TRADUCTION
DANS L’AFFAIRE de la LOI SUR L’ASSURANCE-EMPLOI
- et -
d’une demande de prestations présentée par
V.I.
- et -
d’un appel interjeté devant un juge-arbitre
par l’employeur, Art-FX Inc.,
à l’encontre de la décision rendue par un conseil arbitral
à Moncton (Nouveau-Brunswick) le 24 mars 2010
Le juge-arbitre M.E. LAGACÉ
L’employeur a interjeté appel de la décision unanime du conseil arbitral (le conseil) de ne pas exclure le prestataire du bénéfice des prestations d’assurance-emploi aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (la Loi) parce qu’il aurait quitté volontairement son emploi sans justification.
Faits pertinents
Le prestataire a indiqué qu’il avait quitté volontairement son emploi pour trois raisons : il aurait de meilleures chances d’être rappelé au printemps, il aurait un meilleur horaire avec un autre employeur et il travaillerait plus près de chez lui. Malheureusement, il n’a pas conservé son nouvel emploi aussi longtemps qu’il l’avait espéré, et il a donc présenté une demande de prestations d’assurance-emploi.
À la lumière des éléments de preuve obtenus, la Commission a déterminé que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi parce qu’il en avait trouvé un autre avant son départ. En conséquence, la Commission a accueilli la demande de prestations. L’employeur a interjeté appel de la décision devant le conseil.
À l’audience, le conseil a écouté l’employeur et le prestataire expliquer leur situation relativement à la question en litige. Après avoir analysé leurs explications, le conseil a conclu que le prestataire était fondé à quitter son emploi et a donc rejeté l’appel de l’employeur.
Dans son appel devant le juge-arbitre, l’employeur a allégué que le conseil avait fondé sa décision sur une constatation des faits erronée, faite de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve portés à sa connaissance.
Le représentant de l’employeur s’est présenté devant le soussigné. Quant au prestataire, il n’a pas assisté à l’audience pour présenter ses arguments, mais le représentant de la Commission a avancé des arguments contre l’appel de l’employeur et a appuyé le bien-fondé de la décision du conseil.
L’employeur a soutenu qu’il avait investi du temps et de l’argent dans la formation du prestataire et que, si le prestataire avait conservé son emploi et poursuivi sa formation, il occuperait actuellement un poste à temps plein plutôt que de toucher des prestations d’assurance-emploi parce qu’il avait pris une mauvaise décision. Le soussigné peut comprendre que l’employeur soit déçu d’avoir perdu un employé au talent prometteur qui, au lieu de toucher un bon salaire au sein de son entreprise, a quitté son poste pour aller travailler pour un employeur qui ne lui offrait aucune sécurité d’emploi.
Aucune transcription de l’audience devant le conseil n’a été faite. Par conséquent, le soussigné doit se fonder sur la constatation des faits présentée par le conseil lorsqu’il a rendu sa décision et sur les éléments de preuve au dossier, puisqu’il ne peut pas vérifier les éléments de preuve présentés par l’employeur et le prestataire lors de l’audience. De plus, il ne faut pas oublier que, étant donné qu’il a pu entendre les arguments de l’employeur et du prestataire, le conseil était beaucoup plus habilité que le soussigné à juger de tous les éléments de preuve, notamment la situation du prestataire et son état d’esprit au moment de son départ, ainsi qu’à décider si le prestataire était fondé à quitter son emploi.
Il est facile pour l’employeur de prétendre rétrospectivement que le prestataire a pris une mauvaise décision en quittant son emploi, puisqu’il est maintenant au chômage. Toutefois, il faut aussi tenir compte du fait que le prestataire ne se sentait pas à l’aise dans le poste qu’il a quitté. Il lui fallait plus qu’une promesse d’emploi à temps plein conditionnel à l’issue de sa formation, qui ne progressait pas assez rapidement à son goût. S’il avait reçu une meilleure formation et qu’on l’avait assuré qu’il obtiendrait un emploi à temps plein au sein de cette entreprise, qui sait s’il aurait pris la même décision? Le prestataire ne devrait pas être pénalisé aujourd’hui parce qu’il a pris la mauvaise décision à l’époque. Il faut prendre en considération son état d’esprit et les raisons qui ont motivé son départ, et non ce qui s’est produit ensuite pour des raisons hors de son contrôle.
Dans cet appel, le soussigné ne peut substituer ses conclusions à celles du conseil. Il ne peut que vérifier si la décision contestée est justifiée en faits et en droit ou, en d’autres mots, si elle est raisonnable. Le fait que l’employeur n’accepte pas la décision du conseil est compréhensible, mais comme il a perdu un employé dans lequel il avait investi du temps, de la formation et de l’espoir, il ne peut prétendre à l’impartialité. Ces motifs ne suffisent pas à accueillir l’appel. L’employeur n’a pas démontré en quoi la décision du conseil était déraisonnable. L’appel est donc rejeté.
POUR CES MOTIFS, l’appel est rejeté.
M.E. Lagacé
JUGE-ARBITRE
Montréal (Québec)
Le 10 juin 2011