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  • CUB 30691

    TRADUCTION

    DANS L’AFFAIRE DE LA LOI SUR L’ASSURANCE-CHÔMAGE

    - et -

    d’une demande de prestations présentée par
    LAURIE A. FUREY

    - et -

    d’un appel interjeté devant le juge-arbitre par la Commission de l’emploi et de l’immigration
    du Canada à l’encontre d’une décision du conseil arbitral
    rendue à St. John’s (Terre-Neuve) le 3 décembre 1993.



    CUB CORRESPONDANT : 30691A

    DÉCISION DE LA COUR D'APPEL FÉDÉRALE CORRESPONDANTE : A-819-95


    DÉCISION

    LE JUGE JOHN J. URIE

    Dans sa décision, le conseil arbitral a accueilli l’appel interjeté par la prestataire à l’encontre d’une décision de la Commission. Le conseil a jugé que la prestataire avait été fondée à quitter son emploi parce qu’elle avait été admise à un cours qui, par la suite, avait été annulé en raison du trop faible nombre d’inscriptions; le conseil estimait que cela constituait des «circonstances raisonnables» pour quitter son emploi au sens du paragraphe 28(4) de la Loi sur l’assurance-chômage. Deuxièmement, le conseil arbitral a jugé que la prestataire était disponible pour travailler parce qu’elle ne suivait qu’un cour du soir plus un cours le samedi et qu’elle était donc disponible pour travailler pendant les heures normales de travail.

    Voici un résumé des circonstances. La prestataire avait travaillé comme vendeuse chez Suzy Shier Inc. à St. John’s de juillet 1991 au 10 septembre 1993, date à laquelle elle a quitté son emploi pour s’inscrire à un cours de formation. Elle a présenté une première demande de prestations le 23 septembre 1993, et une période de prestations a été établie à compter du 19 septembre 1993.

    Selon le dossier, elle s’était inscrite et avait été admise à des cours de terminologie médicale au Cabot College. Elle devait suivre des cours les lundi et mercredi en soirée, de 19 h à 21 h, et un deuxième cours d’informatique chaque mardi soir de 19 h à 22 h. Malheureusement, le cours prévu pour deux soirs par semaine a été annulé en raison du manque d’inscriptions, et les seuls cours qu’elle a suivis par la suite étaient des cours donnés le mardi soir et le samedi. Elle a donc pensé qu’elle était disponible pour travailler à temps plein.

    Comme nous l’avons dit précédemment, le second motif sur lequel le conseil arbitral s’est appuyé pour accueillir son appel était sa disponibilité pour travailler, et la Commission, par l’entremise de son avocat, a signalé au début de l’affaire qu’elle ne s’attachait pas à cette question, mais qu’elle ne remettait en cause que le fait qu’elle affirmait avoir volontairement quitté son emploi avec justification. La Commission a ensuite prétendu que le conseil arbitral avait négligé d’examiner la question de savoir si la prestataire avait examiné toutes ses options avant de décider volontairement de quitter son emploi. L’avocat a affirmé que les circonstances de son départ ne constituent pas une «justification» et il a soutenu qu’une personne prudente ne quitterait pas un emploi avant d’avoir un meilleur emploi en vue. Il a ensuite affirmé que le paragraphe 28(4) prévoyait une exemption de l’exclusion seulement si le prestataire n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi et que la prestataire n’avait pas prouvé ce fait. Dans sa décision, le conseil arbitral a affirmé, entre autres choses, ce qui suit :

    Après avoir longuement délibéré, le conseil arbitral pense que la Commission a rendu une décision incorrecte dans l’affaire en l’espèce. Dans la première partie de l’appel, le conseil arbitral estime que la prestataire avait une justification pour quitter son emploi. Elle avait été admise à un cours et avait acquitté la totalité de ses frais d’inscription. Ensuite, le cours a été annulé parce que le Collège n’avait pas suffisamment d’inscriptions. Cela constitue des circonstances «raisonnables» (alinéa 28(4)n) de la Loi sur l’assurance-chômage) pour quitter un emploi.

    Selon la jurisprudence, il est clair que, dans la grande majorité des cas où l’on quitte volontairement un emploi pour suivre un cours, cela est considéré comme une décision personnelle qui, bien que louable, n’équivaut pas à une justification. À mon avis, même s’il s’agit du principe normalement applicable dans les cas de cette nature, il devrait être appliqué dans les circonstances particulières du présent cas. Il ne fait aucun doute que, au moment où la prestataire a présenté sa démission afin de poursuivre des études, elle n’était pas admissible à présenter une demande de prestations d’assurance-chômage et à toucher celles-ci. Elle n’a pas nié cela et, de fait, elle a dit qu’elle ne s’attendait pas à en recevoir. Toutefois, quand les conditions en vertu desquelles elle a quitté son emploi ont changé, c’est-à-dire que le cours qu’elle prévoyait suivre n’était plus offert, elle a été victime d’un changement de situation. La Loi sur l’assurance-chômage comporte des conséquences sociales et puisque la jurisprudence montre qu’en cas de doute, il faut trancher en faveur de la prestataire, je ne crois pas que, dans les circonstances précises de cette affaire, le conseil arbitral avait le droit de rendre la décision qu’il a rendue et d’examiner les faits comme ils se sont déroulés plutôt que de les examiner à compter de la date où elle a présenté une demande. Même s’il y a eu un manquement technique, il ne s’agit pas d’un manquement qui, dans les circonstances particulières, est déterminant et, par conséquent, je pense que le conseil arbitral n’a pas erré en concluant à une «justification» au vu des faits.

    L’appel est donc rejeté.

    JOHN J. URIE

    Juge-arbitre

    OTTAWA (Ontario)
    Le 12 septembre 1995

    2011-01-16