TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'un appel interjeté devant un juge-arbitre par la Commission à l'encontre de la décision d'un conseil arbitral rendue à Saskatoon (Saskatchewan) le 28 novembre 2007
Le juge-arbitre GUY GOULARD
La prestataire a travaillé du 3 octobre 2005 au 30 juin 2006. Elle a présenté une demande initiale de prestations d'assurance-emploi, laquelle a pris effet le 2 juillet 2006. La Commission a déterminé que la prestataire n'avait pas droit au bénéfice des prestations d'assurance-emploi parce qu'à titre d'enseignante, elle n'était pas admissible au bénéfice des prestations pendant une période de congé. La Commission lui a imposé une inadmissibilité pour la période allant du 10 au 28 août 2006, et cette décision a donné lieu à un trop-payé de 991 $. La Commission a en outre déterminé que la prestataire avait fourni des informations fausses ou trompeuses lorsqu'elle avait omis de déclarer qu'elle avait signé un nouveau contrat avec son employeur. La Commission a infligé une pénalité non pécuniaire à la prestataire et elle lui a donné un avis de violation.
La prestataire a interjeté appel des décisions de la Commission devant un conseil arbitral, lequel a accueilli l'appel. La Commission a ensuite porté en appel la décision du conseil relative à l'inadmissibilité. Le présent appel a été instruit à Saskatoon (Saskatchewan) le 7 mai 2008. La prestataire a signalé qu'elle ne participerait pas à l'audience mais elle a fourni des observations écrites.
L'unique question en litige concerne l'inadmissibilité pour la période allant du 10 au 28 août 2006, étant donné que la Commission a convenu que la prestataire n'était pas liée par un contrat d'enseignement du 30 juin au 10 août 2006, mais qu'elle estime que ladite prestataire est redevenue liée par contrat à partir du jour où elle a accepté celui que lui avait offert l'employeur pour la période scolaire suivante.
La preuve, qui n'a pas été contestée, a permis d'établir ce qui suit :
La prestataire a considéré que sa signature correspondait simplement à son acceptation de l'offre d'emploi de l'employeur, que cela ne constituait pas un contrat d'enseignement valide, et que le contrat avait seulement pris effet le 22 août 2006, date à laquelle l'employeur avait confirmé l'entente contractuelle. La prestataire a soutenu que son contrat d'enseignement précédent avait expiré à la fin de juin 2006, qu'elle avait été sans emploi jusqu'au 28 août 2006, et qu'elle aurait donc dû être admissible au bénéfice des prestations jusqu'à cette date.
Le conseil arbitral a admis l'argument de la prestataire selon lequel elle n'avait pas été liée par un contrat d'enseignement du 30 juin au 28 août 2006, soit de la date à laquelle son contrat précédent était arrivé à terme à celle où son nouveau contrat avait pris effet. Le conseil a accueilli l'appel de la prestataire, s'appuyant sur la décision CUB 29339.
Dans le cadre de l'appel interjeté contre la décision du conseil arbitral relative à la question de l'inadmissibilité de la prestataire, la Commission a soutenu que le conseil avait commis une erreur de droit lorsqu'il avait conclu que la prestataire était admissible au bénéfice des prestations pendant la période de congé, après qu'elle eut accepté le contrat offert par l'employeur pour la période scolaire suivante. La Commission a signalé que la décision CUB 29339, sur laquelle le conseil s'est fondé, a été infirmée par l'arrêt A-678-95 de la Cour d'appel fédérale. La Commission a fait valoir que la prestataire est redevenue liée par contrat à partir du moment où elle en a accepté un nouveau pour la période scolaire suivante. La Commission a invoqué la décision CUB 65294 ainsi que l'arrêt A-704-97 de la Cour d'appel fédérale à l'appui de sa position.
Les faits en cause dans la décision CUB 65294 et dans les arrêts A-678-95 et A-704-97 (cités ci-dessus) sont fort différents des faits qui constituent la présente affaire.
