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  • CUB 69771

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    et

    d'une demande de prestations

    et

    d'un appel interjeté par la Commission à l'encontre de la décision rendue par un conseil arbitral le 5 janvier 2007 à Sydney (Nouvelle-Écosse)

    DÉCISION

    Le juge-arbitre David G. Riche

    En l'espèce, la question est de savoir si le prestataire était fondé à quitter son emploi, aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi.

    Le prestataire travaillait dans l'industrie forestière. Il croyait avoir droit aux prestations parce qu'il avait fait des quarts de nuit pendant huit semaines et avait perdu des heures de travail parce que les machines étaient tombées en panne. Il a aussi indiqué qu'il parcourait 80 kilomètres pour travailler seulement deux ou trois heures par jour, puis qu'il retournait chez lui sans être rémunéré. Le prestataire, qui touchait un salaire moins élevé que les autres employés, avait aussi eu des problèmes relativement à l'obtention d'une augmentation de salaire.

    Le conseil arbitral a accueilli l'appel interjeté par le prestataire à l'encontre de la décision de la Commission, qui lui refusait l'admissibilité au bénéfice des prestations. Selon la Commission, le prestataire n'avait pas prouvé qu'il était fondé à quitter son emploi.

    En appel devant le conseil arbitral, le prestataire a déclaré qu'il estimait avoir droit à la même augmentation de salaire que les autres employés. Il a indiqué que ses conditions de travail et son horaire lui avaient occasionné tellement de stress qu'il avait dû consulter un médecin à Port Hawkesbury.

    Il a informé le conseil que le jour où il avait quitté son emploi, il n'avait pas quitté le lieu de travail immédiatement après avoir reçu sa paye, mais avait attendu environ une heure avant de le faire. Il a aussi dit au conseil qu'il travaillait tous les samedis et qu'il avait effectué des quarts de nuit pendant huit semaines parce qu'il y avait un conflit entre lui et son employeur. Il avait le sentiment que son employeur était furieux contre lui parce que sa machine était tombée en panne.

    Le prestataire a également souligné que son employeur ne l'avait jamais informé du fait qu'il lui accorderait une augmentation d'un dollar l'heure.

    Le conseil arbitral a estimé que le prestataire était crédible et a établi qu'il semblait y avoir un conflit de personnalités entre lui et son employeur; il semble en effet que l'employeur l'ait fait marcher, car il ne le traitait pas de la même façon que les autres employés. Selon le conseil, le prestataire aurait dû être traité de la même façon que les autres employés et être informé, lors de sa dernière conversation avec l'employeur, du fait qu'il allait être augmenté d'un dollar. Si tel avait été le cas, le prestataire n'aurait pas quitté son emploi. Pour ces raisons, le conseil a accueilli l'appel du prestataire en vertu des sous-alinéas 29c)(x) ou (xiv) de la Loi.

    La Commission était d'avis que le prestataire n'était pas fondé à quitter son emploi. Le prestataire aurait selon elle demandé une autre augmentation d'un dollar à son employeur, qui lui aurait répondu qu'il n'avait pas assez d'expérience, mais que la direction allait tout de même prendre quelques jours pour étudier la question. Toutefois, le prestataire n'était pas retourné voir son employeur, et l'employeur n'avait pas informé le prestataire qu'il lui accordait une augmentation d'un dollar.

    La Commission est d'avis que le conseil a commis une erreur de fait et de droit en concluant que le prestataire était fondé à quitter son emploi. Elle a insisté sur le fait que le prestataire ne devait avoir d'autres solutions raisonnables que de quitter son emploi lorsqu'il l'a fait. En l'espèce, la Commission considère que le prestataire n'a pas envisagé toutes les solutions qui s'offraient à lui avant de quitter son emploi, et elle soutient que le conseil a commis une erreur en n'appliquant pas les bons critères juridiques et en n'expliquant pas pourquoi il avait accordé plus de poids au témoignage du prestataire qu'aux déclarations de l'employeur.

    J'ai examiné les éléments de preuve et les faits établis par le conseil arbitral en l'espèce. Le conseil arbitral a le droit de tirer des conclusions relativement à la crédibilité. Les éléments de preuve, qui ne semblent pas être contestés en l'espèce, montrent qu'il y avait une certaine animosité entre le prestataire et l'employeur en raison de l'incident de la panne. Il y avait aussi la question de la différence entre le salaire du prestataire et celui des opérateurs plus expérimentés. La preuve montre que si l'employeur avait pris le temps et fait l'effort d'informer le prestataire qu'il allait obtenir une augmentation d'un dollar, ce dernier n'aurait pas quitté son emploi. Compte tenu des éléments de preuve, j'aurais tendance à me ranger du côté du conseil arbitral, qui a établi qu'il existait une relation conflictuelle entre l'employeur et le prestataire. Je me suis aussi penché sur la question des quarts de nuit que le prestataire avait dû effectuer pendant huit semaines et pour lesquels il n'y avait aucune explication. Selon le dossier, le prestataire devait normalement travailler deux semaines de jour et deux semaines de nuit. Ce n'est apparemment pas ce qui est arrivé, et le prestataire a eu l'impression d'être puni en raison de la relation conflictuelle qu'il y avait entre lui et l'employeur.

    J'ai examiné les éléments de preuve au dossier ainsi que la décision du conseil arbitral et je ne crois pas que cette décision doive être annulée au motif qu'elle va à l'encontre de la Loi. En l'espèce, le fait que l'employeur ait fait languir le prestataire relativement à son augmentation de salaire en sachant très bien qu'il allait la lui accorder et le fait que le prestataire ait dû travailler de nuit à plusieurs reprises montrent qu'il y avait bel et bien une relation conflictuelle entre le prestataire et son employeur.

    J'ai examiné les faits établis par le conseil et je crois que ce dernier disposait de suffisamment d'éléments de preuve pour conclure que le prestataire était fondé à quitter son emploi en raison du comportement de son employeur, comportement qui avait fini par créer une relation conflictuelle. Rien ne prouve que la relation conflictuelle était imputable au prestataire. Dans ces circonstances, je suis d'accord avec la décision du conseil arbitral, selon laquelle le prestataire était fondé à quitter son emploi parce qu'il entretenait avec son employeur des relations conflictuelles dont la cause ne lui était pas essentiellement imputable.

    En appel devant le juge-arbitre, le prestataire a indiqué qu'une nuit, l'employeur avait proféré des jurons à son endroit au téléphone et lui avait dit qu'il ne pouvait plus faire confiance à ses employés. Le prestataire a également indiqué qu'il lui arrivait souvent de se déplacer pour seulement une heure ou deux de travail, ce qui était pratiquement inutile, et de devoir ensuite retourner chez lui.

    Compte tenu des éléments de preuve présentés, je suis d'avis que la décision rendue par le conseil arbitral était pertinente et conforme aux dispositions de l'article 29 de la Loi. Par conséquent, l'appel de la Commission est rejeté.

    David G. Riche

    JUGE-ARBITRE

    Le 20 décembre 2007
    St. John's (T.-N.-L.)

    2011-01-16