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  • Jugement de la Cour d’Appel Fédérale #A-106-89, A-105-89, A-104-89, A-100-89, A-103-89, A-101-89, A-102-89, A-287-89, A-286-89, A-268-89 - LE PROCUREUR GENERAL DU CANADA c. KEVIN, KELLY, ROBERT, DAMICO, ARCHIE, EDEN, NEIL, OLSON, CRAIG, WILLIAMS, ROSS, ARMSTRONG, MICHAEL, AUSTIN, WERNER, DRANGER, ALAIN, GINDROZ, JOHN, MCINTOSH, CHARLES, MORRISON, CHARLES, WHEELER, GEORGE, MITCHELL, GEORGE, KEAGAN, BLAINE, BANNAR, JAMES, ECKHARDT, SHELLEY, MORRISH, KEVIN, REID, KEVIN, SCOTT, ROBERT, STAVENOW, GERRY, WARD, RAYMOND, WHELLER, BRIAN, PRICE, NIKKI, CALDWELL, SCOTT, BELYEA, LIL, McKIM, GARY, MOLLINS, ROBERT, GREEN, PHILLIP, CHURCHILL, SHARON, CUSOVICH, NICHOLAS, CUSOVICH, JOSEPH, DAVID, DANTE, GARDENAL, WILLARD, GARRAWAY, GERARD, GUITAR, CHARLES, HANSFORD, SHIRLEY, HEISLER, ARCHIBALD, HOPKINS, JAMES, McDOUGALL, DENISE, MILLER, JOCELYNE, NADEAU, FRED, TAYLOR, GERLIND, NEFF, MICHAEL, NICHOLLS, W,M., NICHOLSON, CHARLES, PIFER, JOHN, SMITH, BRYAN, TODERICK, EIN, YOUNG, DAVID, SNELL, DANNY, BROWN, STEVEN, HILL, FREDERICK, SKUTA, THOS., TAYLOR, MALCOLM, WHITE, JAMES, WINGER, EDWARD, HOPKINS, TIMOTHY, GONYOU, ELIZABETH, BOSAK, ANGUS, CAMERON, KAREN, TURNER, MICHAEL, McNEVIN, ROBERT, KNOX, HAROLD, ANDERSON, JAMES, W., BROCK, SCOTT, CUFF, FRED, CORBIER, NICHOLAS, CUSOVICH, NIKKI, CALDWELL, STIRLING, CLARK, MICHAEL, DUNPHY, PHILIPPE, DESROCHES, MARIE, DIONNE, DOUGLAS, DONNELLY, PHILIP, DODD, JOHN, FITZGERALD, JAMES, FIELD, DARRELL, P., GIBBONS, EDWARD, HOPKINS, JOHN, HARDY, STEVEN, HILL, EDITH, HEMMINGSEN, ARCHIBALD, HOPKINS, STEPHEN, LAWRENCE, MYLES, M., MORRISH, LILLIAN, McKIM, LARRY, MARKARIAN, JOSEPH, MONTAGUE, ALVIN, MILLER, DALE, MACDONALD, DENNIS, MOREAU, MICHAEL, NICHOLLS, JOCELYN, NADEAU, KEVIN, OSSINGER, THOMAS, PEAKE, MYLES, PAGE, ERNEST, ROSE, JOSEPH, E., RICHARDS, GUY, ROCHON, THOMAS, STEVENSON, RUSSELL, SACKS, ROBERT, STAVENOW, KEVIN, SCOTT, EDWIN, SEWARD, KAREN, TURNER, GARRY, ROBERT, WARD, PATRICIA, WALKER, PAUL, FRASER, RAYMOND, SCHREMPF, BRIAN, FARAGO, ROBERT, GARY, KOWALSKY, WILLIAM, A., CHEESE, PATRICK, FORD

    JUGEMENT DE LA COUR D’APPEL FÉDÉRALE

    Daté :
    le 29 juin 1990

    Dossier :
    A-106-89 / A-105-89 / A-104-89 / A-100-89 / A-103-89 / A-101-89 / A-102-89 / A-287-89 / A-286-89 / A-268-89

    Décision du juge-arbitre :
    CUB 16029 / 16030 / 16032 / 16027 / 16028 / 16031 / 16033 / 16034 / 14387A / 16035

    « TRADUCTION »

    CORAM :

    LE JUGE STONE
    LE JUGE MacGUIGAN
    LE JUGE DESJARDINS

    ENTRE :

    A-106-89 (CUB 16029)

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    KEVIN KELLY, ROBERT DAMICO, ARCHIE EDEN, NEIL OLSON,

    intimés.


    A-105-89 (CUB 16030)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    CRAIG WILLIAMS, ROSS ARMSTRONG, MICHAEL AUSTIN, WERNER DRANGER, ALAIN GINDROZ, JOHN MCINTOSH, CHARLES MORRISON et CHARLES WHEELER,

    intimés.


    A-104-89 (CUB 16032)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    GEORGE MITCHELL,

    intimé.


    A-100-89 (CUB 16027)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    GEORGE KEAGAN, BLAINE BANNAR, JAMES ECKHARDT, SHELLEY MORRISH, KEVIN REID, KEVIN SCOTT, ROBERT STAVENOW, GERRY WARD, RAYMOND WHEELER, BRIAN PRICE, NIKKI CALDWELL, SCOTT BELYEA, LIL McKIM et GARY MOLLINS,

    intimés.


    A-103-89 (CUB 16028)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    ROBERT GREEN, PHILLIP CHURCHILL, SHARON CUSOVICH, NICHOLAS CUSOVICH, JOSEPH DAVIS, DANTE GARDENAL, WILLARD GARRAWAY, GERARD GUITAR, CHARLES HANSFORD, SHIRLEY HEISLER, ARCHIBALD HOPKINS, JAMES McDOUGALL, DENISE MILLER, JOCELYNE NADEAU, FRED TAYLOR, GERLIND NEFF, MICHAEL NICHOLLS, WM. NICHOLSON, CHARLES PIFER, JOHN SMITH, BRYAN TODERCK, EIN YOUNG, DAVID SNELL, DANNY BROWN, STEVEN HILL, FREDERICK SKUTA, THOS. TAYLOR, MALCOLM WHITE, JAMES WINGER, EDWARD HOPKINS, TIMOTHY GONYOU, ELIZABETH BOSAK, ANGUS CAMERON, KAREN TURNER et MICHAEL McNEVIN,

    intimés.