Dans la décision CUB 65294, le juge-arbitre Urie a décrit comme suit la situation de la prestataire, en ce qui touchait son emploi pour son conseil scolaire :
« Il est important de noter que ni la pièce 8-2 ni la pièce 8-3 n'indique que le contrat de travail permanent de la prestataire a pris fin. Il est mentionné à la pièce 8-2 que la mise en disponibilité prend effet le 1er juillet 2004 et que, comme la prestataire ne retrouve pas son statut d'employée à temps plein, elle est toujours considérée comme étant en disponibilité et son nom figure toujours sur la liste de rappel. Ce qu'il faut comprendre par là, me semble-t-il, c'est que le contrat, du moins à cet égard, est toujours en vigueur et qu'il offre à la prestataire, du fait de sa mise en disponibilité, certains avantages dont elle n'aurait pu se prévaloir si son contrat avait pris fin. »
Dans les affaires A-678-95 et A-704-97 (citées ci-dessus) les prestataires avaient toutes deux accepté l'offre d'un contrat prenant effet avant le début de la période de congé. Dans l'arrêt A-704-97, la Cour s'est exprimée ainsi :
« Le 12 juillet 1993, la défenderesse a accepté un contrat de travail qui, dans tous ses aspects pratiques était rétroactif au 1er juillet 1993. Selon la School Act of British Columbia (S.B.C. chap. 61, art. 1), l'année scolaire a commencé le 1er juillet 1993 et a pris fin le 30 juin 1994. Selon la convention collective de la défenderesse, le salaire annuel de celle-ci lui avait été versé pour l'ensemble de l'année scolaire. Il n'existe aucune preuve que la défenderesse n'ait pas été payée pour la période en question. Permettre à la défenderesse de percevoir des prestations d'assurance-chômage du 12 juillet 1993 jusqu'au moment de sa période d'enseignement au début du mois de septembre reviendrait à la rémunérer deux fois pour cette période de temps. »
En l'espèce, la prestataire a été sans travail et elle n'a pas été liée par contrat jusqu'à ce que son entente contractuelle pour la période scolaire suivante ait été confirmée, c'est-à-dire jusqu'au 22 août 2006. La Commission a considéré que la prestataire a été admissible au bénéfice des prestations jusqu'à la date où elle a accepté un nouveau contrat. La Commission a donc reconnu qu'il y avait eu interruption de l'emploi de la prestataire, conformément à l'alinéa 33(2)a) du Règlement, et que cette interruption s'était prolongée jusqu'à la date précitée. La Commission avait adopté la position contraire dans les affaires A-678-95 et A-704-97 (citées ci-dessus) ainsi que dans les affaires A-811-00, A-664-01 et A-172-05, dans lesquelles la Commission avait conclu que le contrat d'emploi des prestataires n'avait pas pris fin. Dans l'affaire A-172-05 (citée ci-dessus), le juge Nadon a écrit :
« Il n'est pas suffisant de s'en tenir, comme l'a fait en l'instance le Conseil arbitral, aux dates de fin et début des contrats pour déterminer si le contrat de travail dans l'enseignement d'une prestataire a pris fin au sens de l'alinéa 33(2)a) du Règlement. Il faut, en outre ,comme nous l'enseigne A-811-00, précité, déterminer s'il y a eu une rupture claire dans la continuité de l'emploi de la prestataire, de sorte que cette dernière est devenue un « chômeur ». [...] Il ne faut pas oublier que le but de l'exercice n'est pas d'interpréter les dispositions contractuelles afin d'établir les droits respectifs de l'employeur et de l'employé, mais de décider si un prestataire a droit de recevoir des prestations d'assurance-emploi parce qu'il est, de fait, en période de chômage. »
(Souligné par mes soins.)
En l'espèce, la Commission a reconnu qu'il y avait eu rupture dans la continuité de l'emploi de la prestataire, pour reprendre la formule employée par le juge Nadon dans l'arrêt A-172-05 (cité ci-dessus), et que la prestataire était admissible au bénéfice des prestations à partir de sa cessation d'emploi, survenue en juin 2006. Cette décision était conforme à la preuve. Le contrat de la prestataire était arrivé à échéance sans qu'un nouveau contrat lui ait été offert. La prestataire avait par ailleurs cherché et trouvé un autre emploi durant l'été. Si la Commission avait été d'avis qu'il fallait considérer que le contrat accepté par la prestataire en août 2006 avait pour corollaire la continuité de l'emploi, le conseil arbitral aurait été tenu de prendre cette possibilité en considération. La Commission n'avait cependant pas adopté cette position, et elle ne soutient toujours pas cette idée.
Cela étant, la question était de savoir si la prestataire était demeurée en chômage après avoir accepté l'offre d'emploi de l'employeur, en août 2006. Le conseil a conclu que la prestataire était demeurée admissible au bénéfice des prestations jusqu'à ce qu'elle ait commencé à travailler et à gagner un salaire en vertu de son nouveau contrat. Cette situation est identique à celle d'un employé qui attend un rappel au travail, lorsqu'une date de rappel au travail est fixée aux termes d'une nouvelle entente.
Je suis par conséquent d'accord avec le conseil arbitral que le contrat d'emploi de la prestataire a pris fin le 30 juin 2006 et qu'elle était donc admissible au bénéfice des prestations durant sa période de congé, conformément à l'alinéa 33(2)a) du Règlement. L'acceptation du nouveau contrat par la prestataire n'a pas eu pour conséquence la continuation de la relation qui avait antérieurement existé entre l'employeur et l'employée, et la prestataire n'a pas recommencé à toucher une rémunération avant d'avoir commencé à travailler en vertu de son nouveau contrat.
La Commission n'a pas démontré que le conseil arbitral avait rendu une décision entachée d'une erreur de fait ou de droit.
En conséquence, l'appel est rejeté.
Guy Goulard
JUGE-ARBITRE
OTTAWA (Ontario)
Le 15 mai 2008