CUB CORRESPONDANT : 73661A
DÉCISION DE LA COUR D'APPEL FÉDÉRALE CORRESPONDANTE : A-16-10
TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE de la LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d'une demande de prestations présentée par
X
- et -
d'un appel interjeté devant un juge-arbitre par la Commission de l'assurance-emploi du Canada à l'encontre de la décision rendue par un conseil arbitral à Barrie (Ontario) le 10 mars 2009
Le juge R.J. Marin
Le présent appel, interjeté par la Commission, a été instruit à Barrie le 9 novembre 2009.
Les questions en litige sont les suivantes : la répartition d'une rémunération que la prestataire n'a pas déclarée, et des déclarations fausses ou trompeuses qu'elle aurait faites et pour lesquelles on lui a infligé une pénalité et donné un avis de violation.
La décision portant sur la répartition de la rémunération est fondamentale puisque si elle n'est pas confirmée, les autres décisions rendues par la Commission seront sans objet.
Des éléments de preuve figurant au dossier d'appel, à partir de la pièce 4-1, montrent que la prestataire a travaillé entre le 28 mai et le 25 juin 2006 et qu'elle a tiré une rémunération de ce travail, comme en fait foi une déclaration qu'a fournie l'employeur au ministère du Développement des ressources humaines du Canada (DRHC), à la demande de celui-ci. Comme il s'agit d'une exigence de DRHC, l'employeur était tenu par la loi de faire cette déclaration. Toute information inexacte ou erronée peut entraîner des pénalités. Le juge des faits doit faire une appréciation juste à cet égard.
Je suis d'avis que le conseil n'a pas accordé à cette information sa juste valeur, ni tenté de la placer dans le contexte des faits établis en l'espèce.
Je me rapporte également à la pièce 4-2, qui consiste en une note d'explication manuscrite de la prestataire indiquant qu'elle accumulait ses heures à son lieu de travail. Cette note laisse entendre que la prestataire a été malade, puis qu'elle est revenue au travail et qu'elle a été payée alors qu'elle n'a pas nécessairement eu à travailler. Cette déclaration aussi est hors contexte. Malheureusement, le conseil aurait dû tenir compte de cette déclaration puisqu'elle est incompatible avec les éléments de preuve soumis lors de l'audience.
Il existe un autre élément de preuve important, soit la pièce 4-6. Il s'agit d'un document concernant la période de paie de la prestataire allant du 10 au 16 juin 2006, c'est-à-dire la période qui fait l'objet d'un examen, et qui indique que la prestataire a alors travaillé et reçu une rémunération.
De plus, la pièce 9-1 appuie la conclusion de la Commission selon laquelle la prestataire a travaillé durant la période qu'elle [la Commission] a mentionnée. La pièce 9-1, que l'employeur a fournie à un agent de la Commission, indique ceci : « Elle (la prestataire) a travaillé mardi, mercredi, jeudi et vendredi, et a accumulé 32 heures. Son salaire brut a été de 432 $. » [Traduction] La prestataire est retournée travailler le 30 mai 2006. Un document confirme le paiement pour la période visée.
Voilà les éléments de preuve dont le conseil devait tenir compte, en plus de l'argument logique de l'avocat de la prestataire. Sans vouloir manquer de respect au conseil, je crois que celui-ci a perdu de vue l'objectif principal. La prestataire a déposé des éléments de preuve pour démontrer qu'elle n'était pas retournée avant une date ultérieure. Le conseil a accordé foi à son témoignage et a accueilli l'appel.
Je crois fermement que le conseil a commis une erreur de droit en accueillant l'appel, car il a omis d'appliquer la jurisprudence bien établie découlant de l'arrêt El Maki (A-737-97), jurisprudence selon laquelle le conseil ne peut faire abstraction de la preuve documentaire à moins qu'il n'explique pourquoi il ne tient pas compte d'un tel élément de preuve. C'est précisément ce qu'a fait le conseil, mais il n'a pas expliqué pourquoi il avait agi ainsi et, ce faisant, il a commis une erreur de droit.
Je dois malheureusement en venir à la conclusion que le conseil a commis une erreur de droit. La prestataire a bel et bien été rémunérée, cette rémunération a été correctement répartie et, à mon avis, le conseil a rendu la mauvaise décision pour les mauvaises raisons.
Conformément aux pouvoirs qui me sont conférés en vertu de l'article 117 de la Loi, je rendrai la décision que le conseil aurait dû rendre, à savoir confirmer la répartition effectuée par la Commission. La prestataire n'a pas déclaré sa rémunération comme elle était tenue de le faire (pièce 13) et il y a eu déclaration fausse ou trompeuse. Je conclus que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en infligeant une pénalité, et j'estime que l'avis de violation était justifié.
L'avocat de la prestataire accorde beaucoup d'importance au fait que l'employeur ne s'est pas présenté à l'audience, ce qui n'est pas courant. Selon la loi, la preuve par ouï-dire est admissible, et le conseil ne peut être blâmé de ne pas avoir exigé de témoignage de l'employeur dans les circonstances.
J'accueille donc l'appel, j'annule la décision du conseil et je confirme les décisions initiales rendues par la Commission en l'espèce.
R.J. MARIN
JUGE-ARBITRE
OTTAWA (Ontario)
Le 30 novembre 2009