    A-101-89 (CUB 16031)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    ROBERT KNOX, HAROLD ANDERSON, JAMES W. BROCK, SCOTT CUFF, FRED CORBIER, NICHOLAS CUSOVICH, NIKKI CALDWELL, STIRLING CLARK, MICHAEL DUNPHY, PHILLIPPE DESROCHES, MARIE DIONNE, DOUGLAS DONNELLY, PHILIP DODD, JOHN FITZGERALD, JAMES FIELD, DARRELL P. GIBBONS, EDWARD HOPKINS, JOHN HARDY, STEVEN HILL, EDITH HEMMINGSEN, ARCHIBALD HOPKINS, STEPHEN LAWRENCE, MYLES M. MORRISH, LILLIAN McKIM, LARRY MARKARIAN, JOSEPH MONTAGUE, ALVIN MILLER, DALE MACDONALD, DENNIS MOREAU, MICHAEL NICHOLLS, JOCELYN NADEAU, KEVIN OSSINGER, THOMAS PEAKE, MYLES PAGE, ERNEST ROSE, JOSEPH E. RICHARDS, GUY ROCHON, THOMAS STEVENSON, RUSSELL SACKS, ROBERT STAVENOW, KEVIN SCOTT, EDWIN SEWARD, KAREN TURNER, GARRY ROBERT WARD, PATRICIA WALKER, PAUL FRASER et RAYMOND SCHREMPF,

    intimés.


    A-102-89 (CUB 16033)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    BRIAN FARAGO,

    intimé.


    A-287-89 (CUB 16034)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    ROBERT GARY KOWALSKY,

    intimé.


    A-286-89 (CUB 14387A)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    WILLIAM A. CHEESE,

    intimé.


    A-268-89 (CUB 16035)


    ENTRE :

    LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

    requérant,

    - et -

    PATRICK FORD,

    intimé.


    MOTIFS DU JUGEMENT ;
    Prononcé par

    LE JUGE DESJARDINS, J.C.A. :

    Les présentes demandes fondées sur l'article 28 portent sur une décision rendue le 12 décembre 1988 par un juge-arbitre qui agissait sous l'autorité des articles 95 et 96 de la Loi sur l’assurance-chômage (la "Loi"). 1 (la Le litige porte sur le droit de recevoir des prestations d'assurance-chômage lorsqu'un assuré a accompli régulièrement un plus grand nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail que ne le font habituellement dans une semaine les personnes employées à temps plein. I1 s'agit de savoir si les concepts de la paie de congé et du jour de congé que l'on trouve dans les conventions collectives sont interchangeables lorsque les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement sur l’assurance-chômage 2s'appliquent.

    Les dix demandes ont été entendues ensemble. Les intimés étaient tous représentés, sauf Kowalsky, Cheese et Ford qui n'étaient ni représentés ni présents à l'audience tenue devant nous. Le juge-arbitre a rendu une seule décision concernant toutes ces demandes. Les demandes ont été réunies et classées selon la convention collective à interpréter. Le requérant demande la même conclusion pour chacune des demandes.

    J'examinerai les demandes dans l'ordre suivi par le juge-arbitre.


    KELLY WILLIAMS ET MITCHELL


    Kevin Kelly et les personnes mentionnées dans sa demande ("Kelly"), Craig Williams et les personnes mentionnées dans sa demande ("Williams") et George Mitchell et les personnes mentionnées dans sa demande ("Mitchell") sont tous membres de la Guilde de la marine marchande du Canada ("G.M.M.C."), qui est partie à une convention collective conclue avec la Canadian Life Carrier Association ("C.L.C.A."), association qui représente divers transporteurs maritimes.


    La convention collective


    Les conventions collectives régissant ce groupe se composent d'une convention qui a expiré le 31 mai 1987 (la "convention collective") et d'une autre qui est entrée en vigueur le 1er juin 1987 (la "convention collective modifiée").

    L'article 13, l'article clé de la convention collective qui a expiré le 31 mai 1987, se lit comme suit:

    13. Congés accumulés
    13.1 L'officier acquiert des crédits de congé payables pour chaque heure travaillée dans la semaine de travail au cours de laquelle il a accumulé lesdits crédits. Dans le cas des officiers qui travail lent de façon continue durant toute l’année, le paiement peut être déféré à la fin du mois suivant la date d'anniversaire le leur entrée en fonctions pour la Compagnie. Sous la réserve des conditions et exceptions exprimées dans la présente section, l'officier de pont a droit de prendre un congé du navire sur lequel il travaille ce congé étant l'équivalent de deux (2) jours pour chaque six (6) jours travaillés, à raison de huit (8) heures par jour (facteur .334).
    13.2 Chaque officier éligible a droit à un congé accumulé calculé comme suit:
    Chaque officier éligible a droit à .334 de son salaire horaire pour chaque heure travaillée.
    13.3 Les congés accumulés. ne peuvent être pris pour une période inférieure à quatorze (14) jours sans consentement mutuel.
    13.4 Lorsqu'un officier de pont a accumulé quatorze (14) jours ou plus de congé, et moyennant qu'il en ait fait la demande par écrit quinze (15) jours à l'avance, il lui est alloué un minimum de quatorze (14) jours de congé. Cependant, le congé doit se terminer avant le premier jour de décembre. Sur les navires opérant douze (12) mois par année, les congés ne peuvent être pris entre le 1er décembre et le 15 janvier, à moins que des arrangements convenables n'aient été faits au préalable.
    13.5 L'officier de pont n'est pas contraint de prendre congé de son navire ou empêché de le faire.
    13.6 Un seul officier de pont à la fois sur un navire a le droit de prendre congé. Le congé est octroyé selon le rang qu'il occupe sur le navire, à moins qu'il en ait été convenu autrement entre les officiers de pont concernés.
    13.7 Les congés accumulés sont payés à la fin de chaque mois, mais les congés continuent à s'accumuler.
    13.8 Avant de prendre son congé, l'officier doit informer le capitaine par écrit de la date de son retour sur le navire. Si l'officier est rappelé au travail avant l'expiration d'un tel congé, il sera payé au taux des heures supplémentaires pour tout travail effectué entre son retour au travail et la date prévue de l'expiration de son congé, telle qu'indiquée sur l'avis écrit.
    13.9 À compter du 1er juin 1985, l'officier qui a effectué au moins une (1) année d'emploi pour la Compagnie et qui prend congé, a droit, pour l'aller seulement, au remboursement des frais raisonnables de déplacement entre son port de débarquement et son domicile au Canada, moyennant une fois par saison et pour un montant n'excédant pas 180 $. A compter du 1er juin 1986, l'officier qui a effectué au moins une (1) année d'emploi pour la Compagnie a droit, lorsqu'il prend congé, au remboursement des frais raisonnables de déplacement aller-retour entre son navire d'affectation et son domicile au Canada, à raison d'une fois par saison et pour un montant n'excédant pas 360 $. Ces frais comprennent le tarif de première classe de locomotion terrestre plus les repas et le logement, ou le tarif économique par avion, ou l'allocation automobile. À compter du 1er juin 1985, l'allocation automobile sera de 23 cents le kilomètre et, à compter du 1er juin 1986, celle-ci sera de 24 cents le kilomètre lorsqu'il n'existe pas de transport public. Toute réclamation relative à l'allocation de transport doit être accompagnée des reçus originaux couvrant lesdits frais effectivement subis. 3

