DÉCISION DE LA COUR D'APPEL FÉDÉRALE CORRESPONDANTE : A-281-11
TRADUCTION
DANS L’AFFAIRE de la LOI SUR L’ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d’une demande de prestations présentée par
M.Q.
- et -
d’un appel interjeté devant un juge-arbitre par la Commission
à l’encontre de la décision rendue par un conseil arbitral
à Sudbury (Ontario) le 15 septembre 2010
Le juge-arbitre L.-P. LANDRY
La Commission interjette appel de la décision du conseil arbitral qui a accueilli l’appel interjeté par le prestataire à l’encontre de la décision de la Commission de rejeter la demande d’antidatation de ce dernier.
Le prestataire a travaillé pour Chemin de fer Canadien Pacifique du 17 mai 1980 au 26 juillet 2009. Selon son relevé d’emploi, il a accumulé 2 149 heures d’emploi assurable au cours de ses 27 dernières périodes de paye. Il a présenté une demande de prestations le 29 juin 2010. Après avoir été informé qu’il n’avait accumulé que 169 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence, soit de juin 2009 à juin 2010, le prestataire a demandé que sa demande de prestations soit antidatée afin qu’elle prenne effet en juillet 2009. La Commission a rejeté cette demande, mais elle a déterminé qu’il était possible d’antidater la demande de prestations afin qu’elle prenne effet le 2 février 2010 puisque le prestataire avait démontré qu’il avait un motif valable pour tarder à présenter sa demande de prestations entre le 26 juillet 2009 et le 2 février 2010.
En l’espèce, il s’agit de déterminer si le prestataire a démontré qu’il avait un motif valable pour tarder à présenter sa demande de prestations entre le 2 février et le 27 juillet 2010.
Selon la preuve, le prestataire était affecté à des tâches légères avant de partir en vacances, durant l’été 2010. À son retour au travail, il a été informé que son poste avait été aboli et qu’il devrait faire réactiver sa demande auprès de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT). Le prestataire a donc présenté une demande auprès de la CSPAAT et, le 2 février 2010, il a été informé par téléphone que sa demande ne pouvait pas être réactivée. Le 20 avril 2010, il a reçu une lettre de la CSPAAT lui confirmant que sa demande ne pouvait pas être réactivée.
Puisque le prestataire avait été dirigé vers la CSPAAT, son employeur ne lui a pas remis un relevé d’emploi indiquant qu’il avait été mis à pied en juillet 2009. En fait, l’employeur a finalement produit un relevé d’emploi en juillet 2010, après que la Commission lui en eut fait la demande. Le relevé d’emploi indiquait que le prestataire avait quitté son emploi en raison d’une maladie ou d’une blessure.
Entre le 2 février et le 29 juin 2010, le prestataire avait poursuivi ses efforts en vue de régler la situation dans laquelle il se trouvait avec la CSPAAT et son syndicat. Il avait demandé à son employeur de lui remettre un relevé d’emploi, mais en vain. Finalement, le prestataire avait appris qu’un ancien employé qui se trouvait dans la même situation que lui s’était vu accorder le bénéfice des prestations d’assurance-emploi; par conséquent, il avait présenté une demande de prestations le 29 juin, et ce, même s’il n’avait toujours pas reçu son relevé d’emploi à cette date.
Le conseil a déterminé que le prestataire avait un motif valable pour tarder à présenter sa demande de prestations entre février et juin 2010. Il a conclu ce qui suit :
« Le prestataire a agi comme l’aurait fait une personne raisonnable dans sa situation. Lorsqu’il a été mis à pied, il s’est fait conseiller par son employeur de faire réactiver sa demande auprès de la CSPAAT et son relevé d’emploi ne lui a pas été remis. Ce n’était qu’en février 2010 qu’il a appris que sa demande auprès de la CSPAAT était rejetée. Ce n’est qu’en avril 2010 qu’il a reçu l’avis de la CSPAAT indiquant que sa demande était rejetée. Il a communiqué avec son syndicat pour obtenir de l’aide concernant sa demande auprès de la CSPAAT, mais ce dernier ne lui a donné des nouvelles qu’en mai 2010. » [Traduction]
Il convient de noter qu’en l’espèce, le prestataire avait déjà reçu des indemnités de la CSPAAT et qu’il avait été affecté à des tâches légères lorsqu’il était retourné travailler pour son employeur. Lorsque le poste dans le cadre duquel il accomplissait des tâches légères a été aboli, le prestataire s’est fait diriger vers la CSPAAT par son employeur, et il était certain qu’il recommencerait à toucher des indemnités. Cette certitude a semé de la confusion quant à sa situation. En effet, lorsque son employeur a produit le relevé d’emploi en juillet 2010, il a indiqué que le prestataire avait quitté son emploi en raison d’une maladie ou d’une blessure. Or, comme il est mentionné ci-dessus, ce n’était pas le cas. Le poste dans le cadre duquel il accomplissait des tâches légères avait été aboli.
À la lumière des faits en l’espèce, j’estime que la conclusion du conseil est raisonnable. Le conseil était en droit de conclure que le prestataire avait démontré qu’il avait, durant toute la période s’échelonnant de juillet 2009 à juillet 2010, un motif valable pour tarder à présenter sa demande de prestations.
Pour ces motifs, l’appel est rejeté.
L.-P. LANDRY
JUGE-ARBITRE
Gatineau (Québec)
Le 2 juin 2011