 66916

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    et

    d'une demande de prestations présentée par
    Diana Lynn SMITH

    et

    d'un appel interjeté par l'employeur,
    1008623 Ontario Inc. (Tim Hortons),
    à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Cornwall (Ontario) le 14 octobre 2005

    DÉCISION

    Le juge-arbitre GUY GOULARD

    La prestataire a travaillé pour la société à numéro 1008623 Ontario Inc. (Tim Hortons) du 13 février 2001 au 24 avril 2004. Le 29 avril 2004, elle a présenté une demande initiale de prestations d'assurance-emploi, qui a pris effet le 25 avril 2004. La Commission a par la suite déterminé que la prestataire avait perdu son emploi en raison de son inconduite et l'a exclue du bénéfice des prestations pour une période indéterminée commençant le 25 avril 2004.

    La prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant un conseil arbitral, qui a accueilli l'appel. L'employeur a par la suite interjeté appel de la décision rendue par le conseil. Cet appel a été instruit à Cornwall (Ontario) le 2 octobre 2006. La prestataire et l'employeur ont assisté à l'audience. Ce dernier était représenté par Mme Linda Moyer.

    L'employeur a indiqué qu'il avait congédié la prestataire parce qu'elle avait fait preuve d'indiscipline et avait enfreint certaines de ses politiques. Il a déclaré que la prestataire avait pris une longue pause pendant laquelle elle avait quitté l'aire du centre commercial où le restaurant était situé, ce qui allait à l'encontre de la politique de l'employeur, dont la prestataire était au courant. L'employeur a également soutenu que la prestataire avait violé le code relatif à la tenue vestimentaire et qu'elle avait été aperçue, à proximité de son lieu de travail, en compagnie d'une personne contre laquelle l'employeur avait obtenu une injonction. Il a ajouté que la prestataire avait déjà, par le passé, reçu des avertissements par rapport à sa conduite.

    La prestataire a déclaré qu'elle avait été une bonne employée pendant quatre ans, et qu'elle ne se rappelait pas avoir reçu d'avertissements relativement à sa conduite. Elle a indiqué qu'elle ignorait que le fait de quitter le lieu de travail constituait un manquement aux règles de l'entreprise. Elle a ajouté qu'on lui avait dit, lorsqu'elle travaillait dans un autre restaurant Tim Hortons, qu'elle devait quitter le lieu de travail pour fumer une cigarette. Elle a également nié avoir pris de longues pauses.

    La prestataire a assisté à l'audience. La représentante de l'employeur, Mme Linda Moyer, ainsi que la gérante du restaurant, Mme Cindy Ley, se sont également présentées devant le conseil. Ce dernier a examiné la preuve présentée par l'employeur et la prestataire et a conclu que les éléments de preuve présentés par les deux parties étaient crédibles. Il a donné le bénéfice du doute à la prestataire et a accueilli l'appel.

    Pendant l'audience d'appel, la représentante de l'employeur a soutenu que la prestataire avait présenté des éléments de preuve contradictoires au conseil et que ce dernier avait commis une erreur en lui donnant le bénéfice du doute. Elle a indiqué que tous les faits qu'elle avait énoncés, lorsqu'elle avait présenté sa preuve au conseil, étaient vrais. Pour sa part, la prestataire a répété la version des faits qu'elle avait elle-même présentée au conseil. Elle a nié avoir pris de longues pauses et expliqué qu'étant donné qu'elle voulait fumer une cigarette, ce qu'elle avait le droit de faire pendant ses pauses, elle n'avait eu d'autre choix que de quitter le lieu de travail.

    La Commission n'a pas pris parti dans l'appel interjeté en l'espèce.

    Selon le paragraphe 49(2) de la Loi sur l'assurance-emploi, lorsqu'il s'agit de déterminer si un prestataire doit se voir imposer une inadmissibilité au bénéfice des prestations, si les éléments de preuve présentés de part et d'autre sont équivalents, le bénéfice du doute doit être accordé au prestataire.

    En l'espèce, le conseil a examiné la preuve présentée et a rendu sa décision en fonction de l'analyse qu'il a faite de cette preuve.

    Pour déterminer si les actes ayant entraîné le congédiement d'un prestataire constituent de l'inconduite, il faut avant tout, et ce, quelles que soient les circonstances, examiner et établir les faits. La jurisprudence a établi hors de tout doute que le conseil arbitral est la principale instance qui doit juger des faits dans les affaires ressortissant à l'assurance-emploi. Dans la décision CUB 39868, le juge MacKay a résumé ce principe et a confirmé la décision du conseil selon laquelle il fallait accorder le bénéfice du doute au prestataire. Voici ce qu'il a écrit :

    « Un juge-arbitre ne peut infirmer la conclusion de fait d'un conseil que lorsqu'il n'y a pas de preuve appuyant la conclusion du conseil, ou lorsque le conseil a nettement ignoré une preuve importante ou sérieusement dénaturé la preuve - CUB 18993 - ou fondé sa décision sur une conclusion de faits absurde - Marchand c. C.E.I.C. (21 juillet 1989), N° du doc. A-148-88 (C.A.F.). Un juge-arbitre doit voir si, à partir de la preuve devant lui, un conseil avait pu raisonnablement tirer la conclusion à laquelle il est arrivé, même si le juge-arbitre avait pu en tirer une différente - Canada (Procureur général) c. Feere (23 janvier 1995), N° A-87-94, [1995] C.F.J. N° 109 (C.A.F.). Un juge-arbitre excéderait sa compétence s'il renversait la conclusion de fait d'un conseil ou s'il y substituait la sienne, simplement parce qu'il voyait la preuve différemment. Canada (Procureur général) c. Verreault (1986), 86 N.R. 389, [1986] N.R N° 657 (C.F.J.); Canada (Procureur général) c. Ash (1994), 178 N.R. 73, [1994] C.F.J. N° 1716 (C.A.F.). »

    En outre, plus récemment, dans l'affaire Le Centre de valorisation des produits marins de Tourelle Inc. (A-547-01), le juge Létourneau a déclaré que le rôle du juge-arbitre se limitait à décider si l'appréciation des faits par le conseil arbitral était raisonnablement compatible avec la preuve portée à la connaissance du conseil.

    En l'espèce, l'employeur n'a pas réussi à démontrer que le conseil avait commis une erreur en décidant de donner le bénéfice du doute à la prestataire et d'accueillir l'appel.

    Pour les raisons susmentionnées, l'appel est rejeté.

    Guy Goulard

    JUGE-ARBITRE

    OTTAWA (Ontario)
    Le 25 octobre 2006

    2011-01-16