    Ces dispositions peuvent être résumées comme suit:

    a) Selon la clause 13.1, chaque officier de pont a le droit de prendre un congé du navire sur lequel il travaille, sous réserve des conditions et exceptions énoncées dans cette clause. Le congé auquel l'officier a droit est calculé comme étant l'équivalent de deux jours de congé pour chaque tranche de six journées travaillées à raison de huit heures par jour (soit un facteur de 0,334).
    b) Selon la clause 13.3, un congé ne sera pas accordé pour une période inférieure à 14 jours sans l'autorisation de l'employeur.
    c) Selon la clause 13.4, le congé doit se terminer avant le 1er décembre.
    d) Selon la clause 13.1, l'employé accumule aussi des crédits de congé pour chaque heure travaillée dans la semaine de travail au cours de laquelle il a accumulé lesdits crédits.
    e) Selon la clause 13.2, chaque officier de pont 8 droit à une paie de congé calculée au taux de 0,334 du taux horaire de base pour chaque heure travaillée.
    f) Selon la clause 13.7, la paie de congé est habituellement versée à la fin de chaque mois, mais les congés continuent de s’accumuler. Cependant, selon la clause 13.1, le paiement du congé peut être déféré à la fin du mois suivant la date d'anniversaire de leur entrée en fonction dans le cas des employés qui travaillent de façon, continue toute l’année.
    g) Selon la clause 13.8, lorsqu'un officier de pont est rappelé au travail avant la fin de sa période de congé, il est payé à un taux des heures supplémentaires jusqu'à la date à laquelle le congé aurait normalement expiré.

    Depuis le 1er juin 1987, suivant la clause 13.2 de la convention collective modifiée, chaque officier de pont a droit à un congé non payé calculé d'après le facteur O. 334 pour chaque heure travaillée. insert text 4

    Le 1er juin 1987, la clause 13.7 de la convention collective qui porte sur le paiement mensuel des congés accumulés a été révoquée. 5Selon la clause 14 de la convention collective modifiée, le taux de salaire horaire total comprend la paie de congé qui faisait auparavant l’objet de la rubrique "Paie de congés accumulés par heure" (clause 14). Le congé auquel l’intimé a droit est encore calculé pour chaque heure travaillée conformément à la convention collective antérieure.


    Les faits


    Kelly a déposé une nouvelle demande de prestations d'assurance-chômage auprès de la Commission d'assurance-chômage (la "Commission") le 21 janvier 1987, pour la période débutant le 18 janvier 1987. Sa dernière journée de travail était le 31 décembre 1986. À cette date-là, la Commission a déterminé qu'il avait droit à 49,49 jours de congé accumulés qui n'avaient pas été utilisés. La Commission l'avisé plus tard que ses prestations étaient suspendues du 18 janvier au 6 février 1987 inclusivement, conformément à l'article 8 de la Loi et au paragraphe 42(4) du Règlement, en raison de l'attribution de 49,49 jours de congé non utilisés. 6

    Williams a déposé une demande de prestations d'assurance-chômage auprès de la Commission le 31 décembre 1986. Sa dernière journée de travail était le 29 décembre 1986. I1 avait droit à 91,97 jours de congé accumulés, mais non utilisés au 29 décembre 1986. La Commission a avisé Williams qu'il n'avait pas droit à des prestations pour la période allant du 30 décembre 1986 au 4 avril 1987, en raison de ces 91,97 jours de congé accumulés et non utilisés 7

    Mitchell a déposé une demande de prestations d'assurance-chômage auprès de la Commission le 16 novembre 1987. Sa dernière journée de travail était le 13 novembre 1987. I1 avait droit à 74,50 jours de congé non utilisés et il a reçu une paie de vacances. La Commission l'a avisé qu'il recevrait des prestations à compter du 31 janvier 1988. Conformément à l'article 6 de la Loi et au paragraphe 37(3) du Règlement, la Commission a attribué 71 jours de relâche à la période allant du 13 novembre 1987 au 23 janvier 1988. Les 3,50 jours de relâche qui restaient ont été convertis en sommes d'argent accumulées et inclus dans la paie de vacances attribuée pour la semaine commençant le 24 janvier 1988. 8

    Kelly, Williams et Mitchell ont interjeté appel de la décision qu'a rendue la Commission dans leur cas. Une majorité des membres du conseil arbitral qui ont entendu les appels de Kelly et Williams ont rejeté les appels et confirmé l’attribution des jours de congé faite par la Commission. Le conseil arbitral a accueilli l'appel de Mitchell au sujet de l'attribution des jours de congé pour la période suivant sa dernière journée d'emploi, mais il a confirmé la décision par laquelle la Commission a attribué la paie de vacances à la semaine suivant la dernière période d'emploi.

    Williams et Kelly ont tous deux porté la décision majoritaire du conseil arbitral en appel devant le juge-arbitre. La Commission en a appelé de la décision qu'a rendue le conseil arbitral dans le cas de Mitchell.


    La décision du juge-arbitre


    Lorsqu'il a rendu sa décision, le juge-arbitre a dit ce qui suit:

    L'avocate de sept des prestataires affirme que "jours de relâche", "congés accumulés" ou "jours de congé" sont interchangeables. Personnellement, je crois que si d'autres termes sont utilisés dans les conventions collectives, par exemple "paiements des congés accumulés" et "salaires de congés", c'est que l'employeur peut ainsi tenir compte des dispositions du Code du travail et l'employé peut disposer d'un terme différent de jours de relâche ou congés accumulés dans l'espoir de contourner " les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement. 9

    Le juge-arbite a dit qu'il y avait deux questions en litige dans tous les appels, soit la répartition des jours de relâche sur la période suivant immédiatement le dernier jour de travail des prestataires et la répartition de la paie de vacances sur la période suivant immédiatement le dernier jour de travail des prestataires. 10Comme les intimés ont admis que les jours de relâche constituent une rémunération, le vrai débat a tourné autour de la façon dont on a calculé les jours de relâche. Selon le juge-arbitre, la convention collective prévoyait notamment, à la clause 13, que la paie de congés payés doit être versée a la fin de chaque mois. Le juge-arbitre ajoute ensuite ce qui suit:

