TRADUCTION
DANS L'AFFAIRE DE LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
L.C. 1996, ch. 23
- et -
d'une demande de prestations d'assurance-chômage présentée par
Jasvinder K. Basran
- et -
d'un appel interjeté devant le juge-arbitre par la prestataire
à l'encontre d'une décision du conseil arbitral rendue à
Kamloops (Colombie-Britannique) le 25 août 1999.
DÉCISION
R. C. STEVENSON, JUGE-ARBITRE :
Mme Basran appelle de la décision rendue par le conseil arbitral. Le conseil avait rejeté l'appel initial interjeté par Mme Basran à l'encontre d'une décision de la Commission qui avait jugé que la prestataire n'était pas admissible aux prestations d'assurance-chômage en raison du fait qu'elle avait quitté son emploi sans motif valable.
Bien que l'audience de l'appel ait été fixée le 5 avril dernier à Kamloops, Mme Basran avait indiqué dans sa lettre d'appel qu'elle ne désirait pas se prévaloir d'une audition verbale et, conséquemment, elle ne s'est pas présentée à l'audience. Je rendrai donc une décision à l'égard du présent appel en me fondant sur les documents portés au dossier.
Le 25 juin 1999, Mme Basran a quitté l'emploi qu'elle occupait dans un restaurant Tim Hortons. La prestataire est mère de trois jeunes enfants. Lorsqu'elle se rendait au travail, son mari ou sa soeur s'occupait des enfants à la maison. Un changement de situation est survenu lorsque le mari et la soeur de la prestataire sont tous deux parvenus à se trouver un emploi. Le mari de Mme Basran était en congé les samedis et les dimanches, alors que sa soeur ne travaillait pas les lundis ni les jeudis. Mme Basran a demandé à son employeur l'autorisation de travailler uniquement lors des jours de congé de son mari et de sa soeur. L'employeur n'a pas été en mesure de répondre aux besoins de la prestataire, ou n'a pas voulu le faire. La rémunération de la prestataire s'avérait moindre que les frais de gardiennage qu'elle aurait eu à débourser.
Un prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi si, compte dûment tenu de toutes les circonstances, y compris les circonstances particulières énumérées dans la législation, son départ constitue la seule solution raisonnable dans son cas. L'une de ces circonstances particulières consiste en la nécessité du prestataire de prendre soin de son enfant ou d'un de ses proches parents. À cet égard, veuillez consulter le sous-alinéa 29c)(v) de la Loi sur l'assurance-emploi, qui correspond à l'ancien alinéa 28(4)e) de la Loi sur l'assurance-chômage.
Dans sa décision, le conseil arbitral a soutenu ce qui suit :
La prestataire a quitté son emploi en raison de ses restrictions quant aux quarts de travail et aux jours précis au cours desquels elle n'était pas en mesure de travailler. La prestataire n'a effectué aucune recherche pour se trouver un nouvel emploi avant de quitter celui qu'elle occupait chez Tim Hortons. En outre, la prestataire soutient que des restrictions similaires seraient applicables à tout nouvel emploi. On peut conclure que les restrictions d'emploi posées par la prestataire font en sorte qu'elle connaîtra certaines difficultés à se trouver un emploi convenable dans l'industrie de la restauration-minute. Nous attirons l'attention sur la jurisprudence, comme la décision rendue dans le CUB 33050 à laquelle s'applique la présente décision en l'espèce. Les faits tels qu'ils sont présentés dans cette affaire ne permettent pas de démontrer que la prestataire avait un motif valable de quitter l'emploi qu'elle occupait chez Tim Hortons. [TRADUCTION]
Le CUB 33050 dont fait mention le conseil arbitral constitue une affaire où la prestataire avait quitté son emploi sans chercher d'autres solutions de rechange à cette décision. Dans la présente affaire, Mme Basran s'est efforcée d'obtenir de nouvelles heures de travail en fonction de la disponibilité des autres membres de sa famille à prendre soin de ses enfants.
Il existe d'autres décisions où les juges-arbitres ont exprimé des points de vue fort différents. Par exemple, dans le CUB 25397, le juge-arbitre a soutenu que l'alinéa 28(4)e) de la Loi sur l'assurance-chômage avait une portée significative, étant donné qu'il est légitimement et légalement acceptable pour une personne de quitter son emploi pour prendre soin d'un enfant, à condition que cette personne ait envisagé d'autres solutions de rechange.
L'affaire Canada (Procureur général) c. X * [sic] (1995), 187 N.R. 305, consiste en un cas où la Cour d'appel fédérale a rendu une décision au sujet de l'exclusion qu'a imposée la Commission à une prestataire parce que celle-ci avait quitté son emploi sans motif valable. En outre, la Commission avait jugé que la prestataire n'était pas admissible à recevoir des prestations en raison de son incapacité à prouver sa disponibilité à travailler. L'élément important à retenir de cette décision de la Cour est que chacune des deux questions précédentes doit être prise en considération de manière tout à fait indépendante. Dans l'affaire de Mme Basran, la question de la disponibilité au travail n'est pas soulevée.
Au 9e paragraphe de l'arrêt X,* A-479-94, le tribunal a soutenu ce qui suit :
Cet article [l'article 28 de la Loi sur l'assurance-chômage] a pour effet d'exclure des prestations tout prestataire qui a perdu son emploi par suite d'actes volontaires pour lesquels il ne peut établir aucune « justification ». Il s'agit là d'une disposition légale de longue date qui n'a jamais été considérablement modifiée, mais que le législateur a précisée par l'adjonction d'exemples pratiques de ce qui pourrait constituer une « justification », exemples de cas qui sont tous survenus au cours des années et parmi lesquels figurait la « nécessité de prendre soin d'un enfant ou d'un proche parent ». Ainsi, toute personne qui quitte son emploi pour s'occuper d'un enfant n'est pas exclue du bénéfice des prestations.
Le conseil arbitral a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte du sous-alinéa 29c)(v) de la Loi sur l'assurance-emploi. J'estime qu'il est inutile de renvoyer l'affaire pour une nouvelle audience. Je rendrai donc la décision qu'aurait dû rendre le conseil arbitral.
Compte dûment tenu de toutes les circonstances portées à ma connaissance, Mme Basran était fondée à quitter volontairement son emploi puisque, dans son cas, son départ constituait la seule solution raisonnable.
Par conséquent, l'appel est accueilli et l'exclusion de la prestataire aux prestations est annulée.
Ronald C. Stevenson
Juge-arbitre
Fredericton (Nouveau-Brunswick)
Le 8 juin 2001