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  • CUB 70956

    TRADUCTION

    DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    et

    d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la Commission à l'encontre de la décision rendue par un conseil arbitral à Corner Brook (Terre-Neuve-et-Labrador) le 15 ao&ucirct 2007

    DÉCISION

    Le juge David G. Riche

    Dans la présente affaire, la question en litige consiste à déterminer si la prestataire avait un motif valable pour tarder à présenter sa demande de prestation et si elle devrait se voir refuser sa demande d'antidatation en vertu du paragraphe 10(4) de la Loi sur l'assurance-emploi.

    Il y a quelques années, la prestataire avait été congédiée injustement et avait confié le dossier à son avocat. Elle a affirmé qu'elle avait à cette époque communiqué avec le bureau de l'assurance-emploi et qu'un employé lui avait dit qu'elle n'était pas admissible au bénéfice des prestations parce qu'elle avait été congédiée. Ce n'est que le 17 mai 2007 que la prestataire avait reçu une lettre l'informant que les accusations portées contre elle avaient été retirées. Elle avait intenté une poursuite contre son employeur pour congédiement injustifié. Elle n'était pas sûre d'avoir le droit de présenter une demande d'assurance-emploi et c'est la raison pour laquelle elle ne l'a pas fait. La Commission a été d'avis que la prestataire n'avait pas prouvé qu'elle avait un motif valable justifiant son retard, et ce, durant toute la période écoulée.

    Le conseil arbitral s'est fondé sur le paragraphe 10(4), qui est libellé comme suit : « Lorsque le prestataire présente une demande initiale de prestations après le premier jour où il remplissait les conditions requises pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si le prestataire démontre qu'à cette date antérieure il remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu'il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard. »

    Le conseil arbitral s'est ensuite appuyé sur le critère établi dans l'arrêt A-172-85, dans lequel la Cour d'appel fédérale stipule que le prestataire doit avoir agi comme une personne raisonnable l'aurait fait dans sa situation afin de s'informer de ses droits et de ses obligations. Le conseil arbitral a conclu que, dans la présente affaire, il était raisonnable pour la prestataire de croire qu'elle ne serait pas admissible au bénéfice des prestations. Il a également déterminé que la prestataire avait prouvé qu'elle avait un motif valable pour avoir tardé à présenter sa demande renouvelée. Il a donc accueilli son appel et approuvé sa demande d'antidatation. Le conseil a dit estimer que la prestataire avait agi comme une personne raisonnable l'aurait fait.

    Dans son appel, la Commission s'est référée aux pièces 4 et 5. À la pièce 5, la prestataire indique qu'elle a téléphoné au bureau de l'assurance-emploi et qu'on lui a dit qu'elle ne serait pas admissible au bénéfice des prestations parce qu'elle avait été congédiée. Elle a cru qu'elle ne serait pas admissible tant que sa situation ne serait pas résolue. Après le règlement de l'affaire, son avocat lui a conseillé de présenter une demande puisque son relevé d'emploi était en vigueur pour deux ans.

    La Commission s'appuie sur la décision CUB 66294, dans laquelle le juge-arbitre a déclaré ce qui suit : « Une personne raisonnable aurait certainement su qu'engager une poursuite pour congédiement injustifié peut prendre des années et qu'il est possible qu'elle ne donne pas les résultats escomptés. J'estime que, dans ces circonstances, le prestataire n'a pas fait ce qu'aurait fait une personne raisonnable. »

    Dans la présente affaire, il apparaît que la prestataire n'aurait pas normalement eu droit à une antidatation parce qu'elle n'a pas présenté sa demande en temps opportun. Elle ne peut pas évoquer comme motif valable le fait d'avoir attendu l'issue de sa poursuite judiciaire concernant son congédiement injustifié. En l'espèce, toutefois, un employé représentant la Commission a dit à la prestataire qu'il ne servirait à rien de présenter une demande de prestations. Comme l'employé lui a dit cela, et qu'il n'aurait jamais dû le faire, la prestataire n'a pas présenté de demande. Étant donné ces circonstances, je suis d'avis que la prestataire devrait voir sa demande d'antidatation approuvée, comme l'avait déterminé le conseil arbitral, puisque c'est en raison d'une erreur commise par la Commission qu'elle a tardé à présenter sa demande. Selon moi, une personne raisonnable ne présente pas de demande de prestations si la Commission de l'assurance-emploi lui dit qu'elle n'est pas en droit d'en recevoir parce qu'elle a été congédiée. La faute est celle de la Commission. Elle ne devrait jamais dire aux personnes présentant une demande qu'elles ne sont pas admissibles sans avoir examiné attentivement leur demande, et elle devrait leur indiquer par écrit les raisons de sa décision.

    Pour ces motifs, l'appel de la Commission est rejeté.

    David G. Riche

    Juge-arbitre

    Le 5 ao&ucirct 2008
    St. John's (Terre-Neuve-et-Labrador)

    2011-01-16