    Les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement utilisent tous les deux les mots "a droit" et avant que l'on puisse juger que le prestataire a travaillé une pleine semaine, il doit "avoir droit" aux "jours de relâche", "jours de congé", "congés accumulés" ou "aux paiements des congés accumulés".
    Ici, la convention collective précise explicitement que le congé doit être payé à la fin de chaque mois, ce qui élimine réellement tout droit aux payes de congé après cette date. Lorsqu'un prestataire est licencié, son droit aux jours de relâche ou aux congés accumulés ou à la paye de congés ne peut s'appliquer qu'à compter du premier jour du mois au cours duquel il est licencié.
    Quant aux calculs, il faut porter une attention particulière à la convention collective et c'est celle qui y est exposée que l'on doit utiliser pour Kelly, Williams et Mitchell. 11

    Le juge-arbitre a décidé que, dans le cas de Kelly, Williams et Mitchell, "chaque prestataire est tenu par les dispositions des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement, mais la rémunération ne vaut que pour le premier du mois jusqu'au jour du départ,"... 12


    Les prétentions des parties


    Essentiellement, le requérant soutient qu'en confondant la notion de jour de congé avec celle de congé payé, le juge-arbitre a commis une erreur de droit, puisqu'il a restreint l'application des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement en se fondant sur la clause 13.7 de la convention collective. Les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement et la clause 13.7 de la convention collective portent sur deux notions différentes. Le Règlement porte sur la période de congé (jour de congé), tandis pue la clause 13.7 de la convention collective traite de la paie de congé. La principale question à trancher est donc celle de savoir si, en raison de leurs heures travaillées, les intimés ont droit à des jours de congé, c'est-à-dire à une période de congé. I1 n'est pas pertinent de savoir s'ils ont droit à une paie de congé payé pour cette période-là.

    Les intimés font valoir qu'aucune erreur de droit n'a été commise. Subsidiairement, ils ajoutent que, si les cas est déféré au juge-arbitre, notre Cour devrait enjoindre à celui-ci de calculer le congé auquel le requérant a droit conformément à la décision que nous avons rendue dans Syndicat canadien des officiers de marine marchande c. Conseil arbitral et Walsh 13 et dans laquelle nous avons confirmé la décision d'un juge-arbitre relativement à la demande de prestations de Henri Fortin. 14 Dans cette affaire-là, le juge-arbitre a jugé que Fortin n'avait droit qu'à vingt-sept jours de congé plutôt qu'à soixante, parce qu'il a perdu des jours de congé en raison du fait qu'il a omis de les prendre avant la date prescrite mentionnée dans la convention collective pertinente (c'est-à-dire le 1er décembre).


    Le but de la Loi


    La Loi énonce les critères généraux d'admissibilité qu'une personne doit établir pour prouver qu'elle a droit à des prestations d'assurance-chômage.

    Selon l'article 6 de la Loi 15, pour qu'un assuré soit admissible à recevoir des prestations, il doit y avoir eu arrêt de sa rémunération tirée d'un emploi (entre autres conditions). Selon l'article 2 de la Loi, l’expression "arrêt de rémunération" désigne ce qui suit:

    "arrêt de rémunération" L'arrêt de la rémunération d'un assuré lorsque celui-ci cesse d'être à l'emploi d'un employeur par suite de mise à pied ou pour toute autre raison, ou une réduction de ses heures de travail entraînant une réduction de rémunération telle que prescrite;
    (c'est moi qui souligne)

    L’article 37 du Règlement indique les cas où il y a arrêt de rémunération au sens de l'alinéa 2(1)(n) de la Loi. La règle générale concernant l'arrêt de rémunération se trouve au paragraphe 37(1), dont le libellé est le suivant:

    Sous réserve des dispositions du présent article, un arrêt de rémunération survient quand, après une période d'emploi, l'assuré est licencié ou cesse d'être au service de son employeur, et se trouve ou se trouvera à ne pas avoir travaillé pour cet employeur durant une période de sept jours consécutifs ou plus, à l'égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi, autre que les rémunérations dont il est question au paragraphe 58(12), ne lui est payable ni attribuée.

    Selon le paragraphe 37(3) du Règlement lorsque l'employé est licencié ou cesse d'être au service de son employeur à un, moment où il a droit à une période de congé, l'arrêt de rémunération a lieu à l’expiration de cette période de congé plutôt qu'au moment prescrit au paragraphe 37(1).

    Le paragraphe 37(3) du Règlement se lit comme suit:

    37.(3) Lorsque l'assuré accomplit régulièrement un plus grand nombre d'heures, de jours ou de postes de travail que ne le font normalement dans une semaine civile les personnes employées à plein temps et que, pour cette raison, il a droit, en vertu de son contrat de louage de services, à un congé d'une semaine ou plus, il n'est pas censé avoir subi un arrêt de rémunération pendant ce congé.

    Selon l'article 8 de la Loi, lorsqu'un assuré qui remplit les conditions requises aux termes de l'article 6 formule une demande initiale de prestations, il a le droit de recevoir des prestations pour chaque semaine de chômage comprise dans la période de prestations. Suivant le paragraphe 10(1) de la Loi, une semaine de chômage est une semaine au cours de laquelle l'assuré n'effectue pas une semaine entière de travail.

    L’article 42 du Règlement, qui s'intitule "Semaine entière de travail", "Employé", indique la période au cours de laquelle l'assuré est présumé avoir effectué une semaine entière de travail aux fins de la Loi, ce qui a pour effet d'empêcher le paiement de prestations après la période établie comme étant la période visée par la demande. Voici le libellé du paragraphe 42(4):

    (4) L'assuré, qui travaille habituellement plus d'heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d'une semaine des personnes employées à plein temps et qui, pour cette raison, a droit, aux termes de son contrat de travail, à une période de congé, est censé avoir travaillé une semaine entière de travail au cours de chaque semaine qui tombe complètement ou partiellement dans cette période.

    Commentaires


    Lorsqu'on lit les mots des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement selon leur sens grammatical et habituel, compte tenu du contexte dans lequel ils sont utilisés, il apparaît évident que, lorsqu'un assuré a droit, en vertu de son contrat d'emploi, à une période supplémentaire de congé le dernier jour où il exerce son emploi, cette période de congé devrait être attribuée à la période qui suit son dernier jour de travail. Les mots utilisés dans le Règlement en question ne permettent d’examiner le droit à la rémunération ou à des sommes d'argent et la réception de celles-ci.

