TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'une demande de prestations présentée par
X
- et -
d'un appel interjeté devant un juge-arbitre par le prestataire à l'encontre de la décision rendue par un conseil arbitral à Laval (Québec) le 20 novembre 2008
Le juge-arbitre MAXIMILIEN POLAK
Le prestataire interjette appel de la décision du conseil arbitral, qui a accueilli l'appel de l'employeur selon lequel il a été congédié en raison de son inconduite.
Cet appel a été instruit à Montréal le 16 septembre 2009, en présence de l'employeur et du représentant du prestataire.
Le prestataire a présenté une demande initiale de prestations d'assurance-emploi qui a pris effet le 13 avril 2008 (pièce 2). Il a travaillé pour X du 27 août 2007 au 11 avril 2008, date à laquelle il a été congédié (pièce 3).
Dans une lettre datée du 9 juin 2008, la Commission a informé le prestataire qu'il n'était pas admissible au bénéfice des prestations d'assurance-emploi parce qu'il a perdu son emploi en raison de son inconduite (pièce 9).
Après que le prestataire eut expliqué sa situation en détail (pièces 10-1 à 10-11), la Commission a informé l'employeur, le 27 juin 2008, qu'elle acceptait la demande de prestations de son ancien employé (pièce 14). Les faits sont les suivants : le prestataire a été embauché comme enseignant alors qu'il possédait un certificat de tolérance d'engagement, valide pour une seule année scolaire (pièce 6-2). Dans un contrat conclu entre l'employeur et le prestataire pour l'année scolaire 2007-2008, le prestataire a souligné le passage suivant : « Si l'enseignant n'est pas accrédité, il devra s'inscrire au programme d'accréditation dès que les cours se donnent. La preuve d'inscription est obligatoire. » [Traduction] (pièce 4-3, paragraphe e).
L'employeur a affirmé que lorsque le ministère de l'Éducation accorde à un enseignant un certificat de tolérance d'engagement, il exige, comme condition essentielle, que cet enseignant s'inscrive à un programme qui mène à l'obtention d'un permis d'enseignement (pièce 7).
Le prestataire ne s'est pas inscrit à un tel programme parce qu'il n'aurait pas été accepté en raison de ses faibles résultats scolaires (pièce 8).
La Commission a d'abord conclu que le prestataire avait perdu son emploi en raison de son inconduite (pièce 9).
Le représentant du prestataire a déclaré que la clause qui exige que le prestataire s'inscrive à un programme d'accréditation n'aurait jamais dû être incluse dans le contrat de travail puisque les cours de ce programme d'accréditation ne sont pas dispensées au Québec (pièce 12).
À la lumière de ces renseignements supplémentaires, la Commission a accepté la demande de prestations d'assurance-emploi du prestataire (pièce 14).
L'employeur a contesté la décision de la Commission. Il a répété que l'inscription au programme d'accréditation en vue de l'obtention d'un permis d'enseignement était une exigence du ministère de l'Éducation (pièce 16).
Il importe de citer les passages suivants de la décision du conseil arbitral, qui a été rédigée en français avec le consentement des parties :
« [...] L'employeur allègue avoir envoyé le prestataire parce qu'il n'avait pas suivi les cours stipulés dans le contrat. Cependant, ce n'était pas la raison principale. En effet, le prestataire exerçait une forme d'intimidation et ne cadrait pas dans l'esprit d'équipe de la dite école. Qui plus est, l'employeur stipule que le prestataire ne faisait pas son travail et qu'il n'avait pas les compétences nécessaires afin d'occuper le dit travail. [...]
[...] Malgré le témoignage des parties, aucun fait nouveau n'a éclairé le Conseil. Le fait que le prestataire n'avait pas son permis d'enseignement ne justifie pas une inconduite au sens de la Loi. Le Conseil est d'avis que l'incompétence n'est pas de l'inconduite. [...]
[...] Il est claire (sic) que selon le contrat, le prestataire devait s'inscrire et suivre le cours et ce à cause de son caractère volontaire ou d'une négligence telle qu'il frôle le caractère délibéré qu'il a perdu son emploi.
Rien n'a été démontré du prestataire, des moyens qu'il a pris pour s'inscrire et suivre le dit programme.
Décision
Unanimement, les membres du Conseil arbitral accueillent l'appel de l'employeur. »
Je n'approuve pas la décision du conseil arbitral selon laquelle le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite.
Même si, aux yeux de l'employeur, le prestataire était incompétent, cela ne constitue pas de l'inconduite. Le conseil arbitral est correctement arrivé à cette conclusion.
Cependant, en jugeant que le fait que le prestataire ne s'est pas s'inscrit au programme constituait une inconduite, le conseil arbitral a commis une erreur de fait et de droit.
Contrairement aux déclarations de l'employeur, un détenteur d'un certificat de tolérance d'engagement d'une durée d'un an n'a aucune obligation de suivre un cours (pièce 6-2). De plus, l'employeur a lui-même déclaré devant le conseil arbitral que le fait que le prestataire n'ait pas suivi le cours en question n'est pas la raison principale de son congédiement (pièce 19-4).
Dans son appel de la première décision de la Commission, le prestataire a affirmé qu'il ne pouvait pas s'inscrire à un programme d'accréditation parce qu'un tel programme n'existe pas au Québec pour des personnes possédant un diplôme tel que le sien (pièce 10-4). Et, dans l'éventualité où un tel programme mènerait à l'obtention d'un baccalauréat en enseignement, il ne pourrait pas s'inscrire parce que sa moyenne scolaire n'est pas suffisamment élevée (pièce 10-5).
Le conseil arbitral n'a jamais tenu compte de ces éléments de preuve. En l'espèce, rien n'indique que le comportement du prestataire constituait de l'inconduite.
Je suis d'accord avec la conclusion de la Commission selon laquelle les faits ne permettent pas de conclure qu'il y a eu inconduite parce que la clause qui exigeait que le prestataire s'inscrive à un programme d'accréditation n'aurait jamais dû être incluse dans le contrat de travail. De toute façon, le prestataire ne pouvait pas s'inscrire, soit parce que le programme n'existe pas au Québec ou soit parce le prestataire ne satisfaisait pas aux exigences d'inscription. Mais, plus important encore, il n'y avait aucune obligation pour le prestataire de suivre un cours imposé par le ministère de l'Éducation.
Par conséquent, je conclus que le conseil arbitral a commis une erreur de fait et de droit.
Pour ces motifs, l'appel du prestataire est accueilli. La décision du conseil arbitral est annulée et la décision de la Commission d'accepter la demande de prestations du prestataire est confirmée.
Maximilien Polak
JUGE-ARBITRE
Montréal (Québec)
Le 16 octobre 2009