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  • CUB 69140

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    et

    d'une demande de prestations

    et

    d'un appel interjeté par le prestataire à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Peterborough (Ontario), le 28 mars 2006

    DÉCISION

    Le juge David G. Riche

    La question à trancher, en l'espèce, consistait à déterminer si le prestataire peut faire antidater sa demande aux termes du par. 10(4) de la Loi sur l'assurance-emploi.

    Selon la preuve soumise au conseil arbitral, le prestataire a présenté une demande de prestations le 13 novembre 2005. On lui a alors indiqué qu'il devait produire une déclaration pour la période de deux semaines commençant le 6 novembre 2005, de même que pour la semaine commençant le 20 novembre suivant. Or, le prestataire n'a pas essayé de faire sa déclaration en ayant recours au service téléphonique automatisé qu'on appelle Télédec, ou encore par le biais du service offert sur Internet. Il attendait de recevoir ses cartes de déclaration, mais la Commission ne lui en a pas envoyées.

    Quand le prestataire a voulu se renseigner, le 7 février 2006, on lui a conseillé encore une fois de présenter une nouvelle demande. C'est alors qu'il a manifesté le désir de faire antidater sa demande pour qu'elle prenne effet le 13 novembre 2005. Il a répété qu'il ne se souvenait pas d'avoir reçu quelque avis que ce soit dans son courrier, ajoutant toutefois que quelqu'un l'avait appelé pour se faire confirmer son code postal.

    La Commission est d'avis que le prestataire n'a pas fourni ses déclarations à temps, aux fins de l'art. 26 du Règlement, et que ses motifs pour expliquer son retard ne constituent pas une justification.

    À l'audience devant le conseil arbitral, le prestataire était représenté par son père. Ce dernier a expliqué que son fils n'était pas habitué à utiliser un ordinateur. Les membres du conseil lui ont fait remarqué que le prestataire pouvait utiliser des cartes de déclaration, mais qu'il lui fallait présenter une demande en ce sens. Le père du prestataire ne pouvait dire si son fils avait obtenu des renseignements sur la façon de faire ses déclarations lorsqu'il a présenté sa demande renouvelée.

    Le conseil a conclu, à la majorité, que le prestataire n'avait pas produit ses déclarations à temps et n'avait pas démontré qu'il avait un motif valable pour expliquer ce retard, aux termes du par. 10(5) de la Loi sur l'assurance-emploi.

    Majoritairement, les membres du conseil ont jugé que le prestataire n'avait pas fait ce qu'une personne raisonnable aurait fait pour se renseigner plus tôt en communiquant avec la Commission au sujet de ses prestations.

    Dans une lettre qui est parvenue à la Commission en mars 2006, le prestataire déclarait ce qui suit : « Je vous écris pour vous informer que j'ai entrepris des démarches pour présenter une demande de prestations d'assurance-emploi vers la fin de novembre. Je me suis présenté aux Ressources humaines, à Lindsay, où on m'a dit de faire mes déclarations en ligne. Puis, on m'a appelé pour vérifier mon code postal. Je suis resté quelques semaines sans nouvelles. J'ai donc refait la même démarche en me rendant aux Ressources humaines à Lindsay et en présentant une nouvelle demande. J'imagine qu'il doit bien y avoir une trace quelconque de ma première démarche, puisqu'on a communiqué avec moi par téléphone au sujet de mon code postal. » [Traduction]

    Le membre dissident au sein du conseil arbitral note que le prestataire mentionne, à la pièce 6, qu'il ne se souvient pas d'avoir reçu quelque avis que ce soit par la poste. Son père a également indiqué qu'il n'avait eu connaissance d'aucun avis que son fils aurait reçu en provenance de Service Canada. Le membre dissident estime que la demande de prestations devrait être antidatée de façon à prendre effet le 13 novembre 2005. Il en vient à la conclusion que le prestataire était déconcerté devant la démarche à suivre et qu'il n'a jamais reçu les premières instructions. Le fait qu'il soit retourné au bureau de Lindsay en février pour s'enquérir de la situation en témoigne. Il ne devrait pas être pénalisé pour son manque d'expérience dans l'utilisation de la technologie moderne.

    J'ai examiné cette affaire et pris en considération les arguments que m'ont soumis le prestataire et l'avocat de la Commission. Il n'y a rien qui prouve que le prestataire ait reçu les cartes de déclaration qu'il devait remplir. Il semble qu'au bureau de Lindsay, on lui ait demandé de faire ses déclarations en ligne. Or, le prestataire n'était pas habitué à utiliser Internet et ne connaissait pas bien les ordinateurs.

    Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que la décision qu'aurait rendue le membre dissident devrait être celle qui prévaut. Je suis d'avis qu'il ne suffit pas, pour Service Canada, d'exiger que tous les demandeurs fassent leur demande par Internet ou via le système Télédec. Le système des cartes de déclaration a été en usage pendant de longues années, et bien que les moyens technologiques modernes puissent s'avérer plus commodes pour Service Canada, cela n'est pas nécessairement le cas pour les prestataires ne possédant ni les connaissances ni la formation requises pour faire leurs déclarations en ayant recours à ces nouvelles méthodes.

    Je suis d'avis que le régime de l'assurance-emploi a l'obligation de faire de son mieux pour aider les prestataires à déclarer correctement leurs activités, comme ils sont tenus de le faire quand ils touchent des prestations. Dans le cas qui nous occupe, une fois la demande reçue, il incombait à la Commission de faire en sorte que le prestataire ait le choix de recourir aux cartes de déclaration, au système Télédec ou encore à l'ordinateur pour faire ses déclarations. Le fait que le prestataire n'ait pas reçu de cartes de déclaration et qu'on lui ait simplement demandé de confirmer son code postal m'amène à croire que Service Canada a failli à l'obligation d'aider ce jeune prestataire dans sa démarche pour obtenir des prestations.

    Pour ces motifs, je suis convaincu que la décision de la majorité des membres du conseil doit être annulée et que la décision qu'aurait rendue le membre dissident doit être confirmée. En conséquence, l'appel du prestataire est accueilli et la décision de la Commission ainsi que de la majorité des membres du conseil arbitral est annulée.

    David G. Riche

    JUGE-ARBITRE

    St. John's (T.-N.-L.)
    Le 14 septembre 2007

    2011-01-16