    À mon avis, le juge-arbitre a confondu la notion du droit à la paie de congés exigible, selon la convention collective, ainsi que du paiement et de la répartition de cette paie de congés avec la notion de la période de congé qui s’accumule et doit être déterminée séparément d'après la convention. I1 a commis une erreur de droit en disant, selon l’interprétation qu'il a donnée aux paragraphes 37(3, et 42(4) du Règlement, que les notions de paie de congés et de jour de congé (période de congé) étaient interchangeables. I1 a donc commis une erreur de droit lorsqu'il a considéré, en se fondant sur les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement, la paie de congés comme un élément de la rémunération pour le motif que "le montant de la rémunération est le montant des paiements de congés accumulés à compter du premier jour du mois au cours duquel il a été licencié". Le fait que la paie de congé est habituellement versée à la fin du mois selon la clause 13.7 de la convention collective n'est pas pertinent en l'espèce. Aux fi d'appliquer les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement, il n'est pas pertinent de se demander si la paie de congé est payée à la fin du mois. En outre, dans le cas de George Mitchell, la clause 13.7 n'est entrée en vigueur que le 1er juin 1987.

    Par ailleurs, selon leur argument subsidiaire, les intimés demandent ni plus ni moins à la Cour d'appliquer la convention collective de façon que les jours de congé qui sont perdus en raison de l'expiration d'un délai prescrit dans la convention ne soient pas retenus aux fins du calcul auquel les assurés ont droit.

    I1 ne m'est pas difficile d'être d’accord avec cet argument, qui découle d'une application appropriée de la convention collective aux faits, si c'est bien ce qui s'est produit. Compte tenu de la décision que nous avons rendue dans l'arrêt Syndicat canadien des officiers de marine marchande, précité, où nous avons confirmé l'arrêt In Re Henri Fortin, précité, aucune directive spéciale au juge-arbitre ou à la Commission n'est requise.


    KEAGAN, GREEN, KNOX, FARAGO


    George Keagan et les personnes mentionnées dans sa demande ("Keagan"), Robert Green et les personnes mentionnées dans sa demande ("Green"), Robert Knox et les personnes mentionnées dans sa demande ("Knox") et Bryan Farago et les personnes mentionnées dans sa demande ("Farago") sont membres du Canadian Maritime Union, section locale 40 ("CMU"), qui est partie à une convention collective conclue avec ULS International Inc. ("ULS"), laquelle convention était en vigueur du 1er avril 1984 au 31 mars - 1987 (la "convention collective"). ULS International Inc. est l'employeur des intimés aux fins de la présente demande.

    La convention collective

    La clause XVI de la convention collective, qui s'intitule "Vacances et paie de vacances", se lit en partie comme suit:

    CLAUSE XVI - VACANCES ET PAIE DE VACANCES
    16.01a) Tous les employés comptant moins de deux (2) années d'ancienneté chez l'entreprise recevront des vacances allant jusqu'à trente (30) jours ainsi qu'une paie de vacances calculée au taux de quatre (4) pour cent de la rémunération de ces employés pour la période pendant laquelle ils ont effectivement travaillé pour la société au cours de la saison de navigation.
    b) Tous les employés qui ont acquis de deux (2) à huit (8) années d'ancienneté chez la société recevront jusqu'à soixante (60) jours de vacances, soit doux périodes de trente (30) jours chacune, ou des vacances selon une entente pouvant être convenue entre les parties, et la paie de vacances sera calculée au taux de six (6%) pour cent de la rémunération de ces employés pour la période au cours de laquelle ils ont effectivement travaillé pour la société pendant la saison de navigation en question.
    c) Tous les employés qui ont acquis chez la société au moins huit années d'ancienneté recevront jusqu'à soixante (60) jours de vacances répartis en deux (2) périodes de trente (30) jours chacune ou des vacances selon l'entente pouvant être convenue entre les parties, et la paie des vacances sera calculée au taux de huit (8%) pour cent de la rémunération de ces employés pour la période au cours de laquelle ils on effectivement travaillé pour la société pendant la saison de navigation en question.
    d) La paie de vacances devient exigible lorsque l'employé quitte le navire, quelle qu'en soit la raison.
    e) Aux fins de la présente clause, l'ancienneté d'un employé est déterminée conformément à la liste générale d'ancienneté de la société qui est affichée à l’occasion conformément à la clause 9.01.
    16.02 Seuls les employés ayant acquis de l'ancienneté peuvent prendre des vacances. Nonobstant ce qui précède, toutes les vacances doivent être prises entre le 15 juin et le 20 novembre pendant la saison de navigation, à moins d'une entente différente conclue entre les parties."
    ...

    La clause XVII de la convention collective, qui s'intitule "Paie de congés accumulés", se lit comme suit: 16

    CLAUSE XVII - PAIE DE CONGÉS ACCUMULÉS
    17.01a) Une paie de congés accumulés est versée h tous les employés et calculée pour chaque heure travaillée en multiplient le taux horaire de base de l'employé par 0,334. Le taux horaire de la paie de congés accumulés est indiqué à l'annexe "A" de la présente convention.
    b) L'employé reçoit sa paie de congés accumulés tous les mois ou lorsqu'il quitte l'emploi de la société, pour une raison ou pour une autre.
    c) Les employés qui sont en service pendant trois mois et en congé pendant un mois accumuleront une paye de congés pour une période de trois mois, jusqu'à ce qu'ils prennent leurs vacances mensuelles ou qu'ils mettent fin à leur emploi, pour une raison ou pour une autre.

    Les faits


    Keagan a déposé une demande de prestations d'assurance-chômage auprès de la Commission le 30 décembre 1986. I1 a fondé son droit de recevoir des prestations sur l'emploi qu'il a exercé comme préposé à l'entretien des navires de marchandises chez ULS. Son dernier jour de travail était le 23 décembre 1986. I1 a travaillé pendant cent dix jours. Son taux horaire de base était de 9,18 $ et il travaillait habituellement cinquante-six heures par semaine. D'après le calcul de la Commission, le 23 décembre l986, Keagan avait accumulé 36,74 jours de congé non utilisés. La Commission l'a avisé que ses prestations seraient suspendues du 25 décembre 1986 au 29 janvier 1987, conformément à l’article 6 (auparavant l'article 17) de la loi et au paragraphe 37(3) du Règlement. Pour ordonner cette suspension, la Commission a réparti 36,74 jours de congé non utilisés sur la période suivant immédiatement le dernier jour de travail de Keagan, ce qui a donné une suspension pour la période allant du 24 décembre 1986 au 29 janvier 1987 inclusivement. Keagan a porté cette décision en appel.

