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  • CUB 78543

    TRADUCTION

    DANS L’AFFAIRE de la LOI SUR L’ASSURANCE-EMPLOI

    - et -

    d’une demande de prestations présentée par
    Z.M.

    - et -

    d’un appel interjeté devant un juge-arbitre par le prestataire
    à l’encontre de la décision rendue par un conseil arbitral
    à Montréal (Québec) le 16 novembre 2010

    DÉCISION

    Le juge-arbitre MAXIMILIEN POLAK

    Le prestataire porte en appel la décision d’un conseil arbitral qui a accueilli l’appel interjeté par l’employeur à l’encontre d’une décision initiale de la Commission, qui avait approuvé la demande de prestations de son ancien employé, l’actuel prestataire, parce qu’elle avait jugé que les causes de la perte d’emploi ne constituaient pas de l’inconduite (pièce 7).

    Le présent appel a été instruit à Montréal le 1er décembre 2011. Le prestataire était présent avec son avocat. L’employeur a fait savoir qu’il ne contestait pas l’appel et qu’il n’assisterait pas à l’audience. Comme la décision du conseil arbitral a été rédigée en anglais, j’ai moi aussi décidé de rédiger ma décision en anglais.

    Dans ce dossier, le prestataire a présenté une demande initiale de prestations d’assurance-emploi, qui a pris effet le 4 avril 2010 (pièce 2-1).

    Le prestataire a travaillé pour SIXTY CANADA RETAIL du 15 mai 2006 jusqu’à son congédiement, le 1er avril 2010 (pièce 3).

    Selon le prestataire, il a été congédié parce qu’il n’a pas informé le siège social de la présence de photos nues d’un collègue de travail sur un site Internet gai et que certains employés avaient apparemment vu les photos. Le prestataire a tenté de dissuader son adjoint d’envoyer les photos et lui a dit : « Ne fais rien qui pourrait nous causer des ennuis » [Traduction]. L’adjoint a quand même envoyé le courriel. Le prestataire a déclaré que c’était injuste parce qu’il n’avait rien à voir dans l’affaire. Le 1er avril 2010, deux semaines environ après l’envoi des photos, le directeur des opérations de l’employeur est venu au magasin et a congédié le directeur adjoint ainsi que le prestataire (pièce 4).

    Selon l’employeur, le prestataire a été congédié pour avoir enfreint la politique de la compagnie concernant l’usage inapproprié de l’ordinateur au travail. Le prestataire était juste à côté de la personne qui envoyé le courriel et il savait ce qui se passait. Il a agi de façon très malséante pour un gestionnaire responsable (pièce 5).

    Le prestataire a soutenu qu’il n’était pas à côté du directeur adjoint lorsque celui-ci a expédié le courriel. Il se trouvait ailleurs sur le plancher. L’employeur pouvait le constater en regardant les images que les caméras de vidéosurveillance avaient captées (pièce 6).

    La Commission a conclu que les faits n’autorisaient pas à conclure qu’il y avait eu inconduite et elle a accepté la demande de prestations (pièce 7).

    L’employeur conteste la décision de la Commission. Il allègue que le prestataire était juste à côté de l’un de ses employés lorsque celui-ci a téléchargé une photo pornographique du site Web, puis a communiqué avec une autre employée du magasin de Laval pour lui dire qu’il allait lui envoyer la photo par courrier électronique. Il s’agissait d’une photo pornographique d’un employé du siège social. Tout cela a été confirmé par les images captées par les caméras de sécurité (pièce 8).

    Compte tenu de ces nouveaux renseignements, la Commission a jugé qu’il y avait suffisamment d’information pour prouver que le prestataire avait perdu son emploi à cause de son inconduite. La Commission recommande donc que le conseil arbitral accueille l’appel de l’employeur (pièce 11-5).

    Il est important de citer les extraits suivants de la décision du conseil arbitral :

    « ... Le prestataire a déclaré qu’il n’était pas au courant de l’échange de photos entre son adjoint et les autres employés. Il nie formellement l’avoir été. Cette version est corroborée par un ancien collègue de travail, Z.E.

    Le prestataire a également déclaré qu’il n’avait jamais pensé qu’une telle situation pouvait entraîner son congédiement, et il a ajouté qu’il ne savait pas que ces photos circulaient.

    La représentante de l’employeur, Mme S.Q., a déclaré que le prestataire lui avait admis le contraire et que les versions de tous les autres employés allaient dans le même sens.

    [...] Le conseil arbitral estime que puisque le prestataire est 90 % du temps à côté du directeur adjoint et qu’il partage le même ordinateur, et compte tenu du témoignage de Mme S.Q. concernant les conversations qu’elle a eues avec le prestataire et les autres employés, il est beaucoup plus probable que le prestataire savait que les photos étaient envoyées à d’autres magasins de la chaîne depuis son propre magasin.

    Toutes les pièces que l’employeur a déposées montrent clairement que le comportement du prestataire est inacceptable et justifie un congédiement, ce qui est arrivé en l’espèce.

    DÉCISION

    Pour ces motifs, le conseil arbitral ACCUEILLE À L’UNANIMITÉ l’appel de l’employeur. »
    [Traduction]

    Dans son appel, l’avocat du prestataire allègue que le conseil arbitral a commis une erreur de fait et de droit en concluant que le prestataire avait perdu son emploi à cause de son inconduite (pièce 11-5).

    Je donne raison au prestataire. Celui-ci a nié avoir été mêlé à l’échange de photos et sa version a été corroborée par un ancien collègue de travail à l’audience du conseil arbitral.

    La représentante de l’employeur, Mme S.Q., a déclaré le 4 juin 2010 que le prestataire et son adjoint s’étaient servis de l’ordinateur à la caisse principale. Il y avait des caméras à cet endroit. Les images captées par ces caméras montrent le prestataire assis devant l’ordinateur pendant que les photos pornographiques étaient expédiées par courrier électronique. Mme S.Q. a déclaré qu’elle aurait toutes les bandes et la preuve avec elle à l’audience du conseil arbitral (pièces 10-1, 10-2).

    Il appert que ces bandes et cette preuve, qui auraient pu corroborer la version de l’employeur, n’ont pas été produites à l’audience du conseil arbitral. Le conseil arbitral a commis une erreur de fait et de droit parce qu’il n’a pas expliqué pourquoi il avait rejeté la version du prestataire, laquelle était corroborée.

    Selon le paragraphe 49(2) de la Loi sur l’assurance-emploi, le conseil arbitral aurait dû accorder le bénéfice du doute au prestataire, parce que les éléments de preuve présentés de part et d’autre étaient équivalents.

    Je conclus donc que le conseil arbitral a commis une erreur de fait ou de droit.

    Pour ces motifs, j’accueille l’appel du prestataire. La décision initiale de la Commission approuvant la demande de prestations du prestataire est confirmée.

    Maximilien Polak
    JUGE-ARBITRE

    Montréal (Québec)
    Le 20 janvier 2012

    2012-04-04