    Green a déposé une demande de prestations d'assurance-chômage auprès de la Commission le 29 décembre 1986. I1 avait travaillé pour ULS International Inc. comme matelot de pont. Son dernier jour de travail était le 24 décembre 1986. D'après le calcul de la Commission, il avait accumulé 32,73 jours de congé, dont 15,73 jours n'avaient pas été pris le 24 décembre 1986. La Commission a avisé Green que ses prestations seraient suspendues du 29 décembre 1986 au 2 janvier 1987 inclusivement, conformément à l'article 8 (auparavant l’article 19) de la Loi et au paragraphe 42(4) du Règlement. La suspension était fondée sur l'attribution de dix jours de congé non utilisés au 25, 26 et 27 décembre et à la période allant du 28 décembre 1986 au 3 janvier 1987. Les 3,73 jours de congé non utilisés ont été convertis en sommes d'argent et répartis sur la semaine débutant le 4 janvier 1987, conformément au paragraphe 58(4) du Règlement. 17

    Le 2 septembre 1987, les appels de Keagan et Green ont été entendus ensemble par un conseil arbitral. Les membres du conseil ont rejeté leur appel et, par décision majoritaire, confirmé la décision de la Commission. Le conseil a décidé que la Commission avait réparti de façon appropriée les jours de relâche accumulés par ces prestataires.

    Knox a déposé une demande de prestations d'assurance-chômage auprès de la Commission le 30 décembre 1987. I1 avait travaillé comme matelot de pont pour ULS. Son dernier jour de travail était le 23 décembre 1987. La Commission a déterminé qu'il avait accumulé 37,12 jours de congé non utilisés. Elle l'a avisé que ses prestations étaient suspendues du 24 décembre 1987 au 6 février 1988, conformément à l'article 6 (auparavant l'article 17) de la Loi et au paragraphe 37(3) du Règlement. La suspension était fondée sur la répartition de 37,12 jours de congé non utilisés et d'une paie de vacances de 933,37 $ sur la période suivant immédiatement le dernier jour de travail de Knox. Trente et un jours ont été attribués à la période allant du 24 décembre 1987 au 23 janvier 1988 inclusivement. Les 6,12 jours qui restaient ont été convertis en sommes d'argent payables, réparties, de même que la paie de vacances, sur la période allant du 24 janvier au 6 février 1988 inclusivement. Knox a interjeté appel de cette décision. Le 2 novembre 1988, le conseil arbitral a rejeté son appel et confirmé la décision de la Commission. Après avoir examiné les arguments qui lui ont été soumis, le conseil a décidé que la Commission avait eu raison de considérer les jours de relâche comme une rémunération.

    Farago a déposé sa demande de prestations d'assurance-chômage le 7 octobre 1987. I1 avait travaillé comme timonier pour ULS. Son dernier jour de travail était le 2 octobre 1987. La Commission a déterminé qu'il avait accumulé 20,37 jours de congé non utilisés. Elle l'a avisé que ses prestations étaient suspendues du 5 octobre au 16 octobre 1987 inclusivement, conformément à l'article 8 de la Loi et au paragraphe 42(4) du Règlement. La suspension reposait sur la répartition de 17 jours de relâche sur la période se terminant le 16 octobre 1987. Les 3,37 jours de congé non utilisés ont été convertis en sommes d'argent réparties, de même que la paie de vacances, sur les semaines débutant les 18 et 25 octobre 1987.


    La décision du juge-arbitre


    Le juge-arbitre a adopté le raisonnement suivant : 18

    L'article XVII - Paiement des congés accumulés, stipule entre autres que "on paie chaque mois ou lors de son départ de la Compagnie, quel qu'en soit le motif". (C'est moi gui souligne). Je juge que le mot "ou" est une partie disjonctive parce que la convent. collective ne stipule aucune disposition laissant le choix à l'employé d’être payé chaque mois ou lors de son départ, ou prévoyant qu'on doive lui demander ce qu'il désire. Conséquemment, dans le cas de Keagan, Green, Figaro et Knox, leur seul droit au paiement des congés d’absence accumulés ne porte que sur la somme gagnée entre le premier jour du mois et la date de leur départ, et cette somme est une rémunération.

    I1 a décidé que "Chaque prestataire est tenu par les dispositions des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement, mais la somme de la rémunération est la somme des congés accumulés à compter du premier jour du mois où il a été licencié..." 19 il a été licencié...


    Les prétentions des parties


    Encore là, le requérant soutient que le juge-arbitre a commis une erreur de droit en omettant de faire la distinction entre le droit à la paie de congés et aux jours de congé, qui s'accumulent et sont déterminés séparément d'après la convention collective. La disposition pertinente aux tins des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement est la clause XVI de la convention collective et non la clause XVII (17.01b)). Essentiellement, le juge-arbitre a commis une erreur en accordant aux intimés le droit au paiement des crédits pour congés payés selon la convention collective afin de déterminer comment la période de congés devrait être répartie selon les dispositions des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement.

    Les intimés sont d'avis que le juge-arbitre n'a pas commis d'erreur de droit, et ils ont réitéré leur conclusion subsidiaire mentionnée ci-dessus.


    Commentaires


    La convention collective ne traite pas des congés accumulés, mais uniquement du "paiement des congés accumulés" (clause XVII), des "vacances" et de "la paie de vacances" (clause XVI). Mon raisonnement dans ce cas-ci est cependant identique à celui que j'ai déjà exposé.

    À mon avis, le juge-arbitre a confondu les notions de paiement de congés accumulés et de jour de congé ("vacances"). La clause XVI de la convention collective était la seule disposition pertinente aux fins d'appliquer les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement.


    KOWALSKY, CHEESE, FORD


    Tous trois sont membres du Syndicat international des marins canadiens (SIMC) et sont régis par la convention des Grands Lacs (la "convention collective") conclue entre le SIMC et l'Association canadienne des Armateurs des Grands Lacs (A.C.A.G.L.).


    La convention collective


    La clause 31 de la convention collective, qui était en vigueur du 1er juin 1984 au 31 mai 1987, traite des jours de congé et des paies de congé de la façon suivante: 20

    31. CONGÉ ET PAYE DE CONGÉ
    a) Sous réserve des conditions et exceptions stipulées dans le présent article, chaque employé aura droit à un congé du navire sur lequel il travaille.
    b) Le personnel non breveté aura le droit de prendre un congé pourvu qu'un remplacement qualifié, tel que déterminé par le capitaine ou l'ingénieur en chef, sera disponible. Tout refus par le capitaine, ou l'ingénieur en chef, d'accepter un personnel de remplacement sera soumis à la procédure du redressement des griefs.
    c) Tout employé qui quitte un navire avant qu'une relève appropriée soit disponible perdra son emploi avec la Compagnie.
    d) Un congé pris après le 30 novembre durant l'année sera accordé sur une base d'ancienneté à seulement un membre d'équipage non breveté par chaque classification de quart, et à seulement un employé de jour par chaque département, sujet à l'alinéa b) ci-dessus.
    e) La paye de congé sera calculée en multipliant le total des heures travaillées par le facteur 0,334 divisé par 8; le congé n'est accordé que pour les journées complètes de travail accumulées, mais dans tous les cas pour pas moins de trente (30) jours de congé.
    f) La paye de congé sera calculée en multipliant par 0,334 le taux horaire de base pour chaque heure travaillée.
    g) La paye de congé doit être versée tous les mois.
    h) À compter du 1er juin 1985, un employé qui prend congé et qui a complété au moins un an de service avec la Compagnie sera payé une allocation pour couvrir les frais raisonnables de route aller entre le port de débarquement et son domicile au Canada, une fois par saison, pour un montant n'excédant pas cent quatre-vingts (180 $) dollars. A compter du 1er juin 1986, un employé qui prend congé et qui a complété au moins un an de service avec la Compagnie sera payé une allocation pour couvrir les frais raisonnables de route aller-retour entre le navire et son domicile au Canada une fois par saison pour un montant n'excédant pas trois cent soixante (360 $) dollars. Ces frais de transport comprennent un billet de train de première classe, plus une couchette et les repas ou un vol de classe économique, ou une allocation-automobile. A compter du 1er juin 1985 l'allocation-automobile sera de vingt-trois (0,23 $) cents par kilomètre et à compter du 1er juin 1986 l'allocation-automobile sera de vingt-quatre (0,24 $) cents par kilomètre là où aucun service de transport en commun est disponible. Toutes réclamations pour allocation et frais de transport doivent être confirmées par la présentation de reçus originaux couvrant les frais réels encourus.

    Selon ces dispositions, chaque employé a droit à un congé du navire sur lequel il travaille (paragraphe 31a)). Le nombre de jours de congé accordés à chaque employé est calculé en multipliant les heures totales travaillées par le facteur 0,334 divisé par l3. Le congé ne peut être pris pour une période de moins de trente jours à la fois (paragraphe 31e)).

    Chaque employé reçoit également une paie de congé qui est calculée en multipliant le facteur 0,334 par le taux horaire de base pour chaque heure travaillée. La paie de congé est versée chaque mois au cours duquel l’employé travaille .paragraphes 31(f) et (g)).

    Selon le paragraphe 31(k) de la convention collective en vigueur du 1er juin 1987 au 31 mai 1990 ("convention renouvelée des Grands Lacs"), l'article 31 de la convention des Grands Lacs demeurait en vigueur au cours de la saison de navigation, de 1987.


    Les faits


    Kowalsky a déposé une demande de prestations d'assurance-chômage le 30 janvier 1987. I1 a fondé son droit à des prestations d'assurance-chômage sur le fait qu'il travaillait comme matelot pour P.H. Shipping. Son dernier jour de travail était 11 novembre 1986. Habituellement, il travaillait huit heures par jour, sept jours par semaine. Bien qu'il ait présenté une demande pour une période continue, il a travaillé pour Socanov Inc. (auparavant Branch Lines Limited) du 12 mai au 6 juillet 1987 comme chef de relève. Son taux de salaire horaire s'élevait à 11,15 $. Au 7 juillet 1987, il avait droit à dix-neuf jours de congé accumulés qu'il n'avait pas utilisés. La Commission l'a avisé qu'il n'avait pas le droit de recevoir des prestations pour la période allant du 6 juillet au 24 juillet 1987 inclusivement, parce qu'il n'avait pas prouvé qu’il était sans emploi conformément à l’article 8 (auparavant l'article 19) de la Loi. En se fondant sur l'avis de Socanov Inc. selon lequel Kowalsky avait accumulé dix-neuf jours de congé non utilisés, la Commission a appliqué le paragraphe 42(4) du Règlement. Cinq journées de congé non utilisées ont été réparties sur la période allant du 7 juillet au 11 juillet 1987 et quatorze jours sur la période allant du 12 juillet au 25 juillet 1987. Kowalsky a porté cet décision en appel. Son appel a été entendu par un conseil arbitral le 8 octobre 1987. Le conseil a rejeté son appel et confirmé la décision initiale de la Commission. Le conseil en est arrivé à la conclusion que, d'après le paragraphe 42(4) du Règlement, les dix-neuf jours de congé de Kowalsky qui s'étaient accumulés du 12 mai au 6 juillet 1987 ne devraient pas être répartis sur la période suivant immédiatement son dernier jour de travail. En conséquence, la Commission avait eu raison de répartir les dix-neuf jours de congé sur la période allant du 7 juillet au 25 juillet 1987. Dans un avis d'appel en date du 28 octobre 1987, Kowalsky e porté la décision du conseil d’arbitrage en appel devant le juge-arbitre.

    Le 19 janvier 1986, Cheese a déposé auprès de la Commission une demande de prestations pour la période débutant le 5 janvier 1986. Cette demande est demeurée en vigueur jusqu’au 3 janvier 1987. Le 12 janvier 1987, l'intimé a déposé auprès de la Commission une autre demande de prestations d'assurance-chômage. I1 a fondé son droit à des prestations sur le fait qu'il avait exercé un emploi comme matelot de pont de relève pour Algoma Central Railway - Marine Division. I1 a travaillé pour celle-ci du 17 octobre au 1er décembre 1986 à raison de sept jours par semaine, huit heures par jour. I1 recevait un taux horaire de base de 8,41 $ et avait droit à 17,20 jours de congé accumulés non utilisés. Le Commission l'a avisé qu'il n'avait pas le droit de recevoir de prestations pour la période allant du 7 décembre au 13 décembre 1986 inclusivement, parce qu'il n'avait pas prouvé qu'il était sans emploi, comme il devait le faire conformément à l’article 8 (auparavant l'article 19) de la Loi. En se fondant sur l'avis de l'employeur de l'intimé selon lequel celui-ci avait accumulé 17,20 jours de congé non utilisés, la Commission a appliqué le paragraphe 42,4 du Règlement et réparti sept jours sur la période allant du 7 décembre au 13 décembre 1986 inclusivement. Suivant le paragraphe 58(4) du Règlement, le reste des jours de congé accumulés et non utilisés de l'intimé a été converti en somme; d'argent gagnées et incluses dans le montant de 336,40 $ attribué pour la semaine débutant le 30 novembre 1986 et le montant de 349,86 $ attribue pour la semaine débutant le 14 décembre 1986. Cheese a porté cette décision en appel. Le 8 avril 1987, le conseil a rejeté son appel par jugement majoritaire et confirmé la décision de la Commission. Dans un avis en date du 10 avril 1987, Cheese a porté la décision majoritaire du conseil arbitral en appel devant le juge-arbitre.

    Ford a déposé une demande de prestations d'assurance-chômage auprès de la Commission le 22 septembre 1987. I1 a fondé son droit de recevoir des prestations d'assurance-chômage sur le fait qu'il a travaillé comme timonier de relève pour Canada Steamship Lines Inc. Son dernier jour de travail était le 18 septembre 1987. I1 a travaillé pendant 56 jours pour Canada Steamship Lines Inc. entre le 25 juillet et le 18 septembre 1987. I1 travaillait habituellement 56 heures par semaine. Au 18 septembre 1987, il avait accumulé 18,54 jours de congé non utilisés. Sa demande devait entrer en vigueur le 20 septembre 1987. Cependant, la Commission l'a avisé qu'il n’aurait pas droit à des prestations avant la semaine débutant le 4 octobre 1987. La suspension des prestations était fondée

    a) sur le répartition, conformément au paragraphe 42(4) du Règlement, de 15 jours de congé non utilisés que l'intimé avait accumulés du 19 septembre au 3 octobre 1987; et
    b) sur la répartition sur la semaine débutent le 4 octobre 1987 d'une paie de vacances de 119,50 $ reçue le 18 septembre 1987, et sur la conversion des 3,54 jours de congé qui restaient en sommes d'argent gagnées conformément paragraphe 58(4) du Règlement.

    Ford en a appelé de cette décision. Le 13 novembre 1987, le Conseil a accueilli en partie l'appel de l'intimé. I1 a annulé la répartition des 18, 54 jours de congé accumulés de septembre au 3 octobre 1987 et pendant la semaine débutant le 4 octobre 1987, mais il a confirmé la décision par laquelle la Commission a considéré la paie de vacances comme une rémunération suivant l’article 57 du Règlement. Le conseil arbitral en est arrivé à la conclusion que Ford n'a pas été payé pour les jours de congé accumulés et qu'il n'y avait aucune preuve au dossier à l'appui de cette prétention. La Commission a porté cette décision du conseil arbitral en appel.


    La décision du juge-arbitre


    Le juge-arbitre a dit ce qui suit: 21

    L’alinéa 31q) du contrat de 1984-1987 stipule que le paiement des congés doit être versé chaque mois. I1 n'y a donc aucun "droit" qui permette aux paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement de s'appliquer, à l'exception de la période de temps travaillée au cours du mois où le prestataire est congédié. I1 est vrai que les parties ont droit à l'argent ou aux congés. Ainsi, si un marin travaille 21 jours et gagne 7 jours de congé, il peut prendre ces congés ou on les lui paiera à la fin du mois. Dans les deux cas, à la fin du mois, tous les droits sont disparus.

    I1 en est arrivé à la conclusion que "Chaque prestataire est tenu par les dispositions des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement, mais la paie des congés n'est que la somme gagnée à compter du premier jour du mois où il fut licencié..." 22 compter du premier jour du mois où il fut licencié...


    La prétention du requérant


    Le requérant soutient essentiellement" qu'en confondant la notion du jour de congé avec celle de la paie de congé, le juge-arbitre a commis une erreur de droit, parce qu'il a restreint l’application des paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement en se fondant sur les dispositions de la convention collective concernant la paie de congé. Les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement et les paragraphes 31f) et g) de la convention collective portent sur deux notions différentes. Le Règlement traite d'une période de congé (jour de congé), tandis que les paragraphes 3l f) et g) de la convention collective portent sur la paie de congé. La question cruciale à trancher est celle de savoir si, en raison des heures travaillées, les intimés ont droit à des jours de congé, c'est-à-dire à une période de congé. I1 n'est pas pertinent de savoir s'ils ont droit à une paie de congé pour cette période.


    Commentaires


    À mon avis, le juge-arbitre a confondu les notions de paie de congé et jour de congé. Les dispositions de la clause 31 de la convention collective qui portent sur les jours de congé étaient les seules dispositions pertinentes aux fins d'appliquer les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement. Les dispositions sur la paie de congé de la clause 31 de la convention collective ne sont pas pertinent es au x fins d'appliquer les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement.


    CONCLUSION


    Pour ces motifs, j’accueillerais les présentes demandes fondées sur l'article 28. J'annulerais la décision du juge-arbitre en date du 12 décembre 1988. Je lui renverrais l'affaire pour nouvel examen, pour le motif que les dispositions relatives à la paie de congé des diverses conventions collectives ne sont pas pertinentes aux fins d'appliquer les paragraphes 37(3) et 42(4) du Règlement aux faits des présents litiges.

    Comme il n'y a aucune raison spéciale d'accorder des dépens à l'une ou l'autre des parties, je rendrais une ordonnance en conséquence.

    Alice Desjardins


    J.C.A.



    « Je souscris à ces motifs
    A.J. Stone, J.C.A. »
    « Je souscris à ces motifs
    Mark R. MacGuigan, J.C.A. »





    1 S.C.1970-71-72, chap. 48, devenu aujourd'hui L.R.C. 1985, chap. U-1, articles 80, 81.

    2 C.R.C., vol. XVIII, chap. 1576, p. 13957.

    3 Kelly, en dossier en appel, p. 146; Williams, dossier en appel, p. 64.

    4 Mitchell, dossier en appel, p. 30.

    5 Mitchell, dossier en appel, p. 30-31.

    6 Kelly, dossier en appel, p. 17, 23.

    7 Williams, dossier en appel, p. 11, 13, 14, 19.

    8 Mitchell, dossier en appel, p. 16, 27.

    9 Kelly, dossier en appel, p. 326.

    10 La décision de l'arbitre au sujet de la paie de vacances (Kelly, dossier en appel, p. 337) n'est pas en litige dans les présentes demandes.

    11 Kelly, dossier en appel, p. 330-331.

    12 Dossier en appel, vol. 2, p. 338.

    13 (1989), 99 N.R. 134.

    14 CUB 13443. l'argument des intimés repose sans doute sur la déclaration suivante de l'arbitre:
    "la cause d'Henri Fortin ne s'applique pas; les faits du présent cas sont tout à fait différents." (Kelly, dossier en appel, p. 337)


    15 Les références correspondent aux dispositions que l'on trouve dans les L.R.C. 1985, chap. U-1.

    16 Knox, dossier en appel, p. 146.

    17 Le paragraphe 58(4) du Règlement se lit comme suit:
    (4) La rémunération payable à un prestataire aux termes d’un contrat de travail, sans que soient fournis des services, ou la somme payable par un employeur à un prestataire pour qu’il revienne au travail ou qu’il accepte un emploi, doit être répartie sur la période pour laquelle elle est payable.


    18 Knox, dossier en appel, p. 194.

    19 Knox, dossier en appel, p. 197.

    20 Kowalsky. dossier en appel, p. 22.

    21 Kowalsky, dossier en appel, p. 73.

    22 Kowalsky, dossier en appel, p. 75. 2